21 novembre 2022

Temps de lecture : 4 min

Hommage à Marie Catherine Dupuy et l’intelligence créative de campagnes remarquables

Hommages en tout genre, reconnaissance de créatifs qui ne seraient pas là sans elle, témoignages admiratifs de filles et de garçons qui sont passés par BDDP, remerciements éternels d’artistes auxquels elle permettait de s’exprimer. Le microcosme publicitaire, et ses satellites composés de producteurs, photographes, réalisateurs, post-producteurs, ont chacun à leur manière, une explication au système Marie-Catherine Dupuy.

Pour son premier film signé BDDP Marie-Catheine Dupuy n’hésite pas à faire appel à Jean-Jacques Annaud. (Franco American). «Nous avions à cœur de réaliser une publicité intelligente et extrêmement bien “craftée”, explique Marie-Catherine Dupuy dans le blog de Nicolas Bordas. Une mauvaise voix off à la fin d’un film, ça torpille une campagne». L’agence fait appel aux plus grands réalisateurs: Jean-Jacques Annaud (Hertz), Jean-Paul Goude (BNP)… «Marie-Cath nous disait toujours : quand on est à 90%, il reste la moitié du chemin, se remémore Natalie Rastoin, ex-vice-présidente de BDDP, toujours sur ce blog . Mais surtout, la création de valeur naissait de l’alliance permanente entre la stratégie et la création».

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Olivier Altmann

Il y avait cette flamboyance de BDDP que toute cette profession jalousait. La puissance du gourou publicitaire Jean-Marie Dru. Boulet, le grand patron de la finance. Petit, l’homme de terrain et de l’influence, et Marie-Catherine qui dirigeait d’une main de fer, et à la fois veillait sur des super teams de directeurs de création tels que Philippe Pollet-Vilard, Rémi Babinet, Antoine Choque, Pascale Chadenat, Pierre Gauthronet, et j’en oublie… Et dans chaque team de DC il y avait des créatifs, Bruno Delhomme, Robin de Lestrade, Eric Hollander, Thierry Lebec, moi-même et là aussi j’en oublie. Tout cela pour dire qu’elle dirigeait « militairement » entre 200 et 300 créatifs dont les seconds étaient indéfectibles, ainsi que les juniors qui se battaient pour en être. Je dirai aussi qu’à une époque où des agences créaient dans un joyeux bordel, nous, nous étions structurés, travailleurs, carrés, joyeux, fiers aussi.

Le lanceur de couteaux, (Wanda)

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Patrice Haddad

Je venais de créer Première Heure la même année, et c’est elle qui m’a permis de lancer mes photographes qui n’avaient jamais réalisé en pub. Lorsque je débarquais à l’agence avec mes « poulains », j’étais face à une Marie-Catherine Dupuy qui en imposait et à une Evelyne Luverdis, sa complice qui était intraitable, et croyez-moi ça ne rigolait pas. C’était la grande classe de travailler pour BDDP. Mon premier film là-bas? « Elles assurent en Rodier » en 1985 avec Ralph Parsons. Le tendance était lancée!

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Anne de Maupeou

Quand j’ai commencé, je l’ai immédiatement prise pour modèle. Parce qu’on on était proches (je travaillais avec son mari et moi avec le sien)… et parce que c’était quasiment la seule femme dans ce milieu. Que ce soit parmi les dirigeants, ou parmi les créatifs.

Et d’ailleurs Marie Cath c’était un vrai mec, sous sa sensibilité exacerbée et ses apparences de poupée. Telle un vrai mec, elle prenait part aux joutes entre « mâles alpha » comme elle les appelait, mais elle avait in fine une manière à elle de gagner ses combats, parce qu’elle avait un grand sens de l’humour, et du ridicule.

La pub à la fin du 20eme siècle, c’était beaucoup de luttes de pouvoir, et de combats de coqs, et elle savait parfaitement comment manipuler tout ça. Elle militait bien sûr pour qu’il y ait plus de femmes dans notre profession, tout en étant quand même assez fiérote d’être la seule petite nana, qui tenait la dragée haute à tous les mecs.

Elle défendait comme une louve ses créatifs et leurs idées contre la terre entière. Eux aussi étaient quasi tous des hommes, passionnés, souvent entiers et insolents, comme mon mari qui se serait fait virer 100 fois sans son soutien indéfectible. Elle n’avait pas non plus l’ego surdimensionné de certains de ses pairs. C’est elle qui m’avait expliqué qu’il ne fallait pas hésiter à s’entourer de créatifs beaucoup plus talentueux que soi, et que ça n’empêchait pas de les diriger.

C’était aussi la première à accorder autant d’importance au planning stratégique. C’était une grande créative, mais surtout une grande directrice de création, excellente « enabler » rendant possible dans la merveilleuse agence qu’était BDDP beaucoup des campagnes cultes de l’époque, des campagnes de nature et de forme très diverses, de SNCF « le progrès ne vaut que s’il est partagé par tous » à Tag Heuer « Don’t crack under pressure ».

Virgin Megastore « on ne fera jamais assez de place à la musique ».

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Eric Tong Cuong

Je me souviens que l’image de la femme était si planplan à l’époque que l’on se voyait mal faisant un défilé de vêtements pour décrire les changements de tenues que les femmes pouvaient adopter grâce aux 3 Suisses. Marie-Catherine appelle en renfort Bertrand Blier comme rédacteur et réalisateur en fin de compte et lui propose de trouver l’idée choc. « Raoul, j’ai embouti ta voiture » nait en 1991. Le switch est si fort entre la femme séductrice et celle qui s’essaye à expliquer comment elle a embouti la voiture de Raoul et ça le fait à fond!

 

Pour Bic, Marie-Catherine est totalement avangardiste. Lorsqu’elle s’empare du sujet rasage pour la marque culte, c’est un homme noir qui se rase, embrasse sa petite fille avant d’aller au boulot, et cette dernière qui lui souffle sans se retourner « bonne journée maman » tant sa peau est douce, poursuit Eric Tong Cuong.C’est incroyable…

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Extraordinaire spot, Le sein, Airbag BMW réalisé par Gil Bauwens (Wanda)

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« 1664. Le plus grand numéro qu’une bière puisse vous faire. » Les campagnes jouent alors avec les chiffres 1664 (qui correspondent très exactement à la date de fondation de la première brasserie Kronenbourg), empruntent les codes du luxe, flirtent avec un certain élitisme… Tout en se plaçant sous le signe du choc des cultures, avec cette confrontation canaille d’une bière collet monté et d’un skinhead, à des années lumière de la figure populaire du consommateur accoudé au zinc d’un bistrot. Confrontation destinée, d’évidence, à offrir une singularité voire une excentricité à la marque, dans une logique créative très « british »…

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1664 le plus grand numéro qu’une bière puisse vous faire (1989)

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Elles assurent en Rodier

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En savoir plus

1984 : création de BDDP par Jean-Claude Boulet, Jean-Marie Dru, Marie-Catherine Dupuy et Jean-Pierre Petit.

1985 : BDDP remporte McDonald’s, Mazda Motor Group et Michelin, puis BMW, KLM et Porto Cruz en 1986.

1987 : conception de la campagne de privatisation de Suez avec un spot mettant en scène Catherine Deneuve

1987 : quatrième groupe publicitaire en France après Havas, Publicis et RSCG.

1990 : rachat de Wells Rich Greene, troisième agence de New York

1991 : après la fusion de Havas et Euro RSCG, troisième groupe en France

1998 : rachat de l’agence par Omnicom, qui la fusionne avec TBWA. En 2000, BDDP-TBWA est le quatrième groupe de publicité français

2001 : BDDP-TBWA devient TBWA Paris, une division de TBWA France.

Nicolas Bordas

La croissance organique de l’agence est fulgurante, la plus forte jamais connue en 10 ans en France et même en Europe, faisant de BDDP la troisième agence française avec plus de 1300 personnes employées. Une agence devenue un groupe de communication diversifié dans tous les domaines de la communication avec la communication corporate (Compagnie Corporate qui deviendra TBWA\Corporate), la communication événementielle (Auditoire), promotionnelle (Tequila) ou la production graphique (Question d’Edition qui deviendra E-Graphics), entre autres.

 

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