Je n’aime pas tellement les tendances.
Ou plutôt, je m’en méfie.
Vous savez, celle qu’on qualifie de « tendance de fond », celle qui va tout changer et qui est immanquablement remplacée par une autre, toujours de fond, quelque temps plus tard.
Il y a 3 ans Mark Zuckerberg lançait ce qui est vite devenu une tendance de fond censée transformer nos vies du tout au tout, et partie pour durer : Le Metavers.
Un exemple parmi tant d’autres. Je le cite d’autant plus que j’y ai cru un long moment
Et pourtant qu’y a-t-il de plus important aujourd’hui que de capter, non pas les tendances (qui ne sont pas toutes éphémères, frivoles et superficielles néanmoins !) mais l’époque ?
Important pour quoi ?
Pour écouter les gens, pour saisir leurs questionnements, leurs peurs, leurs désirs, leurs fractures et les soubresauts permanents qui traversent la société, leur terrain de vie collectif.
Pour écouter l’ordinaire, l’infra-ordinaire et pas l’extraordinaire,
Le familier, le commun, les petits gestes, les habitudes, les non-dits et les imaginaires.
Décrypter le bruit de fond de la rue, de la société et de la consommation.
Ce bruit de fond est assourdissant tant les changements en cours sont nombreux.
Pourquoi ce boom des lotos bingo (pas les lotos de la Française des Jeux mais les lotos associatifs qui cartonnent partout en France), et pourquoi un tel engouement pour le MMA, toutes classes sociales confondues ? Qu’en est-il du sens de la fête aujourd’hui, avec ou sans liquid death ? Pourquoi ce goût prononcé des retraites et des chemins de St Jacques, des Cévennes… ?
Il y a comme un changement d’air dans les mentalités.
Il y a comme un goût de passation dans l’air du temps.
Les années à venir sont en avance sur le calendrier.
Important pour qui ?
Pour les marques
Car, à travers l’époque et tous les mouvements qui la traversent ce sont leurs clients qu’elles saisissent mieux, avec lesquels elles tissent des liens plus étroits.
Mais mieux encore, quand une marque capte l’esprit de son époque, elle fait souvent avancer la société dans le bon sens.
NYX Professional Makeup et ses True ID Cards, AXA et sa protection juridique face aux violences familiales, Renault et ses « voitures de future fonction », toutes ces marques, en s’appuyant sur un insight (un tendant de l’époque) ont su déployer des actions concrètes.
L’époque est un moment décisif, un point d’arrêt nous dit son étymologie.
Elle est faite d’une multitude de choses réelles, langage, images, arts, mode, politique (et ses combats), écologie, pop culture, usages, objets…et de codes, de normes, de croyances et d’imaginaires.
L’époque actuelle est particulièrement mouvante car elle est en proie à de nombreuses crises simultanées. Le temps est devenu tout à la fois une obsession et une oppression universelle. Le temps s’accélère, les time to market se raccourcissent.
Dans ces conditions, ce qui compte avant tout, c’est, bien évidemment de ne pas être en retard, les gens ne le comprennent pas.
Etre en avance : ils ne le comprennent pas toujours non plus ni beaucoup mieux.
Etre à l’heure est à mon sens la priorité des marques.
C’est déjà énorme.
Et c’est déterminant car c’est dans cette connexion « au temps des gens » que se niche la valeur et la valorisation d’une marque.
Comment une marque peut-elle donc réussir à se connecter aux temps des gens et à l’esprit du temps ?
La 1ère réponse tient à l’écoute. Une observation anthropologique consistant à confronter une marque et son univers à des items de définition de l’époque (allant du langage à la RSE en passant par les communications sur le social media, ces items sont déterminés au cas par cas selon la marque et son univers). Cette écoute permet d’ajuster la marque, sa plateforme et ses assets de communication pour être la plus résonante possible.
La 2ème réponse tient aux talents. Une marque va « sonner juste » si elle est nourrie et managée par des profils aussi divers que ceux de sociologues, de photographes, de journalistes, de vidéastes, d’experts RSE, de sémiologues, de tiktokers…et pas uniquement de marketeurs et de spécialistes de la marque et de la communication. Des talents immergés dans la culture du moment qui sauront orienter les trajectoires des marques.
Deux conditions sine qua non pour rester à l’heure alors que le temps s’écoule toujours plus vite.
« On va bien lentement dans ton pays ! Ici, vois-tu, on est obligé de courir tant qu’on peut pour rester au même endroit, dit la Reine ». Lewis Caroll
Cécile Badouard, Fondatrice de brands on time