11 janvier 2012

Temps de lecture : 3 min

L’hypothèse Marine Le Pen

Le dernier baromètre de l'institut de sondage en exclu pour Le Monde, Canal+ et France Info confirme l’adhésion et l’homogénéisation des idées du Front National aux yeux des français. Le bleu selon Marine est bel et bien «dédiabolisé»… Décryptage par Guénaëlle Gault, Directrice du Département Stratégies d’opinion TNS Sofres..

« Menace fantôme » pour les uns* , hypothèse « pas du tout farfelue » pour d’autres** , cette perspective – qui fait d’ailleurs l’objet d’une fiction romanesque!*** – apparait en tous cas envisageable pour une proportion non négligeable de Français qui, pour 36% s’y attendent et pour 26% le souhaitent**** .

Une adhésion en progression

Oui, le potentiel électoral de Marine Le Pen est élevé, stabilisé entre 15 et 20% des intentions de vote et plus près récemment du haut de cette fourchette. L’hypothèse de sa présence au second tour apparaît d’ailleurs d’autant moins fantasque qu’elle pourrait s’appuyer sur une « dédiabolisation » du Front National, pari de Marine Le Pen et pari en passe d’être réussi.

Comme le montre la dernière vague de notre baromètre FN publié ce jour, l’adhésion aux idées défendues par le parti de Marine Le Pen, progresse en effet dans l’opinion publique. 31% des Français nous disent aujourd’hui être tout à fait ou assez d’accord avec ces idées, soit 9 points de plus qu’il y a un an.

De surcroît cette adhésion progresse et s’homogénéise dans la population française, signe d’une capacité de conviction qui dépasse largement le strict camp des sympathisants frontistes et se diffuse au sein de l’ensemble de catégories sociodémographiques et des sensibilités politiques françaises.

Le thème social: caisse de résonnance

Cette dédiabolisation s’est faite pour beaucoup à la faveur d’une euphémisation du discours frontiste et de son déplacement sur le terrain social. Car, sur le fond, notre baromètre atteste aussi du fait que sur la sécurité ou l’immigration, les idées portées par le FN, connaissent, certes, un léger regain sur la toute dernière période mais sont tout de même loin de l’assentiment qu’elles recueillaient au début des années 2000.

En revanche, nul doute que les prises de position économiques de Marine Le Pen entrent aujourd’hui particulièrement en résonance avec des Français d’autant plus remontés contre la mondialisation qu’ils ressentent les difficultés concrètes de la crise. Rappelons-le au passage : 77% d’entre eux nous disent être d’accord avec le fait que chaque mois, on se demande comment on va faire pour tout payer dont 44% sont tout à fait d’accord… ils étaient 28% en juin 2010 !

Marine plus populaire que Jean-Marie

La personnalité de Marine Le Pen elle-même est également un déterminant essentiel de ces évolutions. Elle qui bénéficie dans les différents baromètres des instituts de sondage d’une popularité bien plus élevée que ne l’était celle de son père avec, de surcroît, une image très différente et bien plus consensuelle. Au total, 41% des Français la voient aujourd’hui comme la représentante d’une droite patriote attachée aux valeurs traditionnelles contre 45% qui la perçoivent plutôt comme la représentante d’une extrême droite nationaliste et xénophobe. Cette dernière opinion montait à 65% pour Jean-Marie Le Pen en 2006 ! Alors le FN : un parti comme un autre?

L’idée en tous cas progresse. 31% des Français estiment que c’est un parti qui a la capacité de participer à un gouvernement, soit + 6 points en un an, même s’il se trouve encore une majorité (57%) aux yeux de qui c’est seulement un parti qui a vocation à rassembler les votes d’opposition.

De la fébrilité face à la dédiabolisation !

Face à ce faisceau d’indicateurs, les autres candidats, de droite comme de gauche se demandent comment récupérer cette partie de l’électorat « tenté » avant qu’il ne soit trop tard. Et l’on voit, ne serait-ce que sur la forme, leur difficulté évidente… Petit débat intéressant car symptomatique dans le landernau politico-médiatique après que le quotidien Libération a titré cette semaine « 30% de Français n’excluraient pas de voter FN***** » . Un chiffre qui, comme cela a ensuite été abondement commenté, était atteint en additionnant les « oui certainement », « oui probablement » et les « non, probablement pas » à la question «Si l’élection avait lieu dimanche prochain, pourriez-vous voter pour Marine Le Pen ?».

La question posée n’était donc pas tout à fait la réponse affichée et l’auteure de ces lignes ne peut que déplorer cette entorse à la rigueur. Pour autant, c’est surtout l’ampleur et la virulence des commentaires qui auront frappé : entre déni, relativisme ou dramatisation, chacun a (sur)réagit sur le fait de savoir si les réponses « non, probablement pas » méritaient d’être incluses dans le «oui» ou dans le «non», débat qui n’aurait probablement jamais eu lieu pour tout autre candidat.

 Guénaëlle Gault / @laguirlande
Directrice du Département Stratégies d’opinion TNS Sofres

*Bruno Roger-Petit / Le point
**Benoit Hamon invité le 8 janvier au Grand-Jury RTL-Le Figaro-LCI
***Dominique Paillé, dans son roman Panique à L’Elysée, Grasset, 2011, décrit un second tour opposant Marine Le Pen et François Bayrou
****Baromètre d’image du Front National, TNS Sofres, France Info, Le Monde, Canal +, janvier 2012
*****Baromètre d’image du Front National, TNS Sofres, France Info, Le Monde, Canal +, janvier 2012
Libération, 9 janvier 2011

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