7 mars 2016

Temps de lecture : 5 min

Les quartiers de nuit : une aubaine pour la ville et ses acteurs

La ville ne peut vivre que le jour et les noctambules sont des enquiquineurs sans aucun besoin… Et s’il était temps de lutter contre les idées reçues ? C’est l’ambition de Mirik Milan avec ses « quartiers de la nuit » à Amsterdam. Un projet qui répond à l’idée de fond qu’une ville doit être citoyenne et conviviale. Question d’attractivité.

La ville ne peut vivre que le jour et les noctambules sont des enquiquineurs sans aucun besoin… Et s’il était temps de lutter contre les idées reçues ? C’est l’ambition de Mirik Milan avec ses « quartiers de la nuit » à Amsterdam. Un projet qui répond à l’idée de fond qu’une ville doit être citoyenne et conviviale. Question d’attractivité.

Et si un quartier ou plusieurs d’Amsterdam pouvaient fonctionner normalement 24 heures sur 24, 7 jours sur 7 ? Permettant d’offrir à ses habitants du coucher du soleil au petit matin, les mêmes services administratifs, commerçants et culturels qu’en plein jour. Laissant ainsi ouverts des bibliothèques, des restaurants en tous genres, des espaces de travail, de consommation ou de loisirs… Non seulement, l’initiative libérerait de nombreuses contraintes pour tous ceux qui vivent la nuit que ce soit pour travailler, étudier ou pour faire la fête. Mais, en plus, elle donnerait de nouvelles perspectives de développement économique et social à la ville et ses acteurs. Car il serait trompeur de croire que seuls des loyers attractifs, comme Berlin a pu le proposer, suffisent à susciter l’intérêt des citadins pour venir s’installer dans un endroit. A l’heure de l’hyper connexion, il en faut plus… et pour tous les goûts. A l’instar de Bankjes, toujours à Amsterdam. Ce collectif propose, en effet, chaque premier dimanche du mois, entre juin et octobre, de créer ou de transformer un banc public à l’envi en un bar, un restaurant, un salon de lecture ou un cours de danse… à ciel ouvert. Un Marseillais séduit par l’expérience est même venu y installer son pop up pétanque ! Le succès a été immédiatement au rendez-vous car cette initiative distrayante et ouverte aux autres marie le social, le participatif et le partage mais dans la vraie vie.

La « city’s twilight zone » : un quartier de nuit utile pour tous, y compris les marques et la com

Dans un autre genre, si ce projet de « city’s twilight zone » de Mirik Milan voyait le jour, il rendrait sûrement la ville encore plus dynamique et attrayante grâce à des prestations et des infrastructures qui toucheront une population pour laquelle le numérique n’a plus de secret, et de plus en plus concernée par les principes de souplesse, de disponibilité, de créativité et d’immédiateté. Les avantages ne sont pas des moindres : tout d’abord, l’initiative favoriserait l’épanouissement d’une économie plus ambitieuse avec le développement ou la création de tous types d’emplois dans le commerce, l’administration, et les transports allant au-delà des graphistes, dj ou animateur d’événementiel…. Elle pallierait aussi les occasionnels manques à gagner (mauvaise saison, intempéries, grèves…) que toute cité peut être amenée à subir.

Puis, en toute logique, elle serait propice à l’émergence de nouvelles marques et ouvrirait de nouveaux territoires d’expression à toutes celles concernées, de près ou de loin, par cet univers de la nuit repensé. Avec, à la clef, des consommateurs aux attentes différentes mais qui génèrent du trafic. Et bien sûr pour tous les acteurs de la communication et notamment ceux de la communication extérieure, une nouvelle réflexion sur les éclairages, les transports, les supports, les messages… Un vrai challenge économique mais pas si surprenant que cela car résultant d’une décennie du changement numérique et culturel. Enfin, en proposant plus, elle aiderait à concentrer, dans un secteur circonscrit et adapté, les noctambules et limiterait les éventuelles nuisances à son périmètre, tout en permettant à d’autres quartiers de vivre au rythme tranquille du « couvre feu » classiquement admis. Des arguments pertinents qui ne peuvent que faire mouche à terme car ils permettraient de renforcer un nouveau type de lien social au sein de la cité.

Des réponses innovantes et attendues pour un monde qui s’urbanise

Cette idée n’a rien de farfelu et pourrait vite prendre forme puisque mûrement réfléchie par Mirik Milan, un homme de terrain. En effet, ancien patron de night club, il est également « maire de la nuit » -un titre honorifique qui ne lui confère aucun pouvoir exécutif autre que celui de jouer de son influence. Pourtant depuis 2003, il œuvre, avec son association, au développement d’animations nocturnes dans sa ville natale. Notamment en instaurant un dialogue récurrent et sérieux entre les acteurs de la nuit, les riverains et les édiles. Soit pour lever un malentendu ou une suspicion à propos d’une implantation d’activité ou d’un événement, soit pour désamorcer une situation qui pourrait tourner au conflit en cas de débordements (bruits, salissures, abus sexuels, crimes…). Et cet échange avec les conseils de quartiers et autres parties prenantes est important car on sait bien que si les procédures d’autorisation peuvent être plus ou moins facilement obtenues, dès le plus petit problème, les autorités publiques, même les plus libérales, ont la capacité de menacer de fermeture.

Or une interdiction peut signifier la mort d’une industrie, la désertion d’un lieu avec la disparition de talents et de créativité qui contribuent pourtant à la vitalité et au rayonnement d’une ville. Son action a permis, par exemple, de prolonger les temps d’ouvertures de certaines discothèques jusqu’à 8 heures du matin. Arguant du fait qu’ainsi les personnes qui souhaitent poursuivre la fête ne se retrouvent plus dehors prématurément avec le risque de perturber le sommeil des résidents alentour. De même, Il a mis en place une équipe de 10 personnes, baptisée « Square Hosts » qui déambule, chaque vendredi et samedi soir, sur la Rembrandtplein, une place réputée pour ses bars très animés. Leur objectif est d’approcher en douceur les noctambules qui souvent ne se rendent même pas compte qu’ils sont anti-sociaux et de réintroduire, par le dialogue, des règles de comportement. Et de permettre à ce lieu en plein centre ville de ne plus être montré du doigt. Une vie nocturne bien comprise qui peut facilement dépasser l’univers des discothèques en touchant la culture ou le tourisme. Comme le démontre le succès de soirées comme celles de la Nuit Blanche à Paris, des Nuits Sonores ou de la Fête des lumières à Lyon qui offrent une traversée de la ville aussi distrayante qu’instructive et aventurière.

Les « maires de la nuit », une fonction nécessaire à labelliser

Le « maire de la nuit » a tellement son utilité qu’il fait des émules dans des capitales ou des grandes villes comme Groningue, Nimègue et une douzaine d’autres aux Pays-Bas mais aussi Paris, Nantes, Toulouse, Zurich, Londres et Berlin… qui ont déjà élu les leurs. D’ailleurs, le phénomène prend tant d’ampleur que Mirik Milan a décidé de réunir tous ses collègues « gestionnaires des activités économiques nocturnes » en avril prochain lors d’un sommet international à Amsterdam, surnommé Night Mayor’s Summit. Un pas vers la reconnaissance d’une fonction qui n’a rien de superflu. En France, la mise en place par le Ministère des Affaires Etrangères et le Secrétariat d’Etat  au Tourisme d’un pôle d’excellence « Tourisme de Nuit » ou la création récente, à Paris, du Conseil de la Nuit dans la lignée des États Généraux de la nuit (2010), sont le reflet d’une reconnaissance croissante par les pouvoirs publics de cet espace-temps singulier.

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