27 février 2024

Temps de lecture : 4 min

Damien Bettinelli (Les Others Studio) : « le luxe doit faire corps avec l’outdoor ».

Malins, malins, Les Others Studio… L’agence créative, et media spécialisé dans l’outdoor, le voyage et la nature, s’intéresse au luxe… Quel est le rapport entre ce dernier et la nature, direz-vous? C’est que le luxe change de « champ », abandonne le faste, l’opulence et le clinquant pour s’allier les richesses de la planète au moment où il est de bon ton de la fêter, pardi.  Damien Bettinelli, co-fondateur de Les Others Studio publie Le livre blanc Outdoor calling qu’il décrypte ici.

INfluencia: rappelez-nous l’histoire de Les Others…

Damien Bettinelli : l’entreprise nait en 2015, avec la création d’un premier magazine papier consacré à des sujets exclusivement liés au voyage et en particulier à l’aventure, au travers des sports tels que la randonnée, le running, ou le surf. Les activités outdoor sont au cœur de notre concept. À partir de 2016, nous avons développé une activité agence, conseil, création. Aujourd’hui, nous sommes quinze et les deux activités s’équilibrent, représentant chacune 50% du chiffre d’affaires.

IN. : quelle est votre cible, a-t-elle évolué au fur et à mesure, notamment face aux problématiques écologiques qui se sont imposées ?

D.B. : certainement. Au départ, Les Others s’adressait à une cible de spécialistes de l’outdoor. Aujourd’hui, notre média s’adresse en priorité à la tranche d’âge 25-35 ans. Lorsque le mag est né, il n’y avait aucune offre média qui parlait de ces sujets auprès de cette génération et donc c’est comme cela que nous nous sommes distingués et qu’on s’est développé progressivement autour des problèmes climatiques et de l’écologie. La covid, a constitué pour nous, un effet de levier.

Une étude Klarna en 2022 analyse que lorsqu’il doit choisir entre deux marques, 78% des millenials et 82 % de la génération Z préfèrent celles qui portent un combat de l’ordre de l’engagement environnemental, notamment.

Parce qu’à l’issue de la pandémie, ceux qui avaient été entravés, enfermés chez eux, se sont davantage intéressés aux destinations de pleine nature. Des destinations proches, autour de nous. La France est particulièrement favorable à notre media et à l’écologie dans la mesure où il est facile de prendre un train puis de se retrouver dans les Alpes, dans les Pyrénées ou à l’étranger.

IN. : aujourd’hui vous lancez cette étude sur le luxe et l’outdoor. La nature.

D.B. : en fait, il s’agit d’un livre blanc, centré sur les activités outdoor et nature. Une diversification désirée d’offre BtoB pour compléter notre offre media et aller plus loin sur ce secteur qui connait une grande évolution en termes de communication, d’une part, et en termes de nouveaux venus, avec de marques sportives très « luxe », techniques, par exemple, telles que Salomon, The North Face, Le Coq Sportif…

pourquoi finalement les marques de luxe, plutôt associés à l’idée de palace, ostentatoires, clinquantes sont aujourd’hui obligées de se reconnecter à la nature

IN. : diriez-vous que peu à peu votre media et vos clients agence se sont « rencontrés » ?

D.B. : c’est exactement cela. Une conjonction entre le luxe et son besoin de fondements nature, des clients dont la technicité sont haut de gamme, et la nature qui est venue naturellement sceller les deux premiers points.

IN. : quels sont ces clients ?

D.B. : il peut s’agir de marques qui se trouvent dans le giron LVMH, de spiritueux, des parfums. Le voyage, l’outdoor, la nature sont des imaginaires qui parlent aussi à ces marques, d’où ce livre blanc réalisé pour comprendre pourquoi finalement les marques de luxe, plutôt associés à l’idée de palaces ostentatoires, sont aujourd’hui obligées de se reconnecter à la nature, sachant que le luxe aujourd’hui n’est pas le même pour tous. La déconnexion est un luxe. Être dans une cabane au milieu des arbres est un luxe. La nature, devient elle aussi… un luxe. Les expériences déconnectées en pleine nature au calme, à l’air pur.

 

IN. : vous intéressez-vous à l’offre produit des marques de luxe dans ce livre blanc ?

D.B. : nous ne nous intéressons pas aux offres produit mais plutôt aux symboles, au poids culturel et donc à la partie communication et au message qui sont portés par ces marques, et aujourd’hui elles ont tendance à réorienter leur discours pour aller vers un univers orienté vers la reconnexion avec la nature. Quant à l’offre, évolue-t-elle ? Traditionnellement Hermès en est depuis toujours, pour citer cet exemple, mais il y a de nouvelles marques qui font leur entrée dans le champ du luxe avec des produits qui n’étaient pas fondamentalement reliés au luxe. Salomon par exemple qui est une marque hyper-technique monte maintenant sur les podiums de la Fashion Week portée par des influenceurs. Pour ne citer qu’elle.

IN. : quelles conclusions ressortent de cette enquête, analyse de tendances ?

D.B. : nous avons identifié des types de discours empruntés par les marques de luxe pour prendre la parole sur les sujets liés à la nature. Il y a celles qui parlent de la protection de la nature, celles qui évoquent la nature sous le prisme de la nature magique, -Louis Vuitton qui en ouvrant ses malles nous emmène dans un monde imaginaire-.

 

Audemars Piguet née en 1875 au Brassus, un village inscrit au cœur de la Vallée de Joux dans le Jura Suisse, qui devient un territoire magique en 2023.

 

Les quatre axes qu’on a imaginés sont : la nature cocon, un territoire refuge, le deuxième, c’est la nature sauvage un terrain d’expression nouveau . Le troisième évidemment, c’est la nature fragilisée, un terrain un jardin à protéger. Et enfin le quatrième axe dont je vous parlais tout à l’heure la nature magique, un monde fantasmé

IN. : vous évoquez aussi un point important de reconnexion par le biais de la culture ?

D.B. : tous au global et notamment les citadins ont émis le besoin de se reconnecter à la nature mais comment? C’est une vraie question. Doit-on le faire de façon très pratique, comme on l’a vu avec la ruée vers les achats de biens immobiliers ou souhaits d’achat immobilier motivés par la covid ? Ou au travers de lectures, car les ouvrages dont la nature est la préoccupation centrale, est un vecteur important. Une chose est sûre, le mouvement culturel est profond, et c’est lui qui peu à peu entre dans les foyers…

Les productions, livres récompensés, peintures exposées, les documentaires… La production autour de ces thématiques est immense, et elle est en pleine explosion. Les enjeux écologiques arrivent au premier plan, ils ne peuvent donc plus être ignorés. Ni par les marques ni par leurs clients.

IN. : toutes les générations sont-elles sensibles au même discours ?

D.B. : cette volonté est assez générale quelles que soient les tranches d’âge. Je pense que les sujets ayant trait à l’écologie sont moins partagés par les plus âgés, alors qu’ils sont incontournables pour la jeune génération… On le voit notamment avec le succès de marques qui ne sont pas forcément issus du monde du luxe mais plutôt dans le milieu Oudoor, comme Patagonia, Veja qui font rêver tout le monde. Leur succès est largement dû, au-delà de leurs produits, à leur essence, à leur philosophie.

Défilé Jaquemus

En résumé

Le luxe n’est pas seulement une marque extérieure de richesse, désormais il est aussi et surtout une philosophie, un parti-pris, une manière de vivre en accord avec soi. Nul doute que le parfum One Million de Paco Rabanne s’adresse encore et toujours à des clients dont l’ambition est d’exprimer par leur odeur ces millions qu’ils possèdent ou pas. Mais une chose est sûre, le luxe est désormais aussi, un état d’esprit qui n’a pas de « prix ». Alors, ce dernier accueille en son sein des marques écologiques, techniques, naturelles qui disent elles aussi le luxe, mais sans le bling bling qui va avec. « Si à 50 ans, t’as pas une paire de Veja, c’est que tu as raté ta vie« .

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