14 juin 2022

Temps de lecture : 5 min

«Nous sommes des créateurs d’expériences caritatives », Maxime Quillévéré, Charitips

Maxime Quillévéré a co-fondé il y a trois ans Charitips, une start-up qui propose à ses clients la « première solution marketing de fidélisation et d’engagement par la philanthropie ». A travers un programme d’offre bien décliné et adaptable, il propose d’accompagner tout type d’entreprise, les grosses comme les moins grosses, sur les chemins vertueux de la RSE. Quand politique RSE rime avec ROI ? Cela valait bien un entretien.

INfluencia : dans votre communiqué, vous écrivez : « leur générosité (des entreprises) se heurte à des difficultés très concrètes. Parmi elles, des politiques RSE difficiles à mettre en pratique, une non maîtrise des codes et un retour sur investissement impossible à calculer ». Dans le cadre des métiers que vous avez pratiqués avant de fonder Charitips, avez-vous été témoin de cette difficulté à concilier politique RSE et ambition économique, inhérente à bon nombre d’entreprises ?

Maxime Quillévéré : par les postes que j’ai occupés, mais surtout par les employeurs qui m’ont fait confiance, j’ai eu la chance de travailler dans des entreprises qui cherchaient réellement à faire valoir leur RSE. Je pense notamment à mon expérience chez Shine, une neobanque reconnue pour être un acteur particulièrement responsable et consciencieux. Le bon élève de RSE par excellence mais qui peut se le permettre tant la fintech, le secteur dans lequel elle exerce, est un domaine prospère économiquement et ouvert sur ces questions d’intérêt général. Dès sa création ses fondateurs avaient à cœur d’intégrer à son mode opératoire des valeurs qui leur étaient chères. C’est d’ailleurs pour ça que je les avais rejoints. De base, je voulais travailler dans la fintech et plus particulièrement dans une néobanque, mais c’est par leur engagement qu’ils m’ont séduit. Mais ce paradoxe que vous mettez en exergue, plusieurs amis l’ont constaté chez leurs employeurs et m’en ont fait part. Des entreprises, en l’occurrence, trop souvent débordées par ces questions ou qui ne sentent pas légitimes de s’en saisir.

IN : concernant plus concrètement votre offre, vous dites que vous proposez « du développement sur mesure pour les demandes spéciales ou les grands comptes ». Pouvez-vous nous en dire davantage ?

M.Q. : chez Charitips, on se voit aujourd’hui comme des créateurs d’expérience caritative. Notre mission est de faire en sorte que nos clients adaptent notre technologie à leur quotidien pour générer un fort impact social. Comme vous pouvez le voir sur notre site, nous avons une offre déclinée en plusieurs dispositifs, bien définie, mais qui ne colle pas forcément aux offres des entreprises qui nous contactent. Il est donc primordial d’être capable de nous y adapter. Par exemple, nous avons récemment dévoilé un projet mené pour la Banque Postale qui avait à cœur, comme l’indique leur appellation de « banque citoyenne », d’intégrer les citoyens/clients dans leurs process de décision. Ils ont donc créé le « conseil des clients », à savoir un comité participatif dans lequel sont élus des citoyens comme vous et moi et qui participe ensuite à la prise de décision de la Banque Postale. Pour les remercier de leur engagement, nos interlocuteurs de la banque postale se voyait mal les rémunérer en cash, cela n’aurait aucun sens. Nous avons donc mis en place une plateforme dédiée à cet évènement qui, pour chaque conseil promulgué par l’un des membres du comité, générait des cartes caritatives qui étaient ensuite distribuées à tous les élus pour leur permettre de donner une somme à l’association de leur choix. La raison qui nous pousse à travailler avec tel ou tel client est assez simple : on choisit d’accompagner des entreprises qui s’engagent à faire un don qui sera toujours orienté par ses clients/collaborateurs. Et derrière nous créons l’expérience capable de faire vivre chaque projet.

 

 

IN : un drôle de retour à l’envoyeur quand on sait que c’est justement le fait d’avoir offert une carte cadeau caritative à l’un de vos anciens collaborateurs qui vous a donné l’idée et l’envie de fonder Charitips.

M.Q. : complétement. On a commencé par faire du B to C mais aujourd’hui nous ne faisons quasiment plus que du B to B, ce qui nous a demandé de développer notre offre pour nous dégager justement des cartes cadeaux. Mais elles constituent toujours la pierre angulaire de notre offre. D’une manière ou d’une autre, elles finissent toujours par revenir, tout simplement car le pouvoir de décision qu’elles offrent aux employés de nos clients est sans limite.

IN : vous dites que vos campagnes sont « à minima économiquement neutres et le plus souvent rentables ». Quels éléments vous permettent d’étayer ce constat ?

M.Q. : à vrai dire, nous n’avons pas encore beaucoup de recul car nous venons tout juste de lancer ce nouveau programme d’offre Donation as a service. Mais pour affirmer cela, nous nous basons sur plusieurs éléments. Un calcul tout bête : quand une entreprise nous contacte, elle propose alors le budget de la campagne de donation. Sur ce budget, 60% sont déductibles des impôts et sur les 40% restants, on vient lui remettre tout un tas d’outil pour les maximiser le plus possible en augmentant sa marque employeur.  Par exemple, pour un site d’e-commerce qui essaye de faire passer son panier moyen de 100 à 150 euros, on peut lui proposer un dispositif qui stipule que pour toute commande de 150 euros ou plus, 20 euros seront reversés à l’association caritative de son choix. Une somme que ne devra même pas régler le site car déductibles. Plus le lien émotionnel créé avec le client, sur lequel l’entreprise va pouvoir s’appuyer, nous sommes en mesure d’affirmer que oui : la campagne sera rentable ou a minima neutre.

 

IN : selon une enquête du Collectif France Générosités, certes la générosité des sociétés a progressé de 119% en neuf ans mais quand on regarde dans le détail, le nombre de petites sociétés donatrices est passé de 15.500 à 62.000 en neuf ans alors que la part des grands groupes est en net recul (54% du volume total contre 62% en 2010). Quel type d’entreprise vont contacte le plus ?

M.Q. : sur l’offre des cartes cadeaux, nous avions une typologie de clients vraiment très large, de la TPE à la multinationale cotée en bourse. On avait même du mal à identifier une clientèle type. Mais sur notre nouvelle proposition de valeur, on se rend compte que nous sommes beaucoup plus pertinents à travailler avec des entreprises de 200 employés ou plus. C’est un indicateur comme un autre, nous ne refusons aucun client, mais à partir de cette base d’employés, on remarque que les entreprises se dotent généralement d’une fonction RSE à temps plein. De plus, ces entreprise qui se saisissent de ces questions, souvent pour la première fois, ont peu d’expérience en la matière. Pour piloter leur politique RSE, elles nomment des salariés qui viennent généralement du marketing, du partenariat ou autre et qui sont friands de nouveaux procédés et de nouvelles solutions qui vont venir appuyer leur mandat. Tout cela en partant de 0, ce qui est très intéressant pour nous.

IN : pour finir, je voulais vous questionner sur un phénomène actuel que plusieurs chercheurs pointent déjà du doigt : la banalisation du don. Ne pensez-vous qu’à trop vouloir intégrer le don à l’acte d’achat et à une certaine dimension mercantile, vous finirez peut-être par désacraliser le principe même de la donation ?

M.Q. : c’est une question très pertinente, que je me suis déjà posé par le passé, et qui était même le moteur de cette aventure. Avant de créer Charitips, j’avais l’intuition d’une potentielle fatigue autour du don tout en étant sûr de la nécessité de le démocratiser davantage. Nous avons donc fait un choix : les entreprises qui nous contactent adresseront le montant du don, endossant ainsi le rôle du « héros » tout en générant un réel retour sur investissement. On leur permet ainsi d’augmenter leurs volumes, car l’opération est rentable, et on casse par la même occasion cette fatigue car les collaborateurs n’auront pas à sortir le moindre argent de leur poche. En bref, le process est beaucoup plus sein comme ça.

 

 

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