INfluencia : Votre coup de cœur ?
Constance Benqué : Mon coup de cœur est inévitablement un livre, car je lis énormément et je suis insomniaque. Il s’agit de « Ma mère, Dieu et Sylvie Vartan ». Ce livre a été écrit par un de mes amis, Roland Perez, avocat et chroniqueur à Europe 1. Ken Scott vient d’en faire un film. C’est l’histoire de la vie de Roland, mais aussi celle de sa mère, incarnée par Leila Bekhti, qui est extraordinaire dans ce rôle.
Sa mère était merveilleuse, pleine d’amour, bien que parfois surprotectrice, possessive et envahissante. Une mère juive, certes, mais avant tout une mère. Roland Perez est né avec un pied bot, et les médecins étaient formels : il ne marcherait jamais. Sa mère l’a sauvé en allant voir un rebouteux. Il a passé 18 mois allongé sans bouger, à écouter Sylvie Vartan. Ses frères et sœurs en avaient assez, mais il était hors de question d’écouter autre chose : la chanteuse faisait partie du remède !
Le silence de la communauté internationale face à la situation des femmes afghanes est assourdissant
IN. : Et votre coup de colère ?
C.B. : Je ne peux pas rester silencieuse face à la situation des femmes afghanes. C’est un véritable apartheid. On cherche à effacer 28 millions de femmes. Elles n’ont plus aucun droit, si ce n’est celui d’être lapidées. Cela me touche profondément. On leur interdit même de se parler entre elles ! De plus, j’ai récemment lu un article expliquant que dans ce pays, 1,6 million d’enfants de 0 à 14 ans travaillent et 40 % ne sont pas scolarisés. Évidemment, les petites filles n’ont pas accès à l’éducation, alors que celle-ci est la base de la vie. Le silence de la communauté internationale est assourdissant. Cela devrait être une cause mondiale. La presse publie des articles, elle écrit régulièrement sur le sujet, mais on se contente de constater sans agir.
Je ne sais pas si on peut parler de coup de colère, mais la disparition d’Emilie Dequenne est tellement injuste. Mourir si jeune ! J’avais déjeuné avec elle à Cannes il y a un an lors d’un déjeuner organisé par Match et c’était une femme lumineuse et courageuse, qui parlait de son cancer sans détours. J’aime cette phrase d’Epicure : « La condition du bonheur, c’est la santé ».
IN. : L’évènement qui vous a le plus marquée dans votre vie ?
C.B. : Indiscutablement, c’est la naissance de mes filles. C’est un cadeau de la vie. Je sais qu’il ne faut pas parler ici de la famille, mais j’ai découvert un lien différent de celui qu’on a avec ses parents : la force de ce lien, la remise en cause de soi-même, l’amour inconditionnel et la joie. Mes filles ne me font pas toujours de cadeaux, mais elles me font rire – je suis quelqu’un de très gai et j’aime beaucoup rire – elles sont généreuses et m’ont probablement apporté une douceur que je n’avais pas, car je suis fille unique et que j’avais un père qui voulait absolument avoir des fils. Ce statut d’enfant unique m’a toujours pesé énormément, et quand j’ai eu une fille, je n’ai eu de cesse d’avoir un deuxième enfant.
Un autre événement m’a beaucoup marquée : la découverte d’une tumeur au poumon il y a quelques mois. Je n’ai pas caché ma maladie. Je ne me suis pas absentée pendant un mois et demi en disant que je partais en vacances, et je n’ai pas non plus fait de communiqué de presse pour le clamer sur tous les toits. La bienveillance et la gentillesse des gens au bureau m’ont beaucoup touchée, qu’il s’agisse de mes bosses ou de mes collaborateurs.
Je suis assez fascinée par l’univers médical, cela me rassure. Je voudrais rendre hommage à cette femme remarquable, le professeur Françoise Le Pimpec-Barthes, cheffe de la chirurgie thoracique à Pompidou qui m’a opérée, ainsi qu’au personnel soignant extraordinaire de l’hôpital.
IN. : Votre rêve d’enfant ou si c’était à refaire
C.B. : Mon rêve de jeune fille, qui m’a conduite à étudier le droit pénal, était de devenir commissaire de police. J’aime la police, depuis le ministère de l’Intérieur jusqu’au commissariat de quartier. J’aime les flics, l’ambiance des commissariats, les histoires policières et l’adrénaline qui va avec. Finalement, je me suis orientée différemment : droit public et Sciences Po. Mais ma passion reste intacte. Je lis énormément de livres sur le sujet et de romans policiers, et je regarde des séries, qu’elles soient françaises, israéliennes ou américaines. Avec le temps et l’évolution de la police, j’aurais plutôt aimé être profileuse, un métier qui allie le factuel à la psychologie.
Ma plus grande réussite à ce moment de ma vie est de me sentir libre et apaisée
IN. : Votre plus grande réussite ? (pas professionnelle)
C.B. : C’est compliqué car je suis éclectique. J’aime les gens et fédérer autour de moi, que ce soit mes équipes, mes amis ou ma famille. J’adore organiser des vacances avec eux. J’ai une grande passion pour les voyages – je suis d’ailleurs administratrice de Voyageurs du Monde – et je suis très maniaque. J’ai un petit livre dans lequel je répertorie les bonnes chambres dans tous les hôtels du monde, petits ou grands.
Mais il y a une activité dont je suis très fière : la boxe. Depuis quinze ans, quoi qu’il arrive, je m’entraîne une à deux fois par semaine dans une salle. Je ne pensais pas en être capable. C’est une vraie réussite, car il faut trouver le temps. Nous sommes quatre, dont un publicitaire et deux rugbymen, avec un professeur extraordinaire, le boxeur Jean-Paul Mendy. C’est Rachida Dati qui m’y a emmenée pour la première fois. Elle m’a fait un superbe cadeau. La boxe me fait un bien énorme. Elle m’a aidée à développer un mental d’acier. Quand ça ne va pas, j’y vais trois fois par semaine.
De façon plus profonde, ma plus grande réussite à ce moment de ma vie est de me sentir libre et apaisée, tout en essayant de faire le bien autour de moi.
J’aurais mieux fait la cuisine et écrit avec plus de facilité et plus de brio, j’aurais été une femme totalement accomplie
IN. : Votre plus grand échec ? (idem)
C.B. : J’ai deux échecs notables. J’adore la bonne table, mais je suis très mauvaise en cuisine. Je manque probablement de patience, ce qui fait que mon goût pour la bonne chair, les bons vins et les bons restaurants est inversement proportionnel à mes talents de cuisinière.
Mon deuxième échec est de ne pas exceller dans une discipline artistique. Je trouve que je n’écris pas à la hauteur de mon amour pour les mots, la littérature et l’écriture. Je suis fascinée par les journalistes ou certaines personnes de mes équipes qui rédigent remarquablement bien, alors que pour moi, c’est un travail de Titan. Peut-être que, contrairement aux apparences, je ne suis pas aussi sûre de moi que j’en ai l’air, mais j’aurais vraiment aimé mieux écrire. J’aurais mieux fait la cuisine et écrit avec plus de facilité et plus de brio, j’aurais été une femme totalement accomplie (rires).
S’apaiser, respirer, regarder le beau, profiter de chaque instant, avoir confiance en soi.
IN. : Que diriez-vous aujourd’hui à la petite fille de 10 ans que vous étiez ?
C.B. : D’abord, je l’aime bien maintenant cette petite fille, ce qui n’a pas toujours été le cas. Elle connaissait beaucoup de peurs à l’époque. Je lui dirais de s’apaiser, de respirer, de regarder le beau, de profiter de chaque instant, d’avoir confiance en soi. Je lui dirais aussi que tout passe.
J’ai fait un « répondre à tous » en imitant l’accent allemand à la façon « Papy fait de la résistance »
IN. : Votre plus grand moment de solitude
C.B. : J’en ai deux. Le premier est un trajet en voiture avec Jean-Pierre Elkabbach au volant. Pendant tout le trajet, il parlait en me regardant sans jamais regarder la route. Il se garait n’importe comment et emboutissait les voitures… J’ai vraiment eu des peurs terribles.
J’ai connu un autre grand moment de solitude, encore pire. À l’époque, je dirigeais la régie de Lagardère et nous étions en compétition pour le budget d’Arte. Nous avions rendez-vous à Strasbourg avec le patron de l’époque de la chaîne, qui m’avait envoyé un mail, ainsi qu’à mes équipes, me disant qu’il m’attendait. J’ai fait un « répondre à tous » en imitant l’accent allemand à la façon « Papy fait de la résistance » : « Ach zo, zo, on va bien z’amuser ». Et là, le président me répond du tac au tac : « Oui, on va bien s’amuser ». J’étais pétrifiée devant mon ordinateur. Mais il a été très élégant et, en plus, nous avons gagné le budget…
IN. : Quelle personne emmèneriez-vous sur une île déserte ?
C.B. : Churchill pour les bons mots et la culture. Je le laisserais parler et puis je boirais ensuite un verre de gin tonic avec lui.
Et sinon, j’emmènerais mon copain Christian Clavier parce je mets l’humour et le deuxième degré au centre de tout. Il est très fin et cultivé, et aime parler de tout. Je lui dirais de venir avec sa femme que j’aime beaucoup. Elle est costumière et fait très bien la cuisine. Atouts indispensables sur une île déserte.
* l’Hôtel Littéraire Le Swann, situé au cœur du quartier historiquement proustien de la plaine Monceau et de Saint- Augustin, présente une collection d’œuvres originales sur l’écrivain ainsi que des pièces de haute couture, des photographies, des tableaux, des sculptures. Notre interviewé(e) pose à côté d’une sculpture de Pascale Loisel représentant bien sûr l’auteur d’« À la recherche du temps perdu ».
En savoir plus
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- Constance Benqué a été nommée en avril présidente de l’Alliance de la Radio
- Europe 1, poursuit sa remontée en gagnant 269.000 auditeurs en un an, soit 2,7 millions au total selon le dernier sondage Médiamétrie publié en avril (5,1% de Part d’Audience)
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- Lancement du supplément féminin grand public du Journal du dimanche, JDMag en mars 2025
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- Elle International, qui représente un réseau de 50 éditions, célèbre cette année les 80 ans de la marque Elle France ainsi que les 40 ans du Elle US et du Elle UK. Au cours du 1er semestre 2025, plusieurs lancements sont prévus : Elle Gourmet en Inde, Elle Gourmet au Middle East et Elle Men en Malaisie. La marque présentera très prochainement un projet allié à une œuvre caritative, autour des « femmes dans l’art » mettant en avant des femmes artistes de tous les continents et de toutes générations.
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- Elle International s’appuie, également, sur une activité de diversification très dynamique (Prêt-à-porter, décoration, hospitality, cosmétiques…). L’activité « hospitality » accélère son développement à travers le monde avec 2 « Maison ELLE » boutiques-hôtels (Paris et Amsterdam), un projet immobilier important dont une première résidence de 180 appartements à Miami- quartier Edgewater- livrable en 2027, et d’autres qui vont bientôt être annoncées pour des ouvertures en 2026, 2027 et 2028, dans des destinations iconiques. Sans oublier les cafés Elle ouverts bientôt à Tokyo et New Delhi ou encore un ELLE Spa implanté à Tokyo en 2025 …
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- En ce qui concerne le Retail, le développement se poursuit en Chine sur le segment du prêt-à-porter féminin, avec 5 nouvelles boutiques, dont un flagship store à Guangzhou.