23 avril 2024

Temps de lecture : 5 min

Shiva se bat pour la dignité, lutte contre le travail non déclaré et fera cet été un nouveau « coup d’éclat », Catherine Malassingne

Le lien entre Harcourt et Shiva ? Une certaine Catherine Malassingne, directrice générale de la première enseigne destinée à mettre en relation employés de maison et particuliers ou entreprises. Un coup de génie qui a permis à cette marque de passer de l’ombre à la lumière et de créer un business florissant. Une personnalité hors-norme, qui pour payer ses études en littérature « faisait des ménages » à 17 ans. Dès lors, cette boss qui parle sans détours sera toujours « choisie » par ses employeurs. Shiva l’a chassée il y a sept ans. Résultat ? Elle y fait des étincelles en développant la marque, en communiquant ses convictions. Conversation à bâtons rompus.

INfluencia: vous racontez volontiers vos origines, et ce qui vous faisait avancer, toute jeune dans la vie…

Catherine Malassingne : oui, peut-être parce que je n’en reviens pas encore… Je suis née dans une famille très simple dans le nord de la France, d’une mère assistante sociale et d’un père militaire. Très vite, je sais que je veux devenir journaliste internationale, et j’entreprends des études de lettres et de philosophie. Je savais que mes parents ne pourraient pas me financer, j’ai donc, dès 17 ans fait le ménage chez Free time, qui n’existe plus d’ailleurs. Tous les matins entre 5 et 11 heures du matin, je nettoyais les sols du fastfood, sur 500 mètres carrés… Je ne m’en plains pas, j’adore accomplir ce type de tâches… À 19 ans, je deviens directrice d’un Free Time (racheté alors par Quick), puis on me propose de me former, ce que je fais. En parallèle, je poursuis mes études et passe le concours de sciences Po grâce au télé-enseignement. 

IN. : halte dans le prêt à porter… 

C.M. : exactement, je deviens directrice de Camaïeupuis directrice régionale de Sephora (Paris, Nord, Normandie), puis d’Orchestra. Ensuite, je prends la tête du réseau de franchises Afflelou. C’est en 2017 qu’un cabinet me  contacte pour me parler de Shiva, je rencontre Maxime Aiach, président fondateur de Domia Group, -qui réunit Acadomia, Shiva et nos aimés.Franchement, il me donne les clés de Shiva… Une histoire on s’en doute, de profils atypiques qui ont bouleversé les choses.

IN. : vous décidez de communiquer autour de la nécessaire légitimation d’un métier souffrant de stéréotypes, disons, tenaces. Une priorité ou un choix de votre part ?

C.M. : depuis sa création en 2002, Shiva place au cœur de ses préoccupations et de sa communication externe la lutte pour la légitimation du métier d’employé de maison. Aujourd’hui encore, en France, plus de la moitié des employés de maison travaillent au noir, sans aucune reconnaissance ni protection. Au-delà de ces protections, déclarer le métier c’est surtout lui apporter crédit et légitimité, là où beaucoup le considèrent encore comme un métier secondaire. De l’entretien du foyer, au soutien à l’allègement de la charge mentale, en passant par le soin aux personnes dépendantes,  les métiers de la prestation de services à domicile (dont Shiva fait partie) sont non seulement un pilier incontestable du confort et de la santé des Français mais aussi un atout de poids dans l’économie nationale puisqu’il représente le 7ème marché en matière d’emploi. 

 

 IN. : sensibiliser l’opinion publique à la reconnaissance d’une profession dénigrée c’est ce qui fait décoller l’image et les candidats en 2022, lorsque vous lancez la campagne avec… Harcourt. Comment cela vous est venu à l’esprit ?

C.M. :  quelle maison mieux que Harcourt pour sublimer l’image de ce métier très mal vu encore aujourd’hui et dévalorisé… Cette série de  portraits en noir et blanc, je l’ai voulue, je l’ai portée. Quand je songe au nombre de personnes auxquelles elle a donné envie de nous rejoindre, plus de 20000 candidats se sont présentés, et à la lumière qu’elle a mis sur Shiva, j’avoue je suis assez fière. D’ailleurs, je ne sais pas si vous avez vu, mais nous avons été récompensés au Top/Com pour l’acte 2 de cette opération qui lutte contre le travail non déclaré pour son acte II.

IN. : acte II toujours en collaboration avec Harcourt en 2023…

C.M. : en effet, à l’été 2023, le groupe choisit de passer à la vitesse supérieure et de placer au cœur de sa nouvelle campagne la lutte contre le travail non déclaré. Les employés de maison Shiva « passent de l’ombre à la lumière », posent pour « sortir leur métier des clichés », « prennent la lumière pour faire briller leur métier », etc. C’est extrêmement bénéfique pour la marque mais surtout pour toutes ces personnes avec lesquelles nous travaillons au quotidien.

En 2022, Shiva et Harcourt créent une série de portraits en noir et blanc avec pour accroches “balayer les préjugés » et « dépoussiérer l’image du métier ».

 

 

IN. : vous préparez un troisième acte à cette campagne qui a cartonné, quel sera le nouveau message ?

C.M. : L’acte III de la campagne est en cours de conception. Cette fois, il s’agira de faire « un coup d’éclat », mais je ne peux pas tout vous révéler aujourd’hui. Disons que nous poursuivons ce travail en mettant encore plus de couleur et l’accent sur ce qui fait avancer le monde. Redonner du sens aux destins des jeunes, car plus que jamais, ils ont besoin de reconnaissance, mais pas seulement.  Il y avait 2% d’hommes parmi nos employés avant la campagne Harcourt. Aujourd’hui, ils représentent 20%. Tho, l’homme qui apparaît dans les deux séries y est pour beaucoup. Les mots qu’il porte, « je balaye les préjugés » et « je pose pour sortir mon métier des clichés »  a fait beaucoup pour les hommes. On y désacralise l’aspect esclavagiste que porte ce métier. Le respect est au coeur de nos messages, pour les employés et les employeurs. Il s’agit aussi de mieux rémunérer ce métier qui est indispensable et n’a rien de dégradant malgré les idées reçues. Nous avons d’ailleurs constaté que des aides soignantes ou des enseignants ont quitté leurs jobs pour rejoindre Shiva. Enfin, des personnes à la retraite arrondissent aussi leurs fins de mois en travaillant pour nous.

 

IN. : quelles qualités et talents faut-il pour devenir « Shiva » ? et quel regard portez-vous sur ceux qui vous rejoignent ?

C.M. : on n’apprend pas aux gens à faire le ménage. Les jeunes filles encore aujourd’hui savent très bien faire, car on leur a appris toutes petites (sourire entendu). Je ne me fais pas d’idées, j’ai eu moi aussi des préjugés sur ce métier et ceux qui le faisaient. Mais cela se soigne (rires). Quand vous êtes de l’autre côté, savoir que vous sauvez des femmes à des moments clés de leur vie, c’est un sentiment incroyable. L’humain est tellement important, précieux et fragile. En clair, les employeurs ont peur des autodidactes, des personnes qui sont différentes… Cela persiste. Mais ce qui est génial avec cette campagne, c’est l’effet de levier qu’elle a eu.

 

IN. : quid du travail au noir ? Avez-vous aussi le sentiment de jouer un rôle contre ce phénomène ?

C.M. : je me bats contre, mais il faut comprendre aussi pourquoi il y a du travail au noir. Pour un employeur, avancer 30 euros et s’en faire rembourser une partie à la fin de l’année c’est un peu abstrait, certains préfèrent donner 15 euros au black, comme s’il s’agissait d’un pourboire, d’argent de poche… La difficulté, c’est de se battre contre l’idée de l’esclavage qui n’est jamais bien loin, la peur de la pauvreté contagieuse. Par ailleurs, en France, notre modèle social a beau être magnifique, cela n’empêche pas certaines personnes de continuer à être au chômage tout en travaillant au noir afin de compléter sans y toucher, ce chômage… Maintenant, il faut admettre depuis que l’accroche de la campagne, « déclaré c’est être protégé », il y a des employés qui comprennent que la protection n’a pas de prix.

 

IN. : vous êtes beaucoup sur le terrain ?

C.M. : oui, c’est sûr. J’ai créé un prix de l’excellence car je sais qu’avec le succès que nous a procuré cette campagne, on peut facilement se reposer sur ses lauriers, donc je suis très exigeante. Je suis passionnée par les gens, tout le monde parle d’immigration, et si mon discours est simpliste, il s’agit de donner un emploi à ≈≈≈, même si c’est simpliste. Cette campagne a vraiment joué sur les mentalités, la mission est belle.

 

IN. : combien de temps restons-nous employé de maison Shiva ?

C.M. : entre trois ans et 7, 8, 9 ans. Quand le client passe chez nous six mois, il est acquis à notre cause. Les six premiers mois sont très fragiles. Ensuite, c’est gagné.

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