23 octobre 2013

Temps de lecture : 3 min

La jeunesse va liker la culture

Quel rapport entretient la jeunesse à la culture classique, dans un contexte où les musées peinent à renouveler et diversifier leurs publics ?

L’art est partout, prêt à être « liké », et son accès réel ou virtuel semble illimité : je visite le musée de l’Acropole en passant par Google Art Project sans passer par Athènes et Nintendo DS me sert de guide si je me rends au Louvre. Aux yeux des lycéens Converse aux pieds et Samsung en poche, la culture classique s’associe ou se combine plus ou moins naturellement avec celles que partage et souvent préfère la majorité : la culture des marques (de Coca-Cola à Apple en passant par Redbull) et celles plus sociales que recouvrent la musique, le sport, la street culture… Paradoxalement, le Louvre est devenu underground ! Perçu par la jeunesse comme une « sous-culture » parmi d’autres.

1 individu, 1 000 identités (et communautés)

Le déterminisme social n’étant plus le fardeau qu’il était, la jeunesse agrège à ses héritages des cultures acquises par des canaux démultipliés. La circulation exponentielle des informations et des personnes a engendré une construction nouvelle de l’identité devenue plurielle. Les identités s’enchevêtrent au sein de communautés aux codes et valeurs versatiles. Confiants, les digital natives* vivent dans ces nouveaux territoires à la manière des « moteurs de recherche » qu’ils ont toujours connus : ils savent qu’ils vont trouver ce qu’ils cherchent sur Leboncoin.fr et ce qu’ils aimeront à coup sûr avec Genius d’iTunes.

Ce rapport immédiat et affinitaire au monde des plus jeunes inclut la découverte par le fruit du hasard. Cette sérendipité virtuelle – ou IRL – multiplie les possibles et favorise les découvertes inattendues. Les communautés s’entrecroisent plus facilement et plus vite. Dans ces conditions, comment la marque ou l’institution culturelle doit-elle prendre la parole et où ? Quels points de rencontres entre la statuaire antique et la jeunesse ?

Les communicants jouent ce rôle de mises en relation des cultures individuelles et collectives. Par ce spectre, la culture « mainstream », celle du plus grand nombre, assimile et remixe celle que nos parents sacralisaient. Des créatifs font se croiser le photographe Ari Marcopoulos et le rappeur JayZ, époux de Beyoncé, pour illustrer son dernier album. Une photographie d’un couple de marbre antique, prise au Metropolitan Museum est choisie avant d’être couverte par le jeu typographique anachronique du graphiste Brian Roettinger. Autre exemple l’an passé en France, avec des sculptures gréco-romaines illustrant les pochettes de Gesaffelstein, jeune star de la techno devenu médiateur culturel sans le savoir. Ou comment, par l’intervention d’experts en communication, les cultures, mainstream un jour, underground le lendemain, se répondent et s’alimentent.

Le brandcontent sera relationnel ou ne sera pas

Ces mises en relation vertueuses sont autant d’opportunités pour les institutions culturelles de renouveler leurs publics que d’occasions pour les marques de fédérer des communautés fidèles.

Maintenant que l’art n’est plus sacré, que les marques ont perdu leur statut d’icônes, l’adhésion du public jeune implique la création et l’entretien d’une relation non plus verticale mais horizontale. Les consommateurs « friends » prennent le pouvoir dans une relation d’amitié équitable construite sans que personne ne soit dupe. Des règles telles que transparence, connivence, confiance et disponibilité permanente (« on demand ») assurent la pérennité de cette relation réciproque.

L’enjeu d’un brandcontent réinventé apparaît comme une évidence. Il s’agit d’inventer un nouvel entre-soi. Pour cela, le musée au même titre qu’une marque devra communiquer un système de valeurs clarifié et opérer une décentration vers un « écosystème individuel ». Exactement comme la discussion entre deux amis en terrasse va consister en un ping-pong permanent. Ces allers-retours conviviaux se concrétisent par la création de contenu complice à forte dimension affinitaire par la marque et par une intervention du consommateur lui-même, qui générera un contenu personnel.

Comment faire découvrir l’album de JayZ et le département antique du Metropolitan Museum à un adolescent ? Lors de son entraînement de foot ou sur Skyrock, où il gagnerait un voyage à New York pour aller photographier à son tour les mystérieuses statues de la pochette du rappeur, postées ensuite sur le wall Facebook d’une marque ou d’un musée. Car une bonne stratégie est celle qui met en musique au bon endroit, un dialogue généreux.

Sébastien Brocandel
Directeur de Création, agence Pschhh

(*)ceux qui sont nés avec Internet

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