20 septembre 2021

Temps de lecture : 4 min

Le lancement de l’iphone 13 analysé par Bruno Aveillan

Joint par INfluencia afin d’en savoir plus sur la nouvelle campagne iphone 13, Nicolas Bordas (Vice Président International TBWA\Worldwide) a été clair : « l’agence TBWA/Media Arts Lab a interdiction de communiquer sur son client. La France est logée à la même enseigne ». Boum. INfluencia vous propose donc, de découvrir ces films signés «Hollywood in your pocket ». Une ode aux blockbusters américains. Le rêve américain à portée de main pour tous les utilisateurs de smartphones? Pas vraiment, comme l’explique le réalisateur Bruno Aveillan, artiste multiple mais aussi homme de marketing, comme le montre son parcours.

Bruno Aveillan

Le iPhone 13 est en orbite depuis trois jours. 13 comme vendredi « porte-bonheur ?», 13 comme la BD (XIII) ? série culte belge dessinée par William Vance sur un scénario de Jean Van Hamme. 13 comme vendre un nouveau modèle de iPhone qui ne porte aucune amélioration technologique quant à son utilisation première, celle d’interagir avec le monde entier, d’être dans le iworld sans bouger de son Chesterfield défoncé de fatigue… Mais qui s’empare du cinéma comme s’il était sien. Alors Apple et son agence TBWA/Media Arts Lab s’attachent à conquérir la planète, en propageant l’addiction dont nous sommes déjà les victimes, l’image, l’univers du cinéma, son écran augmenté, sa meilleure définition photographique.

 

 

Mais si Apple excelle en matière de marketing, faisant passer le message selon lequel, « tous les amateurs peuvent faire du cinéma avec le dernier iphone », la marque culte n’est pas pour autant dupe de la difficulté de filmer, « même avec un simple iphone 13 ». En effet, explique Guillaume Perez, réalisateur chez Téléparis, «ce n’est pas le marteau qui fait l’oeuvre, c’est celui qui le tient. Sous entendu : ce n’est pas parce que vous aurez cet iphone que vous deviendrez cinéaste ». Et c’est ce message aussi que fait passer Apple avec ces films spectaculaires, aux images impressionnantes de qualité. «Des images qui donnent à voir des équipes techniques, des plateaux, des sets, des scènes extérieures, afin que le propos ne soit pas déformé ». La réalisatrice oscarisée pour Démineurs en 2010, Kathryn Bigelow en témoigne dans l’un des spots. Pour elle,  «c’est une expérience intéressante, qui ne change pas son cinéma ». La marque à la pomme ne tue donc pas le 7ème art comme certains le prétendent, mais fait rêver le quidam dont le smartphone n’est jamais loin. Tout comme le fait son concurrrent Samsung,  qui ne manque jamais une occasion de piquer Apple sur Twitter. Cette série de films a été produite par Smuggler.

 

 

Pour évoquer cette main mise de l’iphone 13 sur le Septième art, INfluencia interroge le réalisateur le plus à même de donner son point de vue d’artiste, de technicien, mais aussi d’homme de marketing, Bruno Aveillan, l’enchanteur.

INfluencia: que pensez vous de la posture de iphone 13 qui s’empare de cinéma pour séduire les consommateurs?

Bruno Aveillan: d’un point de vue technologique, je sais que ce nouvel appareil, bénéficie de plusieurs nouveautés qui donnent sans doute l’occasion à un plus grand nombre d’utilisateurs de jouer sur la profondeur de champ, une avancée majeure, qui fait la différence, qui permet de faire le point sur son sujet. En revanche, je ne pense pas que les utilisateurs d’iphone aient pour objectif de faire des films comme nous l’entendons… D’une part parce qu’il existe bon nombre d’outils sur Internet gratuits qui offrent des effets, des astuces, des filtres qui permettent d’obtenir des formats originaux. La multi-accessibilité, la facilité d’accès à la création, est formidable mais il n’y aura pas plus de génies du septième art parce que le iphone 13 démocratise « le cinéma ».

IN. : pourquoi alors jouer sur cette corde sensible, la créativité qui se niche en chacun de nous, la facilité, la technologie à portée de tous?

B.A. : de manière très pragmatique, je dirais qu’Apple n’a pas aujourd’hui de nouveautés à présenter sur le concept même originel de cet outil, et qu’il faut faire rêver les gens, maintenir leur attachement…. Après deux ans de pandémie, où tout un chacun s’est exprimé par l’image sur les réseaux sociaux, où beaucoup sont parvenus à faire de leur vie « une oeuvre » quelle que soit sa qualité, cela a libéré les égos de la technicité justement. Par ailleurs, les plateformes telles que Netflix ont occupé et diverti le monde entier. Le cinéma, les séries, la fiction en général est devenu un mode de survie, voilà pourquoi à mon sens, c’était le moment ou jamais pour Apple d’enfoncer ce clou et de buzzer sur le cinéma.

IN. : ces spots explicitent le métier de cinéaste, « comme si nous en étions nous aussi capables », mais mettent aussi en avant un set, où tous les techniciens sont présents, preuve qu’un iphone 13 ne suffit pas… Pourquoi?

 

B.A. : parce que si l’iphone remplace le cinéma, alors ils vont se fâcher avec toute une profession. La stratégie selon moi est de ne pas se mettre à dos les plateformes qui produisent à tout va en diffusant sur toutes tailles d’écran, tout en faisant croire à tout un chacun qu’il a la possibilité de faire sont « petit cinéma »… Et de fait, si l’iphone ne fait pas émerger des artistes, il a en revanche déjà influé sur la manière de filmer actuelle, en pub notamment, et sur certains longs-métrages.

IN. : c’est à dire…

B.A. : j’ai remarqué que l’utilisation de ce petit appareil avait énormément influé sur la manière dont on s’approprie l’image, plus proche de soi, plus intime peut-être, dans les clips vidéo, où l’on ne dispose souvent que de peu de budget, on voit de nouvelles images avec des mouvements qui vont en tous sens, qui utilisent de grands angles, des caméras qui bougent.  L’appropriation de sa petite taille, a réellement contribué à changer de regard. C’est un style filmique qui agit comme du copié-collé d’une pub à l’autre, notamment dans les saynètes « style de vie », où le réalisateur ne se pose pas de question sur le cadre, qui n’est plus un sujet, par exemple.

IN. : avez-vous déjà tenté l’expérience de réaliser à l’iphone?

B.A. : je me sers de mon iphone pour faire les repérages, pour capter des chorégraphies, ou des cascades, c’est évidemment très pratique et instructif, facile à la vérification, utile pour modifier tout ce que l’on veut. En revanche je n’ai pas tenté l’expérience de réaliser. Je pourrais, s’il y avait une demande, comme celle qui a été faite à d’autres, comme Michel Gondry ou Kathryn Bigelow. On ne peut pas combattre bêtement les avancées technologiques, en mettant le pied au plancher. Si vous regardez aujourd’hui, un film réalisé avec une caméra 16 millimètres, vous voyez bien que l’on a basculé dans une nouvelle ère, que le cinéma évolue en fonction de la technologie. Il est toujours intéressant de tenter ce qui va améliorer la qualité des images, de cadrer, de trouver la belle lumière. Ensuite à chacun de trouver son chemin. Mais la course à la définition n’occultera pas la quête de l’émotion, la qualité esthétique, le langage qui font un film de cinéma.

 

 

 

 

 

En résumé

Partenaires particuliers de l’iphone

C’est désormais une tradition pour Apple, de baser la com de ses iphone sur le nom de réalisateurs qui se prêtent au jeu du marketing savant de la marque de Steve Jobs.

 

Sean Baker s’était prêté à l’exercice avec Tangerine en 2015. Un film qui présenté au festival de Sundance avait reçu un accueil enthousiaste. Le jeune réalisateur était armé de trois iphone 5s équipés de lentilles anamorphiques. Un street movie sur une Cendrillon moderne à la recherche de sa rivale dans les rues de Los Angeles.

Michel Gondry réalisait un court métrage avec l’iphone 7 (2017), Détour. Ce fou de bricolage et de débrouille racontait ici l’histoire d’un tricycle perdu sur la route des vacances, à la poursuite de ses propriétaires… qui l’avaient abandonné…

Dernier en date, Steven Soderbergh, qui utilisait quant à lui  l’iphone 8 (présenté sur Netflix un 8 février de 2018)High Flying Bird, doc sur le basket passionnant avec au casting André Holland, Kyle MacLachlan, Zazie Beeetz. Il avait auparavant réalisé le thriller, Paranoïa avec un budget «ridicule»  de 1,2 million de dollars, trois appareils 7+ cette fois, équipés d’un capteur photo 4K afin de permettre la projection sur un écran géant.

Vous l’aurez compris, un seul Iphone13 ne peut rien pour le cinéma. « Si l’on lit les mentions légales sur ces films,  il est bien explicité que ce dernier est tourné grâce à un matériel spécifique et des applications qui upgradent la qualité des images », conclut Guillaume Perez.

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