La défiance envers les marques explose : pourquoi les consommateurs ne vous croient plus (et comment inverser la tendance)
Entre montée du deinfluencing, essor des communautés semi-fermées et poids croissant des avis clients, les marques doivent repenser leur communication. Décryptage.
Vous pensez que votre marque est appréciée par les consommateurs ? Vous pensez que vos messages sont lus comme des paroles d’évangiles par vos clients ? Vous êtes persuadés entretenir des liens privilégiés avec vos cibles ? Désolé de vous décevoir mais vous avez tout faux. Se bercer de douces illusions est rarement une bonne idée dans le monde du business.
Dans son rapport intitulé « State of Social 2026 », Brandwatch a analysé pas moins de 900 millions de conversations sociales. Le verdict de leur étude est sans appel : la défiance envers les marques n’a jamais été aussi forte. Plus de la moitié(54%) des discussions sur la publicité expriment de la colère. Cette réaction n’est pas dénuée de bon sens.
Des fake news par millions
Une toute récente étude menée par Science Feedback montre qu’une publication sur cinq sur TikTok véhicule des informations trompeuses. Ce taux grimpe à près d’un tiers sur X, si l’on ajoute les contenus abusifs ou borderline. À l’opposé, LinkedIn prouve qu’un autre modèle est possible, avec seulement 2 % de désinformation sur les sujets d’intérêt public.
L’enquête de Brandwatch affirme, par ailleurs, que les mentions de « deinfluencing » ont bondi de 79% en un an. Ce phénomène encourage à ne pas acheter plutôt qu’à consommer.
D’abord né sur TikTok avant de rapidement s’étendre à d’autres plateformes comme Instagram ou YouTube, ce mouvement a pris de l’ampleur depuis 2023, en réaction à la surabondance de recommandations sponsorisées sur les réseaux sociaux.
À l’opposé de l’influence traditionnelle, où l’accent est mis sur le « must have », les « deinfluenceurs » promeuvent l’authenticité, la modération, et une consommation plus consciente. Ce changement s’explique en partie par une saturation des messages publicitaires.
Beaucoup d’internautes se sont en effet lassés fatigués des partenariats sponsorisés, des « hauls » et des recommandations constantes. Dans un contexte de crise économique et d’inquiétude écologique, le deinfluencing répond à des préoccupations financières.
Éviter les achats inutiles permet de réduire le gaspillage et de combattre la surconsommation. Le hashtag #deinfluencing cumule aujourd’hui plus d’un milliard de vues sur TikTok, ce qui témoigne d’un intérêt réel et durable. Les créateurs de contenus cherchent à profiter de ce « filon ».
Les conversations d’influenceurs liées à « l’authenticité » ont en effet explosé de 66% en un an, selon Brandwatch.
Une défiance structurelle et non plus conjoncturelle
Les particuliers ne semblent plus aujourd’hui vouloir lire les messages officiels des marques. Sur X, moins de 1% des conversations sont initiées par les entreprises elles-mêmes. Ce chiffre prouve clairement une chose : les marques ne contrôlent plus totalement la narration.
Ce phénomène n’est pas né du jour au lendemain. « Cette défiance est désormais structurelle et non plus conjoncturelle », nous explique Jérôme Hiquet, le CEO du cabinet de conseil en stratégie digitale StratNXT. Les consommateurs ne prennent plus pour argent comptant les messages des marques. Leurs déceptions expliquent en partie leurs défiance mais un autre élément a encore accentué cette tendance.
« Les problématiques liées au pouvoir d’achat encouragent les gens à être beaucoup plus sensibles au rapport qualité-prix des produits et des services qu’ils recherchent. Beaucoup sont entrés dans une logique de vérité mosaïque et non plus verticale comme dans le passé. Ils ont besoin d’être rassurés et un des moyens pour eux d’y parvenir est de multiplier les sources de confiance auxquelles ils peuvent se fier », indique Jérôme Hiquet.
Ce phénomène explique notamment le succès grandissant des avis clients. 74% des consommateurs consultent aujourd’hui des avis avant d’acheter.
Près de la moitié des internautes (46%) lisent ces messages sur Google, 34% sur les sites web des marques et 9% sur les courriels qu’ils reçoivent, si l’on en croît les chiffres de ce baromètre semestriel.
« Les marques doivent bien prendre conscience que les consommateurs s’expriment quoi qu’il arrive », prévient le patron de Skeepers qui possède la plateforme Avis-Vérifiés. Les Millennials et la Gen Z sont particulièrement friands de ces messages en ligne.
Une autre source d’information de plus en plus appréciée par les internautes sont les communautés « semi-fermées » comme Reddit qui compte plus de 500 millions d’utilisateurs mensuels dont 7 millions en France.
Entre espaces publics et cercles privés, elles offrent un modèle hybride : l’accès est ouvert mais la participation réelle nécessite souvent de comprendre les codes, les règles et la culture propre à chaque sous-communauté.
Ces structures, qui jouent aujourd’hui un rôle central dans la façon dont les individus s’informent, échangent et se rassemblent autour d’intérêts communs, créent un sentiment d’appartenance fort. Les utilisateurs y trouvent un environnement plus authentique que les réseaux sociaux traditionnels, où l’identité réelle prime.
Les LLM ou grands modèles de langage, qui sont des programmes d’IA entraînés sur d’énormes quantités de texte pour comprendre et générer du langage humain, privilégient de plus en plus ces contenus perçus comme authentiques (communautés, forums, reviews) dans leurs réponses. Cette nouvelle réalité doit être prise en compte par les marques.
Aucun trou dans la raquette
« Elles doivent rester vigilantes et capter tous les signaux faibles les concernant, conseille Jérôme Hiquet. Elles doivent savoir tout ce qui se dit sur elles et ne pas avoir de trou dans la raquette ou laisser des zones d’ombre. Une fois ce travail effectué, elles ont besoin de passer d’une communication purement commerciale à une communication plus directe qui utilise des plateformes comme Whatsapp et des ambassadeurs influents. »
Certaines entreprises ont déjà entamé cette transformation. « Celles présentes dans la grande distribution et la beauté sont particulièrement actives dans ce domaine », constate le CEO de StratNXT.
Et vous, vous avez déjà sauter le pas ? Partagez votre expérience avec nous…