6 août 2012

Temps de lecture : 5 min

Le marketing de contenu aux JO : hypocrisie ou réinvention?

Coca, McDo, BMW... Entre idéalisme et opportunisme, les Jeux Olympiques demeurent pour les marques un véritable terrain d'expression. Un lieu unique où le discours marketing s'oppose à l'esprit des jeux sans pour autant être vraiment remis en question... Analyse d'un paradigme imposé par Franck Monsauret.

Même si l’Euro de football a pris fin il y a tout juste un mois, le télé-consommateur ne se rappelle probablement pas de plus d’un ou deux spots diffusés lors de cette édition 2012. Ces séquences de quelques secondes, à l’écho si puissant pour le monde de la publicité, ne représentent en fait que des instants fugaces pour les fêtards et les amoureux du ballon rond.

À l’inverse, les Jeux olympiques de 2012 offrent une vitrine de deux semaines et demie pour captiver et attirer les consommateurs du monde entier. Avec pléthore de thèmes marquants et positifs autour des jeux (effort, esprit d’équipe, fair-play, vie saine, unité dans le monde, paix et bien d’autres), ces 17 jours de compétitions constituent la période idéale pour permettre aux marques de construire (ou reconstruire) leur réputation mondiale et l’attrait des consommateurs.

Les JO, Terre Promise du marketing depuis près d’un siècle

Comme le rapporte le site Olympic.org, depuis les débuts des Jeux modernes en 1896, les marques ont fait de l’événement une opportunité de campagne publicitaire. Lors des jeux d’Anvers en 1920, des sociétés ont obtenu la permission d’intégrer des publicités dans le programme. En 1964, lors des Jeux de Tokyo, ce sont 250 entreprises qui ont établi des partenariats marketing avec les JO, notamment pour du tabac, générant ainsi plus d’un million de dollars via la marque de cigarettes Olympia (voir plus loin d’autres partenariats étonnants…) Durant les jeux de 1994 à Lillehammer, les programmes télévisés et de marketing ont rapporté plus de 500 millions de dollars.

Grâce à l’essor des médias sociaux et du marketing de contenu, les stratégies de marketing olympique actuelles permettent aux marques de s’aligner sur les Jeux afin de se rapprocher des consommateurs de la façon qui leur semble la plus appropriée. Cette année, plusieurs grandes marques ont déclenché une petite controverse en essayant d’utiliser l’esprit positif et l’énergie de l’événement pour réinventer leur image aux yeux du monde.

Un esprit (mal)sain dans un corps sain ?

Pour Coca-Cola, partenaire olympique depuis les Jeux d’Amsterdam de 1928, les Jeux de 2012 sont l’occasion de plaider pour un mode de vie sain. La campagne « 8-Pack » de Coca-Cola met en avant 8 athlètes olympiques jouant le rôle d’« ambassadeurs d’une vie active ». Cette campagne inclut des spots racontant le triomphe de chaque sportif et s’accompagne de prix personnalisés encourageant une bonne santé et une activité physique. Elle sera diffusée en même temps que la campagne « Move to the beat » (Bougez en rythme), qui propose une application permettant au consommateur de créer son propre rythme à partir de ses goûts musicaux et sportifs ainsi qu’un documentaire d’une heure sur la création de l’hymne olympique par le producteur britannique Mark Ronson.

McDonald’s profitera également des Jeux de 2012 pour se positionner en champion du bien-être. En plus d’avoir créé le plus grand restaurant McDonald’s du monde sur le site, la chaîne de fast-food offrira des Happy Meals proposant des plats sains et utilisera des produits frais provenant de fermes britanniques et irlandaises. Pour soutenir le développement durable, l’entreprise réaffectera chacun des quatre restaurants olympiques dans ses autres établissements britanniques après la fin des Jeux. Outre cette démarche pour un mode de vie sain, McDonald’s enverra des équipes filmer les réactions spontanées des fans lors des Jeux. De plus, elle permettra aux internautes de télécharger leurs propres vidéos et photographies sur Facebook, dont une partie du contenu sera réutilisée pour une chronique à la fin de la compétition.

Les campagnes des sponsors Coca-Cola et McDonald’s se sont attiré un certain nombre de critiques en raison de leur hypocrisie. Jacques Rogge, président du Comité international olympique, a récemment reconnu que le CIO s’était interrogé sur la place de Coca-Cola et McDonald’s et de leurs produits néfastes pour la santé en tant que partenaires des JO. Malgré ce tollé, qu’on le considère justifié ou non, ces campagnes reflètent habilement l’esprit des Jeux : faire d’un travail acharné et d’une vie saine une opportunité de se réinventer.

Créer la controverse ou choisir la continuité

BMW se servira des Jeux olympiques pour s’afficher comme industriel leader des technologies de pointe. Avec les scientifiques du sport du comité olympique américain, le constructeur a établi une assistance technologique et financière pour aider les athlètes de saut en longueur à suivre leur vitesse verticale et horizontale et leur angle de saut grâce à des capteurs, comme le rapportait en avril le Wall Street Journal. Ce partenariat a récemment attisé la colère des médias. Le Guardian a ainsi reproché à BMW l’hypocrisie d’« exercer un lobby pour atténuer les projets européens d’amélioration de la consommation de carburant des véhicules tout en mettant en avant ses actions écologiques », après que le constructeur automobile a dévoilé les 4 000 voitures « vertes » destinées à assurer le transport lors des Jeux de Londres. Un compte-rendu interne de BMW obtenu par le journal souligne « l’opposition [de l’entreprise] aux propositions de la commission européenne pour une limitation plus stricte des émissions de carbone ».

La marque sponsorise également en France la « Team BMW Performance » composée de sept champions dans sept disciplines olympiques. Selon la marque, « A l’image des équipes BMW, ces athlètes de haut niveau sont dans une quête constante de la performance ultime au quotidien, afin de se rapprocher d’une attitude et d’un mental optimal, d’un geste toujours plus efficace, moins consommateur d’énergie, pouvant être répété d’innombrables fois ». [2] Plus classique, ce partenariat entraîne évidemment aussi moins de controverse…

Comme les campagnes de Coca-Cola et McDonald’s, BMW a suscité cette année suffisamment de commentaires pour que leur impact perdure bien au-delà des jeux de 2012. Que l’on croie ou non à l’hypocrisie du contenu de la marque, des partenariats ou des produits, BMW a réalisé des supports marketing et des produits de partenariat de qualité qui se sont placés au cœur des questions marketing des Jeux. Pour vous en convaincre, souvenez-vous de la dernière fois où vous avez lu un article qui mentionnait BMW autrement qu’en tant que constructeur automobile ou même fabricant de produits technologiques.

Toutes les marques ne décident pas de se réinventer – et de déclencher, par inadvertance ou intentionnellement, une controverse. Au lieu de chercher à se rajeunir, Procter & Gamble (P&G) a choisi d’adapter son marketing autour des Jeux : tandis que la majorité des marques ont choisi de se concentrer sur les stars des Jeux, les athlètes eux-mêmes, P&G s’intéresse à leurs mères. La campagne raconte l’histoire de plusieurs mamans de champions olympiques, et ce à quoi elles ont fait face pour élever leurs prodiges. La campagne cible le public de P&G, la mère de famille d’âge moyen, tout en reconnaissant et en s’alignant sur le pouvoir de la compétition olympique. Une méthode éprouvée (et non controversée), revue et corrigée par P&G (voir vidéo ci dessous).

 Franck Monsauret, Country Manager France d’Outbrain

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