13 juin 2022

Temps de lecture : 4 min

« Les marques ne peuvent pas se permettre de faire des calculs carbone au doigt mouillé », Jean Dagré, Bilobay

Sans doute, l’autonomie est elle le gage le plus sûr en matière de lutte contre le réchauffement climatique. En tout cas, le créateur de Bilobay, start-up 100% indépendante, Jean Dagré l’estime fiable. Sa startup calcule et réduit l’empreinte carbone des métiers de la com, tout en achevant actuellement une démarche de certification qui garantit la qualité de ses modes de calculs et de ses référentiels de facteurs d’émission. La parole à Jean Dagré, ancien patron d’agence qui en 2012 faisait déjà le bilan carbone de son entreprise…

INfluencia. : comment avez-vous décidé de quitter la com pour créer Bilobay ?

Jean Dagré : j’ai revendu mon agence créée il y a 29 ans, il y a quelques mois. J’ai eu conscience très tôt de l’impact de la communication sur l’environnement, et il y a dix ans j’avais créé Bilobay afin de faire le bilan carbone de l’entité que je dirigeais. Il se trouve qu’ensuite j’ai fait deux bilans pour des clients, Cora et le CRT Alsace, avec un cabinet spécialisé en méthode bilan carbone telle que définie par l’ADEME. J’ai alors constaté que le bilan carbone était long, fastidieux et cher, alors que la calcul carbone a priori est beaucoup plus agile et efficace. J’ai donc investi dans une plateforme SAAS qui englobe l’ensemble des secteurs de la communication, du print au digital en passant par TV, cinéma, radio et les campagnes d’affichage, en couvrant la conception, la production et la diffusion, mais aussi du hors média (événementiel, etc…). Il y a 3 ans j’ai commencé à avoir beaucoup de sollicitations de la part de marques et j’ai donc relancé Bilobay.

J’ai  constaté que le bilan carbone était long, fastidieux et cher, alors que la calcul carbone a priori est beaucoup plus agile et efficace.

IN. : comment procédez-vous concrètement ?

J.D. : nos données viennent à 90% des données de l’ADEME, et pour le reste, nous allons chercher toutes les données disponibles auprès du GHG protocole ou du Shift Project, ou dans la littérature existante sur le marché. Le travail de certification est long et complet, Dekra rentre dans tous les détails en vérifiant toutes nos sources. Par exemple, pour la production, nous allons prendre en compte le trajet de la pâte à papier entre l’imprimeur et le diffuseur. Si vous avez une pâte à papier produite en Pologne, imprimée en Italie et diffusé en France, l’empreinte carbone sera très lourde. D’autant que Bilobay permet de prendre en compte le mix énergétique de chaque pays. Et en Pologne bien sûr, il est bien plus lourd qu’en France. Dans la diffusion, on peut par exemple prendre en compte la consommation électrique des panneaux, qui sont parfois éclairés toute la nuit même si personne ne les voit. Nos clients comme MAIF ou Volvic nous disent que c’est la granulométrie de Bilobay qui permet ensuite de découvrir des pistes efficaces de réduction.

Pour revenir sur la MAIF , elle nous a dit avoir mis en place en interne une culture du changement grâce à son calcul carbone avec Bilobay.

IN. : comment calculer l’impact d’une vidéo, a priori plus compliquée à tracer ?

J.D. : sur la vidéo, nous allons calculer la conception, le storyboard etc…, puis la production, le tournage, les déplacements, le montage etc… dans toutes ces étapes, on peut la aussi découvrir des pistes de réduction très intéressantes. Il peut y avoir des facteurs très émetteurs de carbone, et nous conseillons alors la relocalisation des vidéos pour leur production. Ensuite, pour la diffusion, nous allons calculer le flux électrique qui permet d’aller de l’hébergeur au consommateur de la vidéo. Il y a des différences entre la haute et la basse définition, il y a aussi de grosses différences sur la durée de vie des vidéo, alors que la majorité des annonceurs n’ont pas de politique sur ce sujet. Nous mettons en place des bonnes pratiques sur l’ensemble de ces postes. Pour revenir sur la MAIF , elle nous a dit avoir mis en place en interne une culture du changement grâce à son calcul carbone avec Bilobay.

Nos clients ne peuvent pas se permettre de faire des calculs carbone au doigt mouillé. Ils ont besoin d’une vraie plateforme SAAS, avec la production de rapport détaillés.

IN. : on parle souvent de calculettes… N’est-ce pas un terme un peu réducteur ?

J.D. : effectivement, Bilobay n’est pas une simple calculette. Il y a de plus en plus d’outils qui sortent sur le marché dont on ne connait pas les sources d’émission, les modes de calcul, et cela devient alors du gadget. Nos clients ne peuvent pas se permettre de faire des calculs carbone au doigt mouillé. Ils ont besoin d’une vraie plateforme SAAS, avec la production de rapport détaillés. Les données de Bilobay permettent de faire des comparaisons entre les campagnes, d’être utilisés pour les différents rapports RSE. De plus, Bilobay permet de calculer les émissions carbone de flux physiques, quand les calculettes agrègent des flux monétaires, ce qui génère des scores faux. Il faut se baser sur la méthode bilan carbone et entrer dans les détails des flux physiques pour que le calcul soit effectivement utile aux marques. Le calcul carbone c’est un métier, il faut investir, s’adapter, les référentiels de calcul doivent sans cesse être mis à jour, il faut intégrer les retours clients de chaque campagne sur la précédente. Ça bouge tout le temps, dans les technologies, dans les usages comme par exemple pour ce qui est de la visio quo s’est imposée avec la crise sanitaire. Quand on a fait son calculateur ce n’est que le début de l’aventure, ce n’est pas la fin !

l’essentiel pour un calculateur c’est d’être bien financé pour mettre à jour les facteurs d’émission, financer l’évolution de la plateforme, pour l’enrichir et la simplifier.

IN. : vous avez procédé au rachat de votre agence et en parallèle au relancement de Bilobay déjà existant. Où en êtes-vous du développement de son développement ?

J.D. : nous avons beaucoup recruté. Il y a des ingénieurs carbone, des commerciaux, des consultants RSE, et l’équipe en charge de la levée de fonds parce que l’essentiel pour un calculateur c’est d’être bien financé pour mettre à jour les facteurs d’émission, financer l’évolution de la plateforme, pour l’enrichir et la simplifier. Par exemple, l’énergie va être de plus en plus chère, cela va avoir un impact évidemment sur les pratiques. Autre exemple,  Decaux annonce le passage à l’électrique de certains de ses véhicules. Il faut surveiller toutes ces pratiques. Nous sommes en observation et en vigilance à tous les instants pour offrir aux marques un calcul et un conseil indépendant, global et fiable.

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