9 octobre 2013

Temps de lecture : 7 min

Le Hors-Série d’INfluencia : la réactivité est une promesse de la conversation

La confiance est au cœur de la stratégie de la Poste, qui a mis en œuvre une démarche participative avec ses collaborateurs mais aussi avec ses clients, avec lesquels elle rentre quotidiennement en conversation. Explications d'isabelle Cambreleng, directrice de l'expérience clients et de lacommunication digitale à la direction du numérique et de Claire Gallaccio, directrice de la stratégie et des études à la direction de la communication, Groupe La Poste.

La Poste capitalise depuis plusieurs années sur la confiance.

(Claire Gallaccio) Le métier de La Poste, ce sont les échanges, échanges d’argent, de biens, d’informations… qu’ils soient numériques ou physiques. Pour échanger les uns avec les autres, les individus ont besoin en premier lieu d’un élan, d’un désir d’aller vers l’autre, et ce premier élan ne peut se produire qu’en situation de confiance.

C’est le rôle de La Poste que de faciliter les échanges, de les rendre possibles, d’en garantir le bon déroulement, c’est donc là que nous situons notre rôle de tiers de confiance. Nous allons aider ce premier élan à se concrétiser. Ce travail initial va permettre de créer une dynamique de confiance, qui aboutira ensuite à un capital de confiance.

La Poste bénéficie d’un capital de confiance important : 79% des entreprises, 72% des Français font confiance à La Poste . Ce capital de confiance bénéficie non seulement à La Poste mais aussi à la société toute entière puisque nous créons de la valeur mais aussi du lien social en favorisant les achats et les échanges entre individus.

Dans l’imaginaire collectif, c’est le facteur qui incarne le mieux cette relation de confiance. Quels en sont les ressorts ?

(CG) Je vais partir d’une illustration : une scène du film « Le Cave se rebiffe », avec Jean Gabin, dans laquelle il confie la planche à faux billets pour le week-end à La Poste en disant : « on est tranquille, ces gens honnêtes vont s’occuper de notre planche à billets ».

Nous avons travaillé sur les fondements de cette relation de confiance, qui, loin d’être abstraite, repose sur trois dimensions. La première, c’est la compétence : les clients peuvent avoir confiance parce que les postiers sont des professionnels, qui connaissent leur métier. Deuxième dimension, la bienveillance : les Français savent qu’ils peuvent compter sur le service postal. Enfin, l’intégrité : la majorité des postiers prêtent serment quel que soit leur métier au sein de La Poste ; cette dimension éthique constitue le troisième fondement de la confiance.

La Poste a créé en 2008 l’Observatoire de la confiance. Quels en sont les principaux enseignements ?

(CG) A l’époque, le discours médiatique martelait des mauvaises nouvelles sur la confiance, de mauvais sondages : les Français sont défiants, les Français sont méfiants. Compte tenu de l’importance de la question pour La Poste, nous avons décidé d’investiguer ce champ de la confiance, pour en comprendre les mécanismes, en amont, au niveau de la relation entre les acteurs ; nous avons également choisi de travailler sur les leviers de confiance.

Il existe des accélérateurs de confiance : par exemple, en France, plus la proximité est grande entre les individus et plus le niveau de confiance est important. C’est l’un des enseignements du dernier baromètre de confiance TNS Sofres – La Poste : les Français ont majoritairement confiance dans leurs proches : près de 100% dans leur conjoint, 96% dans leur famille, mais ils ne font pas confiance aux personnes qu’ils rencontrent pour la première fois (23% seulement). Ce constat peut être étendu au rapport aux institutions : les Français ont peu ou pas confiance dans le gouvernement, dans l’Etat. Cependant, dans un cercle plus proche d’eux, mairie ou collectivité locale, ce même phénomène de la proximité comme accélérateur de la confiance fonctionne. Ces cercles concentriques de confiance décroissante se retrouvent également dans l’entreprise : globalement, les Français ont confiance dans leurs collègues, plutôt confiance dans leur chef direct et moins confiance dans la direction générale.

Le Groupe a engagé une démarche participative avec les 270 000 postiers afin qu’ils contribuent à l’élaboration de votre plan stratégique 2013-2018.

(CG) Tous les postiers ont été sollicités pour la préparation du plan stratégique, avec une démarche fondée sur la logique de conversation : des ateliers ont été organisés, en équipes naturelles – les équipes de travail, pour débattre de la stratégie de l’entreprise aujourd’hui et de ses perspectives demain ;des supports ad hoc ont été conçus pour une conversation ouverte. Ensuite chaque postier pouvait contribuer et préciser comment, à son échelle, il pouvait améliorer la relation client, mieux travailler avec les autres…

Nous avons également souhaité, dans la même logique, échanger avec l’ensemble des parties prenantes, représentants des consommateurs et élus locaux. Car c’est de ces échanges que naissent une meilleure compréhension de notre stratégie et une pertinence plus fine de notre stratégie dans un futur proche.

Dans la suite de ce process, la restitution des contenus et des débats nous a semblé être une étape essentielle, nous avons donc décidé de travailler à un cahier des contributions, destiné à l’ensemble des collaborateurs et des parties prenantes. Le troisième temps sera celui de la sélection : le plan stratégique va s’inspirer de cette démarche, va reprendre telle et telle contributions… Enfin, à l’issue de l’élaboration du plan stratégique, un nouveau moment d’échanges est prévu avec l’ensemble des postiers.

Tournons-nous vers vos clients : quelles sont les caractéristiques de votre stratégie pour entrer en conversation en ligne, au quotidien, avec eux ?

(Isabelle Cambreleng) La Poste s’intéresse au sujet des médias sociaux depuis quatre ans. Avant d’engager la conversation, nous avons souhaité écouter nos publics en ligne en mettant en place un dispositif de veille, aujourd’hui très utile au pilotage au quotidien, nous ne pourrions pas converser sans écouter. De vrais points de crispations ont été décelés, concernant notamment la qualité de l’attente dans nos bureaux de poste ou la qualité de service courrier-colis. Des points que nous avons vus évoluer au cours de ces quatre dernières années, au fur et à mesure du déploiement des grands programmes de transformation notamment l’accueil, et de la modernisation de nos bureaux.

Cette période immersive a été également mise à profit pour décrypter les nouveaux codes et les nouveaux usages. Le constat ? Ces registres sont radicalement différents de nos registres de communicants ou de marketeurs. La conversation en ligne s’opère sur des modes plus authentiques, moins censurés et la personnalisation et l’ultra-proximité comptent davantage. Ces feedbacks ont nourri la réflexion sur nos propositions de valeurs sur les médias sociaux, que nous avons définies en ligne avec notre plan stratégique.

Nous avons choisi de travailler deux objectifs : le premier, c’est l’amélioration de la perception de la modernisation de La Poste, sur le registre de la démonstration, du contenu : pas de discours mais plutôt l’illustration de la transformation. Et le deuxième objectif, prioritaire ces trois dernières années, concerne la façon dont nous pouvons contribuer, avec les médias sociaux, à l’amélioration de la relation clients.

L’esprit de service et l’excellence de la relation client sont vraiment au cœur de notre plan stratégique. Avec les médias sociaux, nous avons une opportunité d’installer une nouvelle forme de relation clients en ligne plus responsable, et de ré-oxygéner notre approche clients. C’est pourquoi nous avons choisi d’opérer sur des registres très serviciels, très opérationnels, très relationnels. Aujourd’hui, nous sommes convaincus que la conversation embarque des logiques de valeur ajoutée : les médias sociaux ne sont pas un territoire de communication naturelle pour les marques et, pour s’y installer, elles doivent apporter de la valeur ajoutée, en faisant preuve la disponibilité, en proposant des solutions quand arrive une sollicitation ou un problème. De fait, dans de grandes structures comme La Poste les logiques de temps réel sous-tendues par les médias sociaux bouleversent nos méthodes de travail et nos modes d’organisation. Cette dimension de valeur ajoutée opérationnelle est vraiment une condition de succès.

Nous sommes aujourd’hui présents dans des logiques plutôt segmentées : sur Facebook pour le grand public, pour travailler l’image de la marque La Poste dans sa relation avec ses prospects et ses clients, sur Twitter plutôt pour de la relation clients pour la communication corporate, et sur les réseaux de networking pour notre marque employeur. Aujourd’hui, nous nous essayons à Google + pour cibler les E-commerçants, un public clé pour le développement de cette maison.

Comment avez-vous procédé pour former les postiers aux réseaux sociaux ?

(IC) Les médias sociaux, une fois donnée l’impulsion de départ, ce n’est pas uniquement l’affaire des marketeurs et des communicants. Il faut que la démarche soit portée par toute l’entreprise. L’année dernière, nous avons lancé un programme de sensibilisation qui visait à rassurer, à sensibiliser sur ces nouveaux territoires , les droits et les devoirs, etc. Nous souhaitons que les collaborateurs puissent, dans leur dimension d’expertise, engager la conversation avec nos publics sur Internet, dans les codes que l’entreprise a choisis sur ces médias. Aujourd’hui, nous avons reçu le renfort d’un certain nombre de collaborateurs, notamment de nos forces de vente qui ont compris que LinkedIn ou Viadeo étaient des outils importants pour développer son réseau sur Internet, sur des registres moins marketing ou commercial.

La relation client sur les médias sociaux n’est pas traitée en marge de nos processus traditionnels. Ainsi nous travaillons sur un projet de socialisation de nos centres d’appel pour faire jouer à plein les effets d’intercanalité pour nos clients. Après formation, nos social conseillers prennent la main sur le community management. La qualité des réponses s’en est trouvée améliorée, notre connaissance clients également, et le community manager peut se recentrer sur son cœur de métier, la veille et la gestion de l’influence.

Comment exploitez-vous les feedbacks?

(IC) Nous les utilisons pour travailler à l’amélioration de nos offres, à l’amélioration de nos process aussi, dans des logiques de transversalité. Les médias sociaux nous ont permis de travailler de façon horizontale, hors silos pour être au rendez-vous de ce qu’attend le client. La réactivité est une promesse de la conversation. Les feedbacks sont évidemment transmis à nos marketeurs, travailler les interactions avec les clients pour la définition de nos offres en amont ou en correction aval est dans l’ADN de cette maison. C’est depuis très longtemps ce que fait par exemple la direction du courrier avec les clients grands comptes.

Plus globalement, comment la conversation contribue-t-elle à la transformation de La Poste en 2013 ?

(CG) Le focus sur la relation client transforme La Poste, et converser davantage est une bonne façon de s’ouvrir à l’intelligence collective.

(IC) Travailler la relation client via la conversation nous permet de nous rapprocher de nos publics et de mieux connaître nos clients pour faire progresser la culture clients dans notre entreprise.

Interview d’Isabelle Cambreleng et de Claire Gallaccio pour la Revue INfluencia sur la Conversation, réalisée par Valérie Decroix en partenariat avec Entrecom. En vente en librairie.

Illustration Joachim Larralde.

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