31 octobre 2025

Temps de lecture : 4 min

Harper’s Bazaar Homme débarque en France. Sa stratégie en 10 points pour s’imposer dans l’univers des masculins

Avec Harper’s Bazaar Homme, Olivier Lalanne fait souffler un vent d’audace sur la presse masculine. L’ex-directeur de GQ et Vogue Hommes signe un titre élégant et radical, où la mode se mêle à la réflexion sur les nouvelles masculinités.

Ce 30 octobre sort le nouveau masculin de Harper’s Bazaar, un semestriel de 240 pages vendu 7,90 € et tiré à 50.000 exemplaires. Le défi : rééditer le succès de son prédécesseur féminin lancé il y a deux ans et demi qui s’est installé très vite. Voilà comment l’éditeur compte s’y prendre.

1. Tenir compte d’un contexte sociologique en mutation

Le mouvement #MeToo a fait émerger des discussions fortes et modifié les injonctions virilistes. Fini les certitudes sur ce qu’est la « masculinité » .


« Tous les hommes ne se sentent pas « en crise ». Mais beaucoup se questionnent : comment se présenter ? Comment se comporter avec les femmes, comment séduire ? » s’interroge Olivier Lalanne, le rédacteur en chef.

Cette remise en cause nourrit l’opportunité pour Harper’s Bazaar Homme de s’adresser à un homme en mouvement « in progress ».

2. Une promesse éditoriale claire : « le masculin pluriel »

Le nouveau magazine entend refléter « les différentes formes de masculinités actuelles ».
Cela veut dire : décloisonner l’image de l’homme, ouvrir vers des aspirations nouvelles, apporter de la nuance et de la complexité. Il n’y a plus un seul modèle, mais une mosaïque.

3. Un éditeur chevronné à la manœuvre

Olivier Lalanne cumule 27 ans chez Condé Nast, 15 ans chez Vogue Hommes et chez GQ. Aujourd’hui rédacteur-en-chef de la version française de Harper’s Bazaar.

Sa méthode : ne pas penser un « lecteur » donné, ne pas s’enfermer dans une catégorisation limitante. Mais plutôt faire confiance à son instinct, à sa créativité, et opter pour des partis pris forts et audacieux.

« Je n’y pense pas à mon lecteur – à qui on veut parler… ça vient conditionner ce qu’on fait, ça bride la liberté. Je veux surtout être, fidèle à ce que je suis ». Résume-t-il.

4. Un style visuel radical et épuré

Le magazine s’inscrit dans un héritage visuel. Olivier Lalanne cite les années 60 : « modérées, graphiques, organiques ».

L’objectif est d’être en rupture avec les titres qui débordent d’informations et stimuli visuels, en « crise de foie oculaire » selon l’expression d’Olivier.

100 % photo, visuels forts, jeunes photographes émergents – comme Mario Sorrenti (ci-dessous) – entrent dans la danse. Harper’s Bazaar Homme ne sera pas un supplément, mais une version homme qui tient debout, avec épaisseur.

5. Un magazine de mode à part entière… pour hommes

« On est avant tout un magazine de mode à 100 % », affirme le rédacteur en chef.

La proposition : un stylisme audacieux, création forte, mode d’inspiration pour le luxe.
Toute la question est de savoir jusqu’où pousser le curseur ?

Les premiers retours des groupes de lecteurs font plaisir à Olivier :

« Ça ne ressemble à rien d’autre ».

6. Trois rubriques structurantes : mode / culture / beauté-soin

Le format se décline en trois temps. Pas de news :

  • Mode : créativité, audace
  • Culture : portraits de personnalités qui incarnent le masculin moderne (par exemple Jonathan Anderson directeur artistique chez Dior ou Théodore Pellerin, comédien canadien remarqué dans le rôle de Nino, ou celui de Jacques de Bascher (dans la série “Becoming Karl Lagerfeld”) ).
  • Beauté, soin : l’homme prend soin de lui.

Et des formats amusants à l’image de la page recommandation, « why don’t you ? » lire ce livre, aller dans ce restau…

Un clin d’œil et hommage à Diana Vreeland – éditrice pour The Harper’s Bazaar et Vogue dans les année dans les années 30 – qui proposait la rubrique “Why don’t you ? », une rubrique émancipatrice pour son époque.

Cette fois, on propose aux lecteurs : « pourquoi vous ne liriez-vous pas ce livre, n’iriez-vous pas dans ce restau ? » etc.

7. Une cible exigeante et diversifiée

Il n’y a pas un « lecteur type » en termes de classe d’âge, « c’est plutôt un état d’esprit qu’on vise » : curieux, en recherche d’inspiration, exigeant.

« Les magazines généralistes se vendent de moins en moins en kiosque, ce qui plaît en revanche, ce sont des titres spécialisés et pointus « voitures, bateau, horlogerie » explique Olivier.

Ici ce sera la mode et le luxe.

8. Une approche influenceur plutôt que « kiosque »

Selon Prisma Media, la version féminine de Harper’s Bazaar était rentable dès la première année. la version masculine cherche à réitérer l’exploit.


« Au delà du succès en kiosque, on veut être une source d’inspiration pour le luxe et la mode, un acteur d’influence. Quand nos pages sont affichées au mur des créateurs, on sait qu’on a réussi. »

9. Une éthique et une sincérité revendiquée

Olivier Lalanne insiste sur le temps long pour installer une marque média, sur la sincérité de la proposition, l’engagement et sur la nécessité d’élever le niveau de qualité.

« Il ne faut pas prendre les lecteurs pour des imbéciles »

10. En coulisses : un esprit d’équipe et d’innovation

Le magazine ne part pas de zéro. L’équipe est majoritairement issue de Harper’s Bazaar (femme). Trente personnes, dont pas mal de jeunes (25-25 ans). Olivier l’a jouée démocratique : « qui veut en être ? »

Tous ont levé la main. Pas question de pas à côté d’un projet innovant.

« Et une occasion de se faire plaisir et s’amuser » aussi ajoute Olivier.


S’ajoutent les écrivains, et photographes avec lesquels nous travaillons habituellement, et quelques nouveaux talents pour renforcer la patte masculine du titre.

Conclusion : un pari audacieux qui joue le contre-pied

Harper’s Bazaar s’affranchit des codes habituels des magazines masculins. Il choisit la rupture, la nuance, et une élégance volontairement élitiste. L’enjeu est double : capter un homme en mutation et gagner une place dans un univers saturé. Gageons que la sincérité, l’originalité de la proposition et l’énergie de l’équipe feront mouche.

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