19 octobre 2021

Temps de lecture : 4 min

« Le cookie-less world, c’est demain ». Interview de Stéphane Père (Poool)

Chute du consentement, augmentation du blocage publicitaire, chute du RPM, … Stéphane Père, CRO de la solution Poool, revient sur les zones de turbulences que traversent actuellement les médias qui ont un modèle de revenus basés sur la vente de publicités online, et apporte quelques solutions pour garder le cap dans ce très prochain « cookie less world ».

INfluencia : vos clients (les médias) évoluent dans un marché particulièrement tendu… Que constatez-vous ?

Stéphane Père : effectivement, les éditeurs dont le revenu est essentiellement basé sur la publicité en ligne sont sous une pression sans précédent.
La plateforme de conversion Poool est partenaire de grands éditeurs français et internationaux*. Nous avons donc une vision précise et globale des enjeux auxquels les médias sont actuellement confrontés… Et c’est édifiant de constater que – partout, pour tous les acteurs – la situation est unanimement préoccupante : Des milliers de médias se battent pour 30% du marché pub display laissé par les géants Google, Facebook, Amazon… (source : Emarketer Mars 2021) ; Le trafic est à 80% sur mobile, dont la monétisation est environ 2 fois moindre que sur desktop ; Plus de 35% du trafic desktop est adblocké en France (et plus de 42% dans le monde (source : Backlinko et Hootsuite) ; Les taux de consentement au dépôt de cookie sont en chute libre, particulièrement en France depuis le 1er avril et la nouvelle réglementation CNIL. Nous avons observé sur le marché français que ce taux de consentement est passé de 90% à 70% entre avril et septembre 2021. Et cela s’accélère fortement. La Finlande est en train de suivre le même chemin… Qui sait où cela s’arrêtera ?

IN. : quelles sont les conséquences de cette chute du consentement ?

S.P. : la chute des taux de consentement cookie a des conséquences dramatiques pour un média qui ne vit que de ses revenus pub digitale. En effet, les inventaires publicitaires sans cookie sont vendus au mieux beaucoup moins cher, au pire rien du tout.

“Une audience sans consentement vaut 80 points de RPM de moins qu’une audience consentie.” 
David Folgueira (Prisma Media Solutions), interview Influencia.

Sans consentement, les éditeurs ont aussi moins de capacité d’analytics de leurs audiences, ne peuvent plus personnaliser l’expérience de leurs lecteurs ni tracker leurs campagnes marketing. Nous voyons donc 20% de taux de consentement susceptible de partir tous les 6 mois. On voit que le consommateur comprend les enjeux de privacy. Et s’il a consenti sans réfléchir pendant 6 mois, il est aussi capable de revoir sa position tous les 6 mois. Donc si rien n’est fait, cela signifie que les revenus pub sont susceptibles de chuter d’au-moins 10% tous les 6 mois… Avec une date de mort qui devient donc calculable pour chaque média. Le cookie-less world, c’est demain, et si Chrome nous a donné un peu d’air en repoussant sa mise à jour à mi-2023, il faut prendre de l’avance et commencer à loguer les visiteurs dès maintenant !

IN. : selon vous, il y a donc une urgence à mettre en place des solutions alternatives pour récupérer de la data 1st party. Comment les médias peuvent s’adapter ?

S.P. : il y a 3 étapes qui se complètent et s’enrichissent les unes les autres :
A court terme, il faut récupérer le taux de consentement cookie, via 3 méthodes : Informer, Suggérer, Contraindre. Et cela se fait en utilisant un Cookie Wall avec alternative.
A moyen terme : en lançant une stratégie de membership solide pour construire des relations avec les lecteurs, et pouvoir récupérer de la data 1st party (et donc relancer du targeting pub), via un Registration Wall. Pousser et promouvoir la création des comptes, c’est un atout pour tous les modèles d’affaires : publicité, abonnement, e-commerce, événements… Certains éditeurs ont multiplié par 2 leur audience loguée, en quelques mois grâce à cette stratégie.
A long terme : en construisant une ligne de revenus récurrents via l’abonnement en ligne. Et là, un Paywall est un outil précieux. Le site ELLE.fr a par exemple multiplié par 2,5 ses recrutements d’abonnés depuis qu’il ont mis en place leur paywall dynamique.

IN. : quels sont les points de vigilance lorsqu’on se lance dans ces stratégies ?

Lorsque l’on démarre une stratégie de conversion de ses audiences, on construit les fondations pour le futur, mais il faut bien évidemment faire attention à ne pas scier la branche sur laquelle on est assis, et protéger son audience, son engagement et son SEO. Pour cela, il est recommandé :

  • d’utiliser des méthodes de blocage souples et agiles, où l’on va pouvoir tester plusieurs scénarios sur différents segments d’audience, notamment selon le niveau d’engagement du lecteur, sans avoir besoin de demander de nouveaux développements à l’équipe technique à chaque étape ;
  • d’adopter une démarche test & learn où pour itérer souvent et varier les messages et designs de walls tous les mois, peut-être plus souvent ;
  • d’être dans une fine granularité : à la rubrique, à l’article, au device, à la zone géographique… parce que toutes les audiences ne se valent pas – les options ne conversion ne doivent pas être les mêmes partout non plus.

Il y a une grande et réelle urgence à reprendre le contrôle de ses revenus lorsque l’on est un créateur de contenus en ligne. Non seulement la publicité ne suffit plus, mais en plus le marché du membership et de l’abonnement est hyperconcurrentiel : les ménages ont des budgets limités, tout le monde ne s’abonnera pas à tout. C’est maintenant qu’il faut s’y mettre. Nous avons quelques mois devant nous, pas des années.

*En France, des éditeurs comme L’Express ou ELLE ; des “pure players” comme Welcome to the Jungle. A l’international : Sinar Harian en Malaysie, MoneyWeb en Afrique du Sud ou Neos Kosmos en Australie.

En résumé

A propos de Poool : Poool est une « Audience Conversion Platform », qui permet aux créateurs de contenus de convertir leur audience en leads, membres et abonnés, grâce à leur technologie de Wall Dynamique (Cookie Wall, Registration Wall, Paywall). Pour consulter leurs ressources et livres blancs, c’est ici, là et .
A propos de Stéphane Père : Chief Revenue Officer de Poool depuis mai 2020, après 12 années au sein de The Economist, dont 5 ans en tant que Chief Data Officer en charge des revenus publicitaires, des abonnement et de la diversification.

À lire aussi sur le même thème

Les Newsletters du groupe INfluencia : La quotidienne influencia — minted — the good. Recevez une dose d'innovations Pub, Media, Marketing, AdTech... et de GOOD

Bonne idée ! Je m'inscris !

Allez plus loin avec Influencia

the good newsletter

LES FORMATIONS INFLUENCIA

les abonnements Influencia