14 décembre 2023

Temps de lecture : 4 min

Nike et le FC Barcelone ont-ils entamé le divorce ?

Selon plusieurs sources proches du dossier, le FC Barcelone, dont la réputation – et les comptes – ont été sévèrement impactés par de multiples scandales ces dernières années, est en passe de dégouter pour de bon son propre équipementier. La concurrence est déjà postée en embuscade pour récupérer ce géant du football… aux pieds d’argile.

Jusqu’à quand Nike peut-il se permettre d’être associé au FC Barcelone ? Les fans de la discipline l’auront sans doute remarqué, son ancienne poule aux œufs d’or, toujours capable de quelques exploits marketing en dehors des terrains, enchainent les scandales sportifs et judiciaires depuis une dizaine d’années. Une spirale de la défaite qui concerne autant les terribles remontada vécues à Rome et Liverpool que l’inculpation d’anciens cadres début mars pour « corruption », « abus de confiance » et « faux en écritures de commerce » concernant des versements d’argent suspects du club catalan à l’ancien haut responsable de l’arbitrage espagnol, José Maria Enriquez Negreira, également poursuivi. Mi-octobre, Josep Maria Bartomeu, actuel président du club dont il était le sauveur annoncé après son élection, rejoignait lui aussi le banc des accusés.

Des faits bien plus graves qu’une simple défaite sur le carré vert. Alberto Palomar, professeur de droit à l’université Carlos III de Madrid, expliquait que sur le plan pénal, les accusés risquaient des peines de six mois à quatre ans de prison. Quant au club… on parle d’une « suspension de l’activité » voir d’une « dissolution » pure et simple. Pour ne rien arranger, cette bataille judiciaire intervient dans un contexte financier plus que bancal. Acculé par 1,35 milliard d’euros de dette, les blaugrana n’hésitent plus à hypothéquer leur avenir, en revendant l’an dernier 25 % des futurs droits TV de la Liga pour les 25 prochaines saisons pour boucler le dernier mercato. Ou 2022, lorsque le club catalan décidait de revendre le nom de son stade mythique à Spotify pour les huit prochaines années contre 70 millions d’euros annuels.

 

 

Formation autruche

De son côté, la marque à la virgule ne ménage pas ses efforts pour défendre une certaine forme d’intégrité dans le domaine du sport. En 2015, déjà, elle s’affichait aux côtés de la Fifa afin d’établir un Programme d’Intégrité qui visait à « prévenir et à combattre la corruption dans le football ». Depuis, Nike n’a pas hésité à prendre des mesures drastiques contre certains partenaires dont les agissements menaçaient de porter atteinte à sa réputation. Une politique qui l’a conduit en 2016 à suspendre son contrat avec Neymar après que la star brésilienne a été accusé d’évasion fiscale par les tribunaux espagnols. Un divorce extrêmement médiatisé à l’époque…

Malgré toutes ces déclarations d’intentions et ces stars déchues sur l’hôtel de la probité, le FC Barcelone semble toujours bénéficier d’une certaine impunité.

 

 

Deux poids deux mesures

Rappelons les fondamentaux. Quelles qu’en soient les formes, le sponsoring sportif se définit « comme une technique de communication visant à établir un lien identitaire entre un nom commercial et un événement ou un acteur sportif », selon le chercheur Patrick Dambron auteur de Sponsoring et politique de marketing. Un échange s’opère alors entre « une entreprise ou une organisation cherchant à promouvoir la réputation de sa marque et un athlète, une équipe ou un événement sportif, vecteur de valeurs susceptibles d’élargir positivement la notoriété de cette marque »… ce qui semble loin d’être le cas du FC Barcelone dans le contexte judiciaire et sportif qui est le sien.

Il est tout à fait probable que Nike attende la conclusion des enquêtes en cours afin de ne pas agir prématurément si les allégations s’avéraient infondées. Un autre aspect à prendre en considération étant la nécessité pour l’équipementier de ne pas dégrader ses relations avec l’un des clubs les plus prestigieux du monde, qui plus est l’un de ses principaux partenaires. Bien qu’elle ait publié un communiqué exprimant son inquiétude face aux récents événements, on peut donc imaginer que la firme de Beaverton continue de jouer la montre encore un moment.

 

 

Changement de coach

Cette position vis-à-vis d’un partenaire accusé d’irrégularités financières et de corruption semble néanmoins difficile à tenir sur le long terme. D’autant que le Barca, peut-être pour forcer son destin, s’est permis récemment de critiquer publiquement son équipementier en estimant que la qualité de certains produits, les délais de livraison et le service aux joueurs n’étaient pas à la hauteur de ses attentes. Nike, de son côté, explique que les difficultés rencontrées seraient dues à la complexité de gérer un club aussi important que le Barça. L’équipementier américain affirme également que le club catalan est parfois responsable des retards dans la prise de décision…

Les rumeurs de divorce prennent donc de l’ampleur à mesure que les relations semblent se tendre entre Nike et le club, même si le contrat actuel entre les deux parties court jusqu’en 2028. Plusieurs insiders affirment déjà que New Balance serait très intéressé à l’idée de reprendre les rênes marketing du navire catalan.

 

Place au petit nouveau

New Balance, une marque en pleine expansion sur le marché du football, aurait tout intérêt à casser sa tirelire pour s’associer à l’un des clubs les plus prestigieux du monde. D’autant plus que l’entreprise n’est pas dans le même contexte que son puissant homologue. Nike, de par son assise beaucoup plus importante dans l’histoire du football et son engagement – très médiatisé – contre la corruption, possède paradoxalement une image publique bien plus vulnérable aux scandales que son jeune concurrent.

Peut-être pour mieux brouiller les pistes, et ne pas laisser totalement le champs libre à New Balance, Nike travaille actuellement en étroite collaboration avec le club blaugrana sur la conception de ses tenues pour la saison 2024-2025 à l’occasion de son 125e anniversaire, exactement comme ce fut le cas lors de la saison 1999-2000 pour le centenaire du club. De là à savoir si cette opération n’est que la dernière pierre de l’une des collaborations les plus lucratives de l’histoire du sport ou plutôt le symbole d’une relation apaisée entre les deux partenaires… Dans le foot, comme au bal, c’est au coup de sifflet final qu’on paye les musiciens.

 

 

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