4 avril 2022

Temps de lecture : 2 min

Volodymyr Zelensky : né un 24 février.

« Qu’est-ce que le gouvernement ? Rien s’il n’a pas l’opinion ». Cet aphorisme attribué à Napoléon a été, depuis, doré à l’or fin sous la main communicante de l’orfèvre Volodymyr Zelensky, tant l’ancien acteur de séries télévisées s’est fondu avec une perspicacité talentueuse dans le costume d’un artiste de la propagande de Guerre.

Comme le rappelle l’universitaire David Colon[1] « depuis la première guerre mondiale et l’avènement d’une propagande à très grande échelle nous savons que la Propagande est une stratégie de communication de masse ayant pour objectifs l’influence de l’Opinion et des actions d’individus ou de groupes au moyen d’information partiales. ». À y regarder d’un peu plus près, comment expliquer sa stratégie, et la façon dont il captive la plupart des opinions publiques mondiales, et réduit par la même occasion l’asymétrie de puissance militaire entre son pays et son adversaire russe par le seul biais de son exceptionnel brio communicationnel ?

Par l’incarnation : les religions et les grands récits ont forgé cette notion essentielle qui passe par le recours à l’expression d’homme providentiel. Ce Président endosse, incarne parfaitement l’esprit de la résistance. Tout son être télévisuel, et ses actes de pure rébellion sur les réseaux sociaux ont forgé en quelques semaines une nouvelle stature de commandeur. Sans peur face à la perspective de terminer en martyre de son peuple, sans reproche vis-à-vis d’une communauté internationale auprès de laquelle il est contraint de supplier pour obtenir une hypothétique quoi salvatrice maitrise du ciel. Et, en communicant à partir de localisations repérables par l’ennemi, il ne recule devant aucune provocation vis-à-vis de Poutine le terrible.

Par l’hexis corporelle, Bourdieu aurait parlé d’habitus, c’est-à-dire la manière pratique d’éprouver et d’exprimer le sens « que l’on a » (Silhouette, morphologie, taille, allure, un ensemble d’attitudes, de gestes, de pratiques). Un tee-shirt militaire commun, banal, la barbe mûre du combattant tout à son épreuve. Un physique dévoilant des formes athlétiques prêtes à en découdre s’il le faut. La beauté, la dignité et la solennité sans sourire d’un leader qui souffre avec son peuple, nullement infatué par les onguents des centaines de parlementaires l’applaudissant comme un seul homme après chacun de ses appels à l’aide.

Par la force du symbolique : Zelensky dispose des armes pour siphonner nos émotions par le recours aux symboles. En invoquant les souvenirs du 11 septembre ou de Pearl Harbor face aux élus américains, en exhortant les parlementaires allemands à abattre le nouveau « Mur » érigé en Europe, en remémorant aux représentants de l’Assemblée nationale et du Sénat réunis, les ruines de Verdun, le président Ukrainien associe, comme le théorisa Walter Lippmann, une signification concrète – le sensible – à une signification abstraite – l’intelligible. Il interpelle la toute-puissance de nos inconscients nationaux.

Par le pouvoir rhétorique : cet art de savoir convaincre, Zelensky le domestique. Il prend le temps de s’adresser aux élus du peuple, celles et ceux qui mettent en œuvre au nom de chacun d’entre nous. Et que dire de la force de ses mots. Pour impliquer la nation du stand-up et des réputations politiques qui se font et se défont à l’occasion des late shows il assène des punchlines chirurgicales. « Je n’ai pas besoin d’un taxi, j’ai besoin de munitions » a-t-il lancé au président Biden qui proposait de l’exfiltrer comme le vulgaire dictateur d’une république bananière.

Ce Président a compris la teneur essentielle de son combat. Sa mission consiste à offrir un narratif. En mettant en scène sa théatrocratie, pour reprendre le concept du sociologue Georges Balandier, il fait des médias ses alliés, des réseaux sociaux ses grognards, par la puissance des relais que constitue la multitude de chaque « citoyen-reporter » ému par les horreurs, les injustices et l’envie de soutenir le combat des Ukrainiens. Il place son action en faveur de l’espérance des jours meilleurs. Comme il se doit, la religion médiatique de Monsieur Zelensky fait de chacun de nous les acteurs d’une bataille éternelle, le bien contre le mal. Efficace !

 

[1] Propagande – Belin

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