29 août 2023

Temps de lecture : 7 min

« Avec l’influence, la difficulté est de mêler le storytelling au visuel tout en restant authentique », Steves Hounkponou, expert en notoriété

Suivi sur Instagram par près de 200 000 followers, Steves Hounkponou collabore avec de nombreuses marques (Evian, ChanelBeauté, BMW,  et personnalités publiques, ou athlètes… ) les aidant à développer des récits qui ont un impact significatif sur leur audience. L’homme au chapeau qui se dit expert en notoriété, s’est lui même construit à travers une expérience personnelle douloureuse, le handicap, qu’il a su transformer en force et projet de vie. Interview où le privé et le pro ne font qu’un.

Storytelling: ma méthode, pour les personnes, dirigeants(e)s, se base sur une étape de vie ayant eu lieu avant les 14 ans. Un moment qui a façonné la personne qu’elle est aujourd’hui et a fait en sorte qu’elle développe ce business précis.

INfluencia : le storytelling est indispensable pour faire vivre les marques. Qu’est-ce qui a changé dans l’art du storytelling depuis que l’influence est venue se mêler de com?

Steves Hounkponou :l’art du storytelling a connu de nombreux changements. Les marques ont décidé de collaborer avec des influenceurs, créateurs de contenus pour que leurs valeurs, leurs histoires soient en phase et qu’elles soient racontées autrement.

Nous privilégions des histoires courtes qui se veulent percutantes, notamment sur les réseaux avec un temps d’attention moindre du consommateur. Le retour de l’audience est devenu participatif : « je te raconte mon histoire, et toi aussi dis-moi la tienne et en quoi elles se rejoignent« . L’information se diffuse plus rapidement et doit être modifiable en fonction du retour des consommateurs, dans un délai de plus en plus court. Enfin, tout passe par le branding, la vidéo, les photos. Aujourd’hui on doit mêler le storytelling au visuel tout en restant authentique. D’où la difficulté.
Ce qui a changé c’est donc le visuel qu’on rajoute dans le parcours client ainsi que l’adaptatbilité. On ne raconte plus seulement d’histoires, on doit aussi les imager grâce à  l’influence.

IN. : vous avez inventé votre métier. Racontez-nous votre parcours tant personnel que professionnel ?

S.H. : je suis né et j’ai grandi au Bénin. J’ai une maladie génétique, le gêne HLA B27 qui a causé la spondylarthrite ankylosante. Longtemps je me suis tu, longtemps j’ai écouté par manque de confiance en moi, et je n’osais pas m’exprimer. Je pense que cela a été ma force car développer le storytelling des personnes c’est savoir écouter afin de mieux raconter.
Mon handicap est une force et ma mission est de rendre visible les personnes, marques qui sont invisibles, un peu comme mon handicap m’a fait souffrir. Je suis papa d’un petit garçon Gabriel, de 3 ans qui me comble de joie.
Sur le plan professionnel, après une expérience en marketing chez L’Oréal et Cartier, j’ai co-créé 2 campagnes de pub iconiques dans le monde de la beauté : La Nuit de l’Homme et La Parisienne. J’ai bifurqué dans le retail au rang de directeur commercial d’une multinationale de luxe, Coach France à seulement 28 ans, et j’ai appris et développé le storytelling dans les maisons de luxe. Cela m’a beaucoup formé, j’avais la chair de poule quand on romançait les produits de la marque.
Titulaire d’un Bachelor en Management à Cambridge, et d’un Master en marketing du luxe et un MBA en finance je suis fan de Yves Saint Laurent, l’artiste.

IN. : raconter des histoires authentiques n’est-ce pas un pléonasme?

S.H. : le monde manque d’authenticité. Les gens mentent notamment sur les réseaux, les gens s’approprient les histoires des autres ou ne savent pas comment raconter leur vraie histoire. Cela me semble naturel de raconter une histoire authentique, mais certains échouent à le faire.

IN. : est-ce justement là votre art ?

S.H. : ma méthode se base pour les personnes, dirigeants(e)s, sur une étape de leur vie avant leurs 14 ans. Un moment de cette vie a fait la personne qu’elles sont aujourd’hui et a fait en sorte qu’elles développent ce business précis. Donc à travers une série de 130 questions, on va chercher précisément, ce qui a pêché, ce qui fait qu’ils ont une douleur et c’est la douleur qu’on raconte. C’est le storytelling pour moi, partir de la douleur, du point faible pour l’assumer et pourquoi pas en faire une solution. Et tout le monde a un storytelling, il suffit juste d’écouter chaque aspect, chaque détail.

En assumant, une controverse, (le changement climatique, la sécheresse, la terre qui brûle) Hermès assume son storytelling et son statut, et pose des barrières à l’entrée d’achat de son produit. Le produit n’est pas pour tout le monde, et nous l’assumons.

IN. : comment, à partir d’une marque, travaillez-vous à lui construire un univers? Par exemple, La Parisienne ?

S.H. : construire un univers de marque est différent, il s’agit de stratégie pour une identité distinctive et cohérente. Il faut comprendre déjà le positionnement. Par exemple pour la Parisienne, comprendre son univers, où elle va, ses valeurs, ce qu’elle a comme mission et vision, et cela passe par des questionnements précis que le questionnaire permet de trouver. Pour la Parisienne, on utilisera plutôt ses valeurs, ses engagements, son origine, qu’on mêlera à une belle identité visuelle, un slogan différenciant mais unique. Ce qui sera intéressant c’est de préciser de quelle parisienne on parle. Celle de rive droite ou de rive gauche, et si celle de rive gauche, de quel arrondissement. L’expérience client ne sera pas la même avec la parisienne de quartier, la parisienne qui vient d’emménager, la parisienne qui a 10 générations de parisiens avant elle, bref, il faut une expérience client cohérente, trouver une ambassadrice, qui va refléter l’ambiance et à qui la cible va s’identifier, mais dans tous les cas, il faut 3 actions :
– Engagement (le public doit ressentir de l’émotion à travers cette marque)
– Innovations (toujours rechercher des nouveautés à mettre en avant, que ça soit les tendances ou l’actualité)
– Réseau : vos clients doivent devenir vos ambassadeurs et parler de vous

IN. : lorsque Hermès ou Perrier utilisent le feu de la terre ou la sécheresse pour en faire leur territoire, il y a comme un malaise. Si Perrier a cessé de communiquer dessus, en revanche Hermès continue de placer ses héros sur de la terre brûlante. Que pensez-vous de ces storytelling justement.

S.H. : c’est une question de cible et d’assumer. Perrier est une marque plus populaire, Hermès, une marque plus luxe, sélective. En assumant, une controverse, Hermès assume son storytelling et son statut, et pose des barrières à l’entrée d’achat de son produit. Le produit n’est pas pour tout le monde, et nous l’assumons.

Seul avec Chat GPT, et les Métavers, le monde meurt de faim…

IN. : peut-on faire abstraction de ces territoires (révolution numérique, climatique, chaotique en politique, etc) pour construire un storytelling ?

S.H. : il faut juste être aligné avec ses valeurs. Je pense que le storytelling est en relation avec des valeurs. Faire abstraction, je dirais non me concernant, mais pour chaque marque, la question doit être faite en rapport avec sa cible. SI votre cible n’a pas d’appétence pour les RSE, vous ne devez pas en parler. Par exemple, une marque de vélo aura 3 raisons de vendre :
– A la cible qui manque d’exercice, elle vendra le fait de faire de l’exercice, pour être en pleine forme tout en se déplaçant
– A la cible RSE, elle jouera sur l’empreinte Carbone
– A l’entrepreneur, elle jouera sur le temps gagné dans les transports
Tout est une question de cible.

Thriller de Mickael Jackson, un court métrage de 15 minutes, dans la musique, ça a été un Game changer.

IN. : que pensez-vous de ces différentes technologies, métavers, NFT, Chat GPT, sont-elles des moteurs pour vous, travaillez-vous avec l’innovation?

S.H. : seul avec Chat GPT, et les Métavers, le monde meurt de faim…  Même si je comprends, pour moi la réalité reste dans le vrai monde. Peu importe les générations, on a besoin de l’humain.

IN. : pensez-vous que « la pub responsable » peut être intéressante, « relevant », comme on dit en anglais ?

S.H : oui, et tout dépend de votre cible. En apparence, oui, mais l’hypocrisie n’est jamais bien loin, et le but c’est quand même de faire du business et de développer votre activité. Il faut que ça soit en adéquation avec vos objectifs.

IN. : quelles sont les grandes campagnes du passé qui vous impressionnent ? Ou qui vous paraissent aujourd’hui aussi fortes d’un point de vue du storytelling ?

S.H. : celles que j’ai faites avec L’Oréal, comme La Nuit de l’homme ou La Parisienne, car elles ont vraiment apporté quelque chose de nouveau. Sinon je dirais Thriller de Mickael Jackson, un court métrage de 15 minutes, dans la musique, ça a été un Game changer.

IN. : aujourd’hui vous n’êtes plus attaché à une marque ? Vous êtes « free » qu’y trouvez-vous dans cette liberté ?

S.H. : j’adore travailler avec des personnes en adéquation avec nos valeurs, je ne veux pas travailler pour l’industriel qui exploite des enfants en Chine ou au Bénin. Mes clients ont ces choses en commun avec moi
Audace
Résilience
Bienveillance
La vie est courte, et je pense que c’est important de travailler, mais aussi de faire du bien, de travailler en aidant ceux qui en ont le plus besoin.

J’ai appris une chose : « moins tu investis, moins tu réussis »

IN. : les annonceurs sont frileux aujourd’hui. Ils semblent angoissés, comme nous tous. Que leur proposez-vous ?

S.H. : je leur propose de s’ouvrir, de continuer de s’informer. C’est pour cela que j’ai lancé ma newsletter : la newsletter de la notoriété. Je démontre comment je déconstruis et apporte de la valeur et comment je résous des cas pratiques. C’est mon laboratoire d’idées, donc le but est de montrer mon expertise. J’ai aussi une communauté de 200K personnes, je travaille avec Instagram France, avec Google, des références dans le secteur. J’ai appris une chose : « moins tu investis, moins tu réussis », et ce sont les idées qui font la réussite, pour cela nous avons les idées.

IN. : nous sommes tous assez semblables et à la fois uniques, quels sont les ressorts d’un vrai, bon story telling?

S.H.: – Un obstacle (par exemple : j’ai passé des années en fauteuil roulant)
– Une lutte interne (ex : peur de me montrer, d’être visible)
– Lutte externe (ex : apprendre pour dépasser un obstacle)
– Un élément de changement (ex : comprendre un point bloquant )
– L’étincelle : (ex : action vs pensée)
– Le guide : (ex : continuer d’apprendre, de lire, j’ai dévoré les formations de Seith Godin, David Laroche…)
– Le résultat : (ex : aujourd’hui je crée des storytelling pour le lancement de plusieurs multinationales)

A travers mon histoire, j’explique comment le storytelling me tient à cœur.

Quand après deux années de fauteuil roulant, j’ai réussi à marcher, j’ai compris, que rien n’était impossible.

IN. : puisque l’heure est « au récit » de chacun de sa vie, terme un peu galvaudé, quel est le récit qui vous a construit ?

S.H. : ces 2 années en fauteuil roulant. Tous les médecins m’ont dit que je ne pouvais pas marcher, je manquais de visibilité et c’est là que j’ai décidé de ne plus subir ma vie et que avec abnégation et résilience, quand j’ai réussi à marcher, j’ai compris, que rien n’était impossible. Galvaudé mais tellement vrai.

IN. : quel artiste qui a fait oeuvre de publicitaire vous vient à l’esprit?

S.H. : Salvador Dali, et son fameux logo Chupa Chups. Il avait des œuvres extravagantes, je suis fan de sa direction artistique et de son talent pour attirer l’attention du public. Grâce à ses collaborations, il a su toucher l’attention du public et mêler l’art à la publicité et la communication commerciale.

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