Et  si leur nez s’allongeait à chaque mensonge ? Si les hommes  politiques devenaient les marionnettes de notre jeu de la vérité ? Si  le mensonge électoraliste était exposé et sanctionné en temps direct ?  Certes, le rêve impossible de Thomas Moore restera toujours une utopie.  Mais la démocratie idéale de Platon peut-elle compter sur le digital  pour défendre et consolider ses exigences de transparence? Lancée fin  janvier par The Washington Post, « Truth  Teller » espère bien poser les  bases de la révolution copernicienne du fact checking.
Avec  son application en ligne, le célèbre quotidien nord-américain prolonge  la tendance désormais solidement établie du fact checking. Observée  depuis quelques campagnes électorales sur les réseaux sociaux – Twitter en particulier – les blogs, les chaînes de télévision et les sites Web des médias  classiques comme la BBC, la vérification des faits et chiffres martelés par notre  élite dirigeante reste encore assez confidentielle. Le grand public  connaît son existence et ses possibilités, mais de là à en faire un  outil de réflexion et d’analyse politique, il y a un pas que « Truth  Teller » entend franchir.
Dérivée plus évolué et technologique de « Fact Checker », hébergé sur un blog  du site Internet du journal, l’application s’inscrit dans la lignée de  la référence « Fact Check », plate-forme  indépendante de l’Annenberg Public Policy Center. Dans le même esprit que le  PolitiFact du Tampa Bay Times, « Truth  Teller » dispose également d’un Truth-O-Meter pour indiquer au public le  degré de véracité du fait analysé. La principale valeur ajoutée de  l’innovation du Washington Post réside en fait dans son logiciel  speech-to-text.
Une machine à « fact checker » en live
En  temps réel, chaque déclaration est passé à la moulinette de la base de  données crée par le quotidien, sur la base de mots clefs. Un label «  vrai » ou « faux » apparaît ensuite, avec bien évidemment une  explication plus détaillée. La retranscription complète des déclarations  et annonces vérifiées est également disponible sur la plate-forme.  Encore à l’état de prototype, « Truth Teller » a pour l’instant testé  six discours prononcés au Congrès lors des débats sur la problématique  réforme fiscale, défendue par le gouvernement Obama et opposée par les  Républicains. La librairie digitale du site est amenée à grossir au fil  des mois, avec l’ambition de devenir une machine populaire à vérifier  les faits en temps réel.
Financée en partie par le Knight  Prototype Fund,  Truth Teller souhaite concrètement automatiser le processus de fact  checking né sur les réseaux sociaux et les live blogs. Ou quand le  digital permet la démocratisation d’une meilleure démocratie !
Benjamin Adler