23 septembre 2025

Temps de lecture : 4 min

Ligue des droits de l’Homme : une campagne choc face à la montée des extrêmes droites

Face à l’inquiétante poussée des extrêmes droites dans le monde, la Ligue des droits de l’Homme (LDH) lance une campagne d’affichage nationale conçue par l’agence Madame Bovary. Son objectif ? Alerter l’opinion sur l’urgence de défendre l’État de droit et les libertés fondamentales, et mobiliser les citoyens à l’approche des échéances électorales de 2027.

Partout sur la planète, l’heure est à l’alerte démocratique.

« On est dans un bouleversement mondial, notamment depuis ce second mandat de Donald Trump. Cela concerne beaucoup de pays, mais aussi la France, comme on l’a vu avec les dernières élections et l’instabilité politique », annonce d’emblée Pierre-Antoine Cazau, co-secrétaire générale de la LDH, qui a pris part à l’élaboration de cette campagne.  

De Trump aux États-Unis à Poutine en Russie ou Netanyahou en Israël, la montée des extrêmes droites au pouvoir s’accompagne d’une propagation de la loi du plus fort, au détriment de la démocratie. La France n’est pas épargnée : 

« l’extrême droite y exploite les fractures sociales, économiques et politiques pour remettre en cause l’égalité en droits et les libertés publiques », poursuit Maître Cazau.

En Europe, des partis d’extrême droite siègent désormais dans près d’un quart des gouvernements des 27 États membres de l’Union européenne, entraînant partout un affaiblissement des contre-pouvoirs démocratiques, notamment la liberté de la presse et l’indépendance de la justice.

Dans ce climat, les États-Unis, soit « la plus grande démocratie du monde » selon la formule consacrée, vacille plus que jamais :

« Elle est plus que fragilisée, elle est attaquée. Elle n’est pas encore tombée, heureusement, mais cela doit nous alerter : il faut tout faire dès maintenant pour empêcher que le pire n’advienne », s’inquiète le co-secrétaire général de la LDH.

Impossible pour la LDH de rester sidérée face à ces signaux alarmants : « C’est pour cela que nous avons lancé cette campagne : pour dire au contraire, agissons, nous avons les moyens, utilisons-les avant qu’il ne soit trop tard. Il faut réagir vite et fort ». Un impératif d’action préventive qui a poussé l’association à prendre la parole ce mardi 23 septembre.

La LDH s’affiche : genèse d’une campagne coup de poing

La LDH a d’abord contacté l’agence Madame Bovary, et donc son fondateur Pascal Couvry, pour leur faire part de « problématiques de recrutement et d’émergence dans le « bruit » médiatique », raconte l’intéressé. La Ligue manquait de visibilité – évitant notamment les réseaux sociaux de peur que ses propos y soient déformés – et peinait à recruter de nouveaux adhérents.

« De là est née l’idée, chez Madame Bovary, de créer cette campagne qu’on espère impactante et capable de franchir l’indifférence et de mettre en avant la Ligue des droits de l’Homme, à un moment où elle a besoin d’adhésion ».

L’enjeu était donc de faire émerger la LDH dans l’espace public et rallier à sa cause toutes celles et ceux qui refusent la banalisation des discours extrêmes. Tous les « débordés, les démunis, les sidérés », comme les appelle Pascal Couvry.

Le défi : monter une campagne avec zéro moyen

Concevoir une telle campagne d’utilité publique n’a pas été sans défis. « La première contrainte était d’ordre économique. La Ligue des droits de l’Homme n’a pas de fonds à consacrer à la communication… il fallait donc monter une campagne qui n’ait strictement aucun moyen » souligne M.Couvry.

L’autre défi tenait au ton de la campagne : traiter d’un sujet grave sans tomber dans la provocation gratuite. « Il fallait que les mots soient les plus justes possible » insiste le publicitaire.

Le slogan central de la Ligue – « Défendre les droits, tous les droits, partout, pour toutes et tous » – résume d’ailleurs parfaitement sa posture, à savoir opposer le droit aux injustices… Le droit est une arme de défense pour la Ligue… », explique Pascal Couvry.

Frapper les esprits par le non-dit des silhouettes noires

Faute de moyens pour multiplier les supports, la LDH a misé sur la force du verbe et de l’image, en déclinant une série de trois affiches percutantes. Pascal Couvry et son équipe ont puisé leur inspiration dans une esthétique du 18ème siècle : « On a repris les portraits à la silhouette auxquels on a associé des phrases très fortes en réserve ».

En choisissant les ombres noires de Donald Trump, Vladimir Poutine et Benjamin Netanyahou – trois figures contemporaines de la dérive autoritaire – la campagne frappe les esprits sans même avoir à les nommer.

Chaque profil se découpe sur fond blanc, avec un simple élément de couleur (une cravate rouge, un col bleu…) pour faciliter son identification. «Quelqu’un comme Donald Trump a beaucoup travaillé son image de marque… on n’a donc eu besoin que de quelques éléments graphiques pour évoquer sa personne », s’amuse Pascal Couvry.

Sur chaque silhouette, un slogan choc interpelle le lecteur : « Même une époque folle a besoin de garde-fous », « Quand tout va de travers, il reste l’État de droit », ou « Face à la loi du plus fort, les plus faibles ont des droits ». Autant de formules coup de poing qui rappellent que, face au chaos ou à l’arbitraire, la seule réponse durable est la règle de droit.

L’ensemble est signé du logo historique de la LDH (fondée en 1898) et invite le public à rejoindre ses rangs via un QR code. « Il ne s’agit pas du tout de convaincre les électeurs des extrêmes de changer d’avis », précise Pascal Couvry, « mais on a la prétention de dire aux autres que oui, il y a un mode d’action : l’adhésion à la Ligue des droits de l’Homme, qui est encore un rempart à la folie du monde».

2027 en ligne de mire : empêcher l’extrême-droite d’arriver au pouvoir, pour protéger la démocratie

Plus largement, l’initiative pose la question du rôle de la société civile dans la protection de la démocratie. « Nous pensons que la société civile doit prendre toute sa place dans le débat politique, pas au sens électoral du terme, mais sans négliger non plus cette dimension. Il faut tout faire pour empêcher l’extrême droite d’arriver au pouvoir, car ce serait un danger immense pour la démocratie », insiste Pierre-Antoine Cazau.

En prenant la parole sur les panneaux d’affichage, la Ligue des droits de l’Homme endosse un rôle de vigie républicaine, aux côtés d’autres acteurs de la société civile. « Nous ne faisons pas de politique électorale, mais de la politique au sens noble : intervenir dans le débat d’idées, alerter sur les dangers et se mobiliser pour les empêcher », conclue Pierre-Antoine Cazau. Un rôle d’autant plus important à l’horizon 2027, date des prochaines élections présidentielles et législatives en France…

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