5 juin 2025

Temps de lecture : 5 min

Muriel Pleynet : « La crédibilité de franceinfo vient davantage de nos journalistes et reporters que de nos experts et invités » 

franceinfo, qui fermait la marche de la TNT sur le canal 27, va désormais boucler le bloc info sur le numéro 16. La chaîne publique en a profité pour afficher plus clairement son identité et ses valeurs, qui s’appuient sur les faits, les retours du terrain et le pluralisme de l’information. Détails avec Muriel Pleynet, directrice de franceinfo et directrice adjointe de l’information de France Télévisions.

INfluencia : franceinfo migre le 6 juin 2025 du canal 27 au numéro 16 et sera la seule chaîne publique du bloc info. En quoi cette caractéristique a-t-elle guidé vos réflexions dans les évolutions à venir ?

Muriel Pleynet : en tant que chaîne du service public, franceinfo a vocation à s’adresser à tous les publics. Elle se doit d’être une chaîne généraliste et pluraliste, qui traite de tous les sujets et de toutes les actualités, où tous les points de vue sont représentés… Elle est aussi la chaîne des débats de société et de tous les débats. franceinfo n’a aucune vocation à être monothématique, ni une chaîne d’opinion. Son ADN, ce sont les faits et le terrain. Nous voulons aussi donner les clés de compréhension de l’actualité avec, en plateau, davantage d’acteurs de terrain que de commentateurs. Un important travail doit donc être fait sur la programmation des invités pour proposer un maximum d’expertise. La toutologie est devenue un sport national sur les chaînes d’info et c’est tout ce que l’on veut éviter chez nous. Nos journalistes et envoyés spéciaux restent nos premiers relais du terrain et sont les plus à même de faire remonter les faits dans leurs reportages. Le public ne s’y trompe pas puisque les études qualitatives montrent que la crédibilité de la chaîne vient davantage de nos journalistes et reporters que nos experts et invités.

franceinfo se doit d’être une chaîne généraliste et pluraliste, la chaîne des débats de société et de tous les débats.

IN : la réintroduction de journaux à l’heure fixe et le rappel des titres à la demi-heure sont une des grandes évolutions…

M.P. : nous généralisons sur l’ensemble de la grille ce qui se fait déjà sur la matinale car, sur une chaîne info, le téléspectateur vient d’abord chercher de l’information. Cette articulation permettra de traiter toute l’actualité et d’avoir des choix plus affirmés et plus anglés dans le développement des sujets. Les différentes tranches seront mieux identifiées avec une tonalité adaptée au moment de la journée : l’actualité brute dans les matinales semaine et weekend, qui fonctionnent bien et n’évolueront qu’à la marge, l’analyse en matinée avec L’info s’éclaire puis un prisme sur l’information de proximité à partir de 11 heures, le live entre 14 et 18 heures… Le 18h-20h, centré sur le décryptage, a été prolongé le weekend depuis déjà quelques semaines. La tranche 21h-23h, incarnée par Loïc de La Mornais, a été redéfinie autour du reportage et du terrain pour mettre en avant cette richesse d’informations qui remonte des journalistes de retour du terrain.

La toutologie est devenue un sport national sur les chaînes d’info et c’est tout ce que l’on veut éviter sur notre antenne.

IN : vous avez pris la direction de la chaîne en mars dernier, après deux incidents d’antenne intervenus début 2025, qui ont ébranlé la rédaction et pu atteindre la confiance du public. En quoi cela a-t-il pesé sur l’approche de la nouvelle équipe de direction ?

M.P. : quand on fait 18 heures de direct par jour, 7 jours sur 7, personne n’est à l’abri d’un incident, nous pas plus mais pas moins que les autres. Nous avons revu toute l’organisation de la rédaction en chef pour tirer les enseignements de ce qui s’est passé. Des verrous ont été mis en place pour limiter ces risques. La chaîne, qui s’appuie sur des bases et des fondamentaux solides, a maintenant besoin de stabilité. Ce que nous mettons en place le 6 juin restera à l’antenne à la rentrée et d’autres nouveautés arriveront à partir du 26 août.

La chaîne s’appuie sur des bases et des fondamentaux solides. Elle a maintenant besoin de stabilité

IN : franceinfo stagne à 0,8 % de part d’audience, à la dernière place des chaînes info. Quels sont les objectifs d’audience associés à cette remontée dans la numérotation ?

M.P. : le passage au canal 16 devrait permettre mécaniquement de faire progresser l’audience mais dans des proportions difficiles à évaluer. Plus que la part d’audience mesurée par Médiamétrie, pénalisée notamment par nos performances du weekend, c’est la couverture qui nous intéresse et qui, elle, n’a jamais cessé d’augmenter. Chaque jour, 5,3 millions de téléspectateurs passent sur franceinfo et nous espérons pouvoir porter leur nombre à 7 millions. Les journaux et les rappels de titres peuvent faire venir un public plus jeune. Nous devons aussi attirer davantage les CSP-. Sur le numérique et sur les réseaux sociaux, la marque et la chaîne peuvent aussi être davantage mises en avant.

Chaque jour, 5,3 millions de téléspectateurs passent sur franceinfo et nous espérons pouvoir porter leur nombre à 7 millions

IN : dans quelle mesure l’absence de publicité est-elle un atout pour faire venir le public vers la chaîne, notamment sur les grands carrefours d’audience ?

M.P. : c’est déjà un élément différenciant par rapport aux autres chaînes info et il n’y aura sur ce point rien de nouveau. Avec la proximité des chaînes au sein du bloc info, le téléspectateur qui zappe pendant que les autres chaînes diffusent de la publicité pourra peut-être mieux découvrir notre offre et l’apprécier.

IN : franceinfo est une marque d’information globale radio, télé et digitale, mais aussi transversale entre France Télévisions et Radio France. Cette transversalité, qui s’exprime déjà à l’antenne, est-elle aussi amenée à évoluer ?

M.P. : la transversalité avec la radio s’exprime déjà avec l’interview politique de 8h30 et Les Informés, diffusés matin et soir, Les informés de l’Europe et Les informés de l’éco. Nous réfléchissons à de nouveaux rendez-vous communs qui arriveront probablement à la rentrée.

IN : dans le projet qu’elle a défendu auprès de l’Arcom avant d’être renouvelée pour un troisième mandat comme présidente de France Télévisions, Delphine Ernotte voulait faire de franceinfo le « pivot » de l’offre d’information en continu du groupe sur tous les canaux, avec aussi pour mission de prendre de vitesse les vérités alternatives. Comment cela va-t-il se concrétiser et à quelle échéance ?

M.P. : il y a dans ce projet une volonté clairement affichée que franceinfo devienne le hub de l’info du groupe, ce qui passera par davantage de collaborations et de transversalité et dépendra aussi des disponibilités des différentes rédactions. La lutte contre la désinformation est un travail au quotidien, sur lequel différentes équipes travaillent déjà ensemble et interagissent. Il est engagé de longue date sur franceinfo avec l’émission hebdomadaire Vrai ou faux. Désormais, cette équipe travaillera chaque jour dans le 18h-20h à démonter de fausses informations. C’est aussi une pratique bien installée à la rédaction nationale de France Télévisions avec L’œil du 20 heures qui fait du fact-checking mais aussi avec Les Révélateurs, qui ont un rôle fondamental. Leurs équipes analysent toutes les vidéos que l’on peut trouver – pas une image de vidéo ne passe à l’antenne sans avoir été traitée par eux – ce qui est d’ailleurs un gros sujet du fait du développement de l’intelligence artificielle.

Pour accompagner le passage sur le canal 16, une campagne de publicité signée Jésus et Gabriel est déployée du 4 au 18 juin 2025, à l’échelle nationale et sur les réseaux sociaux. Elle valorise l’engagement de la chaîne en faveur d’une information en continu de service public et affirme son positionnement éditorial autour d’une information fondée sur les faits et issue du terrain. Elle met en scène des journalistes et reporters maison : Ben Barnier, Dorothée Olliéric et Lucie Chaumette (en haut), Marc de Chalvron, Maryse Burgot et Loïc de la Mornais (en bas).

En savoir plus

franceinfo en quelques chiffres
La chaîne a été lancée le 1er septembre 2016 à l’initiative de France Télévisions, Radio France, France Médias Monde et l’INA.
En mai 2025, elle affichait une part d’audience de 0,8 % et une couverture mensuelle de 25,567 millions de téléspectateurs.
4,5 millions de personnes consultent chaque jour la marque sur son site ou son application.
franceinfo compte 8 millions d’abonnés sur les réseaux sociaux.
Sur la TNT, 6 heures d’antenne sont sous-titrées à l’antenne en langage des signes et la chaîne propose trois JT en langue des signes française (LSF).

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