6 mars 2022

Temps de lecture : 3 min

« La Russie risque d’être confrontée à une cyber-guerre mondiale ». Mike Vickers, ancien sous-secrétaire d’État américain au renseignement

Le conflit enfle… et s’enlise entre l’Ukraine et la Russie. Un contexte incertain, aux répercussions économiques énormes pour le Kremlin, qui pourrait déplacer ses opérations sur un tout autre terrain.

Depuis les premières frappes émises par les Russes à l’encontre des bases aériennes ukrainiennes, les forces de Poutine semblent enlisées dans un long convoi qui borde Kiev, handicapées par un manque évident de soutien logistique. La capitale ukrainienne sent déjà le vent du boulet, dont les roquettes, peu précises, ont déjà causé de nombreux dommages dans d’autres zones civiles du pays. Une tactique guerrière qui rappelle les méthodes utilisées par les Russes lors des affrontements d’Alep. Mais la preuve que Poutine n’a pas accompli la blietzkrieg qu’il planifiait depuis longtemps. Volodymyr Zelensky, le président ukrainien fait face et mène une forte résistance qui entrave le Kremlin. À moins que les pourparlers de paix ne débouchent sur un compromis qui lui donnerait une stratégie de sortie, l’occupation pourrait être longue… et de toute nature.

Perdre la main mais pas la face

Alors que la Russie est criblée de sanctions économiques pour son invasion du territoire ukrainien, les services de renseignements européens craignent de plus en plus que son président ne riposte en lançant des cyberattaques contre l’Occident. Beaucoup estiment que Poutine pourrait considérer ces mesures comme un acte de guerre et riposter par une cyberguerre visant les États-Unis et les pays européens qui les appliquent. Le président américain Joe Biden a déjà mis en garde la Russie contre toute cyberattaque contre les États-Unis, déclarant que si cela se produisait, « nous sommes prêts à répondre ». Une déclaration qui ne devrait pas refroidir les ardeurs des rangs ennemis, dont les hackers sont souvent dépeints comme les plus aguerris au monde.

 

Le 17 Janvier 2022, comme vous aviez pu l’apprendre dans nos colonnes, le gouvernement Ukrainien affirmait avoir des « preuves » de l’implication de la Russie dans une cyberattaque d’ampleur ayant visé 70 sites web gouvernementaux, déclarant que Moscou continuait « de mener une guerre hybride en rassemblant activement ses forces dans l’information et le cyberespace ». La Russie, selon toute vraisemblance, avait également orchestré en 2017 le cyber-sabotage de plusieurs institutions financières, énergétiques et gouvernementales ukrainienne à l’aide du logiciel NotPetya. Le virus avait infecté les systèmes informatiques de grandes entreprises internationales, comme la compagnie maritime danoise Maersk. Des allégations démenties par la Russie.

Emily Harding, qui travaille pour le Think Tank Centre for Strategic and International Studies, a déclaré récemment dans l’un de leurs séminaires que Poutine aimait se confondre dans le « déni » des cyberattaques, en utilisant soit une organisation « indépendante », soit ses propres services secrets tels le GRU. Au cours de ce même séminaire, Mike Vickers, un ancien sous-secrétaire d’État américain au renseignement, a déclaré, dans des propos relayés par Sean Bean du journal irlandais Independant, que la Russie voyait les cyberattaques « comme un arsenal de premier choix » pour infliger des douleurs économiques à l’Occident et aux États-Unis. Avant de préciser : « Il est important que nous les en dissuadions et les frappions en retour s’ils le mobilisent. Ce n’est pas comme si l’industrie pétrolière et gazière russe était un bastion de la cybersécurité. L’Ukraine est elle-même un acteur cybernétique assez sophistiqué, qui mobilise une armée informatique, comme ils l’appellent, dont des hackers privés viennent grossir les rangs. La Russie risque d’être confrontée à une cyber-guerre mondiale ».

 

 

Mais que fait la DGSI

Les cyberattaques sont considérées comme une composante de plus en plus essentielle des guerres hybrides qui seront menées au XXIe siècle, notamment pour saper la capacité de fonctionnement d’un gouvernement ennemi avant que la guerre armée ne commence. Ou pour briser le moral des troupes comme par exemple lors de l’attaque du 14 janvier dernier. Et la France est loin d’être immunisée. Dans une note adressée aux préfets le jeudi 24 février dernier, divulguée par France Info et l’AFP, le ministère de l’Intérieur les met en garde face à d’éventuelles représailles aux sanctions contre la Russie : « Le centre de cyberdéfense du ministère passe en vigilance renforcée en durcissant sa veille opérationnelle ». Emmanuel Macron avait convoqué quelques jours plus tard un conseil de défense spécifique en la matière. Le 18 février dernier, après le piratage de ses hôpitaux de Dax et de Villfranche-sur-Saône, il avait également confirmé le lancement d’un plan de 1 milliard d’euros pour renforcer la cybersécurité des systèmes sensibles.

Un autre exemple de notre vulnérabilité : Michel Friedling, qui dirige le commandement français de l’Espace, a révélé cette semaine que peu après le début des opérations russes, un réseau satellitaire qui couvre l’Europe et notamment l’Ukraine « a été victime d’une attaque cyber, avec des dizaines de milliers de terminaux qui ont été rendus inopérants immédiatement après cette attaque ». Près de 9000 abonnés d’un opérateur filial d’Orange ont ainsi été privés de leur connexion internet. Le conflit Russie/Ukraine pourrait marquer une étape importante dans la pérennisation de ces tactiques… alors il est temps de se mettre à la page.

 

En résumé

Alors que la Russie est criblé de sanctions économiques, les services de renseignements européens craignent qu’elle ne riposte en lançant des cyberattaques contre l’Occident.

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