14 décembre 2011

Temps de lecture : 2 min

La mort, la technologie et le mythe

L’évolution des techniques et la technologie nous ont permis d’approcher un tel degré de perfection que nous n’avons jamais été aussi proches de l'image que les anciens se faisaient des dieux. Pourtant nous sommes toujours aussi vulnérables. Jusqu’à ce que la mort elle-même disparaisse? Par Thomas Jamet...

Nous sommes des êtres humains, une espèce qui n’a pas changé depuis les origines. Nous naissons, nous mourons. Malgré les énormes progrès de la science nous sommes toujours aussi vulnérables.

La mort est un élément instinctif. Nous n’avons jamais appris nos comportements primaires : survie, nutrition, reproduction. Cela est naturel, instinctif et nous savons tous que nous mourrons un jour. Dès que l‘homme a eu conscience de sa mortalité, il a imaginé un récit pour l’accepter. C’est de là qu’est née notre capacité d’êtres humains à créer des imaginaires. Carl Gustav Jung l’a appelé «inconscient collectif». Il le voyait comme un ensemble de récits et de symboles qui se diffusaient de génération en génération et qui ont constitué un socle commun à toute l’humanité, au-delà des frontières et des âges.

Chaque génération y apportait sa contribution et les réinterprétait à son tour. Mais le fond restait le même. C’est cette certitude de la mort qui a entraîné ce phénomène mythologique. Le besoin de créer des imaginaires et la capacité de notre cerveau à inventer des histoires nous est venu du plus profond des âges, de la prise de conscience de la mort, et de la mortalité des guerriers au combat ou à la chasse. Pour se rassurer et donner un sens à la vie, et à la mort, l’homme a créé les mythes.

Cet instinct nous a depuis toujours poussés à générer instinctivement des histoires nous faisant vivre intensément, nous faisant ressentir des émotions qui nous rappellent que nous sommes en vie. Ces récits représentent une «sortie du temps». Mircea Eliade a développé ce concept dans Aspects du Mythe en 1963: la narration nous permet de « sortir du temps historique et personnel, et d’être plongé dans un temps fabuleux, transhistorique». Le lecteur d’un roman est par exemple ainsi « confronté à un temps étranger, imaginaire, dont les rythmes varient indéfiniment car chaque récit à son propre temps, spécifique et exclusif ». C’est le même ressort pour le mythe.

C’est là qu’interviennent les utopies transhumanistes: et si un jour la mort venait à disparaître, quelle survivance pour les mythes? Le fait mythologique étant concomitant du sentiment de mortalité, que deviendrait le besoin de se sentir vivant si nous pouvions être immortels? Ressentirions-nous toujours le désir de nous raccrocher à une quelconque transcendance? Que deviendrait le sentiment religieux? Les mythes existeraient-ils toujours? Ces débats seront tranchés dans les années et les siècles à venir. Nos enfants et petits enfants seront très certainement témoins de ces avancées, ou de ces reculs. En attendant, Memento Mori.

Thomas Jamet – NEWCAST – Directeur Général / Head of Entertainment & brand(ed) content, Vivaki (Publicis Groupe)
www.twitter.com/tomnever

Thomas Jamet est l’auteur de « Ren@issance Mythologique, l’imaginaire et les mythes à l’ère digitale » (François Bourin Editeur, en librairie le 15 septembre). Préface de Michel Maffesoli.

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