26 mai 2022

Temps de lecture : 3 min

L’inclusivité, nouvelle condition humaine des marques

On prend jour après jour mieux conscience de la responsabilité sociétale des marques. Leurs publics ont parfois pour elles une confiance dont les politiques peuvent être jaloux. Aimées, suivies, écoutées, elles sont fort influentes, mais gare aux partis pris ou prises de parole qui pourraient froisser, les citoyens-consommateurs peuvent être aussi sans merci. Le sujet touchy et cas d’école du moment : l’inclusivité. Comment les marques traitent-elles le sujet ? Cet article est tiré de la revue INfluencia, numéro 39, intitulée Pouvoir contre pouvoirs et influences.

inclusivité

Dans le contexte du mouvement Black Lives Matter (« les vies noires comptent »), survenu après qu’un Afro-Américain George Floyd est mort lors de son arrestation par des policiers blancs en 2020, plusieurs fabricants de cosmétiques ont été critiqués sur leurs produits éclaircissants pour la peau, les poussant à modifier leur identité visuelle, par trop chargée de stéréotypes raciaux. Le groupe de cosmétiques Unilever (Dove, Axe…) a ainsi décidé, en mars 2021, de bannir le terme « normal » de ses publicités et packagings et s’est engagé à « façonner une définition plus inclusive de la beauté ». L’année précédente, il avait rebaptisé sa crème éclaircissante Fair & Lovely (« claire et jolie ») vendue en Inde. Dans la foulée, L’Oréal annonçait la disparition des mots « blanc », « blanchissant » et « clair » sur les emballages de ses produits de beauté.

Les marques font l’objet de toutes les attentions sur un marché où les consommateurs sont devenus très attentifs à leurs valeurs et pratiques, en particulier aujourd’hui sur l’inclusivité. Un concept pas nouveau, mais qui connaît un essor et une forte médiatisation (notamment sur les réseaux sociaux) ces dernières années. Il signifie inclure tout le monde, en intégrant les notions de sexe, âge, origine et handicap… L’idée étant de prévenir et lutter contre la discrimination et/ou la stigmatisation des minorités. Comment aborder ce phénomène ? « Il y a un paradoxe sur la question de l’inclusion – l’émergence et la revendication des identités – entre la réalité démographique de la diversité culturelle française et une revendication du fait que ce soit une marque qui porte cette transformation sociétale, et non plus la société en elle-même, les pouvoirs publics et/ou les médias. Ce discours de l’inclusivité est opérationnel, depuis une dizaine d’années, chez les marques devenues le miroir de la société. Celles-ci ont une capacité de transformation beaucoup plus avérée, elles sont en avance, rendant les institutions maladroites avec ce sujet », expose le sociologue Stéphane Hugon, cofondateur et dirigeant du cabinet Eranos.

Sincérité ou opportunisme ?

Et comment les marques appréhendent l’inclusivité ? « Sur la forme, à travers la représentativité qui est le reflet de la société, mais aussi le fond, en ayant les preuves de leurs propos. Certaines vont même au-delà en traitant le sujet comme un combat avec des prises de position », expose Céline Chouéri, directrice générale adjointe en charge du planning stratégique chez Altmann+Pacreau. À l’image de Camaïeu, qui s’engage pour les femmes victimes de violences conjugales aux côtés de l’association Solfa. La marque de prêt-à-porter a mis en place une campagne signée Buzzman (janvier 2022) pour faire connaître et rappeler le numéro (3919) d’écoute de la Fédération nationale Solidarité Femmes. Le dispositif e-commerce mettait en scène certaines collaboratrices transformées en « modèles » portant les stigmates de violences et faisait figurer le 3919 en place du prix produit. Dans les magasins, les équipes revêtaient un tee-shirt (en vente) aux couleurs du numéro. « L’inclusivité est un enjeu de cohérence et de sincérité. Les marques doivent aligner leur discours à leurs actions tant au niveau de la communication que du corporate ou du recrutement. Cela signifie être exemplaire pour ne pas paraître opportuniste. Nous notons une évolution positive en ce sens ces dernières années en France. Certaines entreprises inscrivent même l’inclusivité dans leur raison d’être. La marque Naturalia, par exemple, met au centre de ses décisions et ses actions la nature et l’humain. Les consommateurs sont dans cet état d’esprit et plébiscitent les marques construites sur ces valeurs. » Ce que confirme Fanny Camus-Tournier, directrice du planning stratégique chez Ogilvy Paris : « Les jeunes décryptent les messages, ils sont sensibles aux marques qui prônent l’inclusivité. Leur crédibilité passe par une prise de position ou/et un engagement fort. L’inclusivité n’est d’ailleurs plus un argument de différenciation, mais bien un contrat de base. » N’en demeure pas moins que si l’inclusion s’inscrit dans le marketing, la communication et les ressources humaines, dans les faits, toutes les marques ne travaillent pas encore tous ses aspects, indispensables pour faire grandir la société.

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