4 octobre 2017

Temps de lecture : 3 min

Les millennials sont-ils vraiment prêts à devenir moches ?

Quels que soient les secteurs ou l’industrie, les marques rivalisent pour paraître plus naturelles… #NoFilter vous dit-on ! Mais les millennials visés par ces campagnes sont-ils réellement dupes des stratégies marketing mises en place par ces marques ?

Quels que soient les secteurs ou l’industrie, les marques rivalisent pour paraître plus naturelles… #NoFilter vous dit-on ! Mais les millennials visés par ces campagnes sont-ils réellement dupes des stratégies marketing mises en place par ces marques ?

La haute-couture est un terrain d’essai particulièrement fertile en l’espèce : c’est ici que sont élaborés les codes et conventions de la beauté qui vont être suivis pendant la prochaine saison. Ici, point d’amateurisme. Peu d’imparfait. Du style. De l’élégance. De l’exclusif… Mais ça, c’était avant la déferlante d’authenticité qui a marqué la communication depuis deux ans.

La maison Diesel a marqué un grand coup lors de sa campagne automne-hiver 2017-2018. « Go with the flaw » (en français « Avance avec tes défauts ») célèbre l’imperfection à travers un court-métrage qui met en scène des mannequins différents et uniques. Le directeur artistique de Diesel, Nicola Formichetti explique: « Etre unique est beaucoup plus beau qu’être parfait. Il faut changer sa manière de voir les choses, transformer le négatif en positif, surmonter les obstacles et ses craintes ».

A cent lieues des banques d’images et de leurs sourires artificiels, des canons de beauté déclinés campagne après campagne sans qu’aucun attachement à la marque n’en découle, les consommateurs se sentiraient désormais plus proches des marques et des mannequins qui assument leurs défauts, cela leur confère un sentiment d’authenticité et de vérité.

Ces communautés qui rejettent les institutions

Problème de légitimité, followers désabusés, contenus trop lisses ou marketing apparent… Les grands influenceurs aux communautés millionnaires ont souffert depuis, qu’en février 2017, une étude produite par Hello Society Data et Media Post a mis en lumière que les micro-influenceurs aux communautés de moins de 30 000 followers généraient un taux d’engagement de plus de 60% supérieur aux comptes très populaires, pour des coûts bien moins élevés… quand il y a des coûts.

En effet, le lien entre ces influenceurs et leur communauté serait plus direct, plus personnalisé, moins industriel. Quand ils prennent la parole, ils sont moins suspectés de connivences commerciales… Ils échappent aux méfiances provoquées par le marketing, et leur discours, souvent moins rodé aux codes commerciaux, paraît plus authentique… jusqu’à ce que leur communauté devienne trop importante, et que sa gestion leur échappe… qu’ils deviennent à leur tour de gros influenceurs à la prise de parole douteuse.

Ces magasins qui se piquent d’authentique

Mais cette tendance de fond qui parle de goût de l’authentique et d’imperfections magnifiées… Comment peut-elle vivre en point de vente ? Le lieu où l’expérience se doit d’être la plus fluide et professionnelle ?

Bois, lumières, ambiances, expériences uniques ou cachées, mobilier savamment usagé, tout concourt à traduire ces signes depuis l’univers de la communication jusque dans le commerce… Tant que ces signes ne nuisent pas à l’expérience, mais la renforcent, l’amplifient, lui donnent un nouveau sens. Ainsi, le nouveau concept de magasin de l’Occitane, ou le flagship Starbucks de Seattle, immergent radicalement le client dans une boutique résolument plus authentique, débarrassée des nombreux codes propres aux magasins plus classiques, afin d’offrir une expérience toujours plus pure. Loin des enseignes, ou parfois en leur sein, l’heure est aux concepts-stores expérientiels, comme la différence spécifique du retail physique face à l’ascension inéluctable du e-commerce.

Tendance : les marques cultivent leur effet décoiffé

Plus qu’un simple effet de mode, cette glorification des imperfections dans le discours de marque comme dans le parcours client sonne le glas d’une certaine forme de standardisation des objets. Le système des objets si cher à Baudrillard est ainsi remis en cause, non sur le fond (l’objet comme le désir d’objet fait toujours écho à un statut social), mais sur le fait que l’excellence de ce statut lié à l’objet naît désormais de son unicité, de son authenticité.

En présentant des produits uniques, des communications rampantes savamment orchestrées pour créer un bouche-à-oreille vertueux, ou en se démarquant violemment des différents paradigmes d’un secteur, les marques peuvent ainsi se créer une façade d’amateurisme qui viendrait rassurer le consommateur dans le discours, tout en assurant la qualité d’un parcours client fluide à laquelle le client est habitué et de laquelle, paradoxal, il ne saurait se défaire…

Car cet amateurisme, cet amour de l’authentique et de l’imparfait ne prend son sens entier que dans la mesure où il n’est que symbole, image. Mais s’il doit s’étendre dans le parcours client, dans l’expérience, comme dans la qualité de service, alors le consommateur ne suit plus. Si dans les signes émis par la marque, il goûte l’imperfection et une posture plus humaine, dans son expérience de marque, il s’attend à une expérience parfaite et personnalisée. Parce qu’il le vaut bien, tout de même.

What If :

Et si un média d’information voulant démontrer qu’il n’embellit jamais ses informations mettait particulièrement à l’honneur des comptes Instagram qui n’utilisent ni filtres ni mises en scène standardisées ?

Et si un opticien proposait des montures sur-mesure s’ajustant à la morphologie du consommateur dans une optique d’artisanat et d’ultra-personnalisation ?

Et si un programme relationnel proposait des rewards de très faible qualité afin que celui qui y adhère comprenne que sa vraie récompense consiste dans le service qui lui sera proposé en tant que tel ?

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