Quand les marques parlent animal : BMW mise sur un poulpe pour incarner l’intelligence de ses véhicules
Avec sa nouvelle campagne “Meet Okto the Octopus”, BMW fait valser un poulpe pour incarner l’intelligence technologique de ses futurs modèles. Un choix stratégique dans un paysage publicitaire où les animaux sont devenus de puissants vecteurs émotionnels.
Les tentacules dansent, la musique s’emballe dans une valse entraînante, les mouvements sont fluides, précis, presque chorégraphiques. Ce n’est pas une scène de documentaire animalier, mais la toute dernière publicité de BMW. Dans son tout nouveau film “Meet Okto the Octopus”, le constructeur bavarois met en scène un céphalopode à huit bras dans un ballet aquatique méticuleusement orchestré. L’animal est supposé illustrer les capacités de coordination du nouveau système centralisé « Heart of Joy », qui pilotera les fonctions clés de la conduite dans les futurs modèles Neue Klasse.
Derrière cette poésie visuelle digne d’un documentaire animalier et commentée par une voix calme et rassurante ressemblant étrangement à celle de David Attenborough, le message de la marque allemande est claire : sa nouvelle unité de contrôle centrale, qui est dix fois plus rapide que ses modèles précédentes, est aussi « intelligente » qu’une pieuvre. Elle peut contrôler le moteur et le freinage du véhicule tout en gérant sa récupération d’énergie et en contrôlant sa direction avec une finesse inédite. Plutôt que de noyer le consommateur sous les chiffres et les termes techniques, BMW a préféré faire appel à un langage universel : la nature. Et plus précisément, au génie biomécanique du poulpe.
Dans la publicité signée par l’agence Jung von Matt basée à Hambourg, l’animal, qui dispose naturellement d’un système nerveux réparti entre ses bras, se voit doter d’un système centralisé fictif pour incarner le fonctionnement du Heart of Joy. Cette une créature mi-réelle et, mi-fantasmée, se voit ainsi capable de faire des mouvements coordonnés au millimètre et de valser sous les vagues tout en évitant les crocs acérés d’une murène affamée. La pieuvre, qui est souvent cité comme un modèle d’intelligence naturelle, devient une créature artificielle au cerveau « augmenté ». En orchestrant cette fiction, BMW crée un parallèle avec le conducteur du futur : un humain assisté, augmenté, mais toujours maître des commandes grâce à un « super cerveau » automobile. Rassurant ? A vous de juger…
Le constructeur munichois n’est pas la seule marque à anthropomorphiser les animaux pour transmettre une image de puissance ou d’intelligence. Depuis de nombreuses années, nos petites « bébêtes » préférées sont utilisées comme les messagers des marques.
La Voix de son Maître (HMV) l’a fait dès 1898 en utilisant le Jack Russel Terrier Nipper dans toutes ses communications.
Les chiens ont toujours été adorés par les publicitaires. Du berger allemand de Royal Canin au Basset Hound de TéléZ, les exemples sont nombreux.
Les chats apparaissent aussi souvent dans les films. Le Chartreux de Sheba a longtemps été populaire tout comme le British Shorthair de Whiskas.
Le cheval apparaît, lui, sur les logos de Ferrari, Porsche, Continental et Poulain.
Et que dire de la Vache qui rit de Bel et de la laitière violette de Milka ?
Les félins sont également populaires. Frosties a son tigre, Puma son… puma, Jaguar son… jaguar, Peugeot a son lion tout comme le Crédit Lyonnais et la Metro Goldwyn Mayer ou Generali. Depuis quelques jours, BMW a son poulpe.
Des bêtes qui vendent, mais jusqu’où ?
La multiplication des campagnes mettant en scène des animaux pose toutefois quelques questions. Si certaines publicités éveillent l’admiration, d’autres peuvent frôler le ridicule ou le “greenwashing affectif”. D’autant que la frontière entre le réel, l’animé et le généré par IA devient de plus en plus floue.
Pour BMW, la pieuvre n’est pas là pour attendrir, mais pour intellectualiser une promesse de performance. Le “Heart of Joy” est présenté comme une avancée majeure en matière de dynamique de conduite, capable de transformer une voiture en organisme vivant parfaitement coordonné.
Mais ce type de storytelling n’est pas neutre. Il façonne notre perception de la technologie à travers des filtres émotionnels puissants. L’animal devient symbole, interface, écran de projection. Et dans un monde où les marques cherchent à se réconcilier avec la nature tout en vantant l’hypertechnologie, le poulpe de BMW pourrait bien devenir le nouvel emblème d’un marketing de la convergence : entre nature, machine imagination et… manipulation.