18 mars 2024

Temps de lecture : 2 min

Mesures contre la fast fashion : un « premier pas historique » mais un flou qui divise

La fast fashion n’enflamme pas que l’hémicycle de l’Assemblée nationale: les mesures visant à freiner le développement de la mode éphémère votées jeudi font l’objet de vifs débats dans l’industrie textile, d’aucuns trouvant le texte trop laxiste, d’autres trop restrictif, en l’absence de définition forte.

L’Assemblée a voté jeudi à l’unanimité plusieurs mesures phares dont l’interdiction de la publicité pour la vente de vêtements à prix cassés inondant le marché et un malus environnemental renforcé pour les rendre moins attractifs.

Une adoption en première lecture d’un texte qualifié par les associations de défense de l’environnement et des droits humains comme « crucial » ou de « premier pas historique ».

La proposition de loi (PPL), qui devra désormais être examinée par le Sénat, émane du groupe Horizons, l’une des trois composantes de la majorité présidentielle.

La mesure principale consiste en un renforcement du système de bonus-malus dans le secteur textile, pour tenir compte des coûts environnementaux d’une production excessive.

La pénalité serait liée au score environnemental des produits, une nouvelle méthode de notation des produits devant être mise en œuvre.

Son montant, à fixer par décret, pourrait atteindre progressivement jusqu’à 10 euros par produit en 2030, avec un plafond de 50% du prix de vente. Un amendement a prévu des paliers pour atteindre ces 10 euros, notamment un premier à cinq euros en 2025.

Elle définit la fast fashion, avec des critères basés sur les volumes produits et la vitesse de renouvellement des collections, mais renvoie à des décrets pour fixer des seuils chiffrés.

Une acception large du mot fast fashion, qui agite entreprises et associations, qui se demandent qui pourrait être assujetti à ces mesures si elles étaient finalement adoptées.

 

« Inapplicable »

La coalition d’ONG Stop fast fashion se réjouit ainsi que le texte permette « la responsabilisation des plateformes de commerce en ligne, telles que Shein, Temu, Ali Baba et Amazon, au même titre que les autres enseignes de la fast fashion ».

Cependant, elle regrette l’absence de « définition dans la loi des pratiques qui relèveraient de la fast fashion » mais aussi de « l’exigence de transparence sur les quantités mises en marché par les enseignes » et « d’un affichage social ».

Simon Peyronnaud, cofondateur de Losanje, société qui valorise des textiles excédentaires ou de seconde main pour produire de nouveaux vêtements, espère lui aussi des seuils larges. Cela permettrait de « rappeler à l’ordre des entreprises de produits textiles low-cost, dont beaucoup sont exclues de la proposition actuelle », dit-il à l’AFP.

La définition, qui « reste très vague », « impacte toutes les marques de mode et les places de marché », estime en revanche Marion Bouchut, porte-parole du géant chinois Shein en France.

Stop fast fashion se félicite elle que les députés aient introduit la performance environnementale des produits comme critère de déclenchement des pénalités financières.

A contrario, l’Alliance du Commerce estime qu’avec cette mesure, « la proposition de loi rate sa cible » et pourrait impacter les entreprises nationales.

« La méthode (de cet affichage) est aujourd’hui contestée », a souligné Yohann Petiot, son directeur général, auprès de l’AFP.

En outre, les acteurs de l’industrie textile émettent des réserves sur l’articulation de ce texte avec le droit français et le droit européen.

Ainsi H&M invite-t-il le législateur « à s’inscrire dans la continuité des projets en cours au niveau européen, en particulier ceux liés à l’harmonisation des (filières à responsabilité élargie des producteurs) textiles, ainsi que dans la continuité des avancées permises par la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire (Agec) » adoptée en 2020.

Isabelle Lefort, cofondatrice de l’association sectorielle Paris Good Fashion, juge que « la France est prompte à faire des lois mais ne se dote pas des moyens pour vérifier de leur bonne application et donc de leur efficacité ».

Yohann Petiot la rejoint: tel quel, le texte « sera inapplicable, car incontrôlable chez les sites en ligne internationaux ».

En France, la fast fashion est un secteur en croissance, estimé à trois milliards d’euros en 2022, soit environ 10% des revenus du secteur de l’habillement, le Boston Consulting Group (BCG), sollicité par l’AFP. Shein, Temu et Amazon « pèsent pour plus de 50% des ventes de l’ultra fast fashion en France », souligne-t-il.

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