29 novembre 2023

Temps de lecture : 6 min

« Chez Amazon, nous sommes convaincus que le Cloud Gaming est l’avenir du jeu vidéo », Clément Monjou (Alexa International)

Pour beaucoup d’observateurs, le cloud gaming, -ou jeu infonuagique dixit  nos amis québécois-, est l’avenir des jeux vidéo. Tant par sa praticité que pour son coût, le concept a déjà séduit une flopée d’acteurs de l’industrie et pas seulement , avant de se frayer, peut-être, un chemin dans les coeurs des gamers. C’est dans ce contexte plus que favorable qu’Amazon lançait il y a peu son propre service de jeux à la demande, baptisé Luna. Rencontre avec Clément Monjou, senior manager chez Alexa International, pour comprendre comment la firme de Seattle espère s’imposer dans un secteur « encore balbutiant ».

INfluencia : pour mieux contextualiser notre sujet du jour, pouvez-vous nous expliquer comment Amazon s’est immiscée sur le marché des jeux vidéo ?

Clément Monjou : tout d’abord, il faut savoir que la vente de jeux vidéo est l’un des tout premiers business lancés par Amazon après le livre, les DVD, les CD ou les logiciels. C’est donc assez naturellement qu’une fois que les supports ont commencé à se digitaliser, nous nous sommes mis à les commercialiser également en format digital. En parallèle, les consoles font partie de notre catalogue depuis bien longtemps, et nous avons aujourd’hui l’une des plus larges sélections de composants pour créer les PC de gamer. Notre volonté c’est de rendre les contenus accessibles, à commencer parles jeux…

Aujourd’hui, nous comptons plusieurs organisations au sein d’Amazon qui travaillent spécifiquement sur le marché des jeux vidéo.

IN : comment ensuite concentrez-vous vos efforts sur le cloud gaming ? Sans oublier d’expliquer aux profanes ce qu’est le cloud gaming…

C.M. : quand nous avons lancé la première Fire TV en 2014 aux États-Unis, –grosso modo un lecteur multimédia qui permet d’accéder à toute une série d’applications différentes-, l’appareil était commercialisé avec une manette. Cette dernière permettait de jouer à des jeux mobiles et ainsi de bénéficier d’une expérience console pour moins d’une centaine d’euros. Donc c’est un sujet que nous connaissons bien pour l’avoir travaillé en parallèle avec les éditeurs des jeux que nous distribuons, en physique comme en digital, et également avec l’innovation qu’Amazon drive sur le sujet. Aujourd’hui, nous comptons plusieurs organisations au sein d’Amazon qui travaillent spécifiquement sur le marché des jeux vidéo.

 

 

IN : pouvez-vous nous les présenter ?

C.M. : tout d’abord la division Entertainment qui concerne directement les équipes Twitch, -l’application de streaming vidéo en direct et de VAD étant aujourd’hui au coeur de l’expérience de beaucoup de gamers-, puis le service Prime Gaming, créé en 2020, qui nous a permis de mettre le jeu vidéo au cœur de l’expérience des utilisateurs Prime. Enfin, il y a deux ans seulement, nous avons décidé de nous aventurer dans un nouvel espace que beaucoup décrivaient déjà comme le futur du jeu vidéo, qui est le cloud gaming.

Luna, a été déployé la semaine dernière en France, en Italie et en Espagne – après un premier lancement aux États-Unis le 1er mars 2022

Ce service, que nous avons appelé Luna, a été déployé la semaine dernière en France, en Italie et en Espagne – après un premier lancement aux États-Unis le 1er mars 2022 –. Il permet, et c’est là le propre du cloud gaming, d’apporter une sélection de jeux, de qualité console, à n’importe qui, depuis son navigateur ou depuis n’importe quel produit compatible. Nous sommes certains du fait que cette praticité d’usage incarne le futur de l’industrie. Cela permet à presque n’importe quel utilisateur, sans investissement fixe et d’envergure, de « prendre la manette ». Par ailleurs, élément non négligeable, le cloud gaming supprime toute la friction ressentie avec console ou un PC : combien de fois ai-je entendu: « ça y est les enfants dorment, j’ai une petite demi-heure devant moi pour jouer »… suivi d’un « mince, la mise va durer une heure »… (rire). Luna va tout changer…  Même si comme vous le savez sans doute, la technologie est encore balbutiante et que Luna est aujourd’hui présente aux Etats-Unis et depuis un an outre-Atlantique…

Luna est aujourd’hui un service de streaming de jeu vidéo qui propose à tous nos clients Prime une sélection en rotation de sept à huit à jeux différents.

 

 

IN : maintenant que nous sommes dans le vif du sujet, que promet concrètement Luna à ses abonnés ?

C.M. : Luna est aujourd’hui un service de streaming de jeu vidéo qui propose à tous nos clients Prime une sélection en rotation de sept à huit à jeux différents. Parmi cette sélection, deux titres à succès seront permanents, à savoir Fortnite et TrackMania. Dans un second temps, l’utilisateur pourra s’abonner à des offres complémentaires de contenus. La première, appelée Luna+, apporte plus d’une centaine de jeux supplémentaires – action RPG, jeux de courses etc. – qui pourront se jouer au clavier/souris ou à la manette. La deuxième a été conçue en partenariat avec Ubisoft, l’un de nos partenaires clé car tout aussi convaincu que nous du potentiel illimité du cloud gaming. BAptisée Ubisoft+, cette offre permet d’accéder à l’ensemble du catalogue Ubisoft, du tout premier Prince of Persia au – tant attendu – Avatar : Frontiers of Pandora – dédié à l’univers de James Cameron –, contre la modique somme de 17,99 euros. Nous avons également un troisième service d’abonnement, que nous réalisons en collaboration avec Jackbox Games, qui concerne davantage les party games. Enfin, il faut le mentionner, les abonnés ont la possibilité d’acquérir à l’unité n’importe quel titre Ubisoft.

 

IN : comment s’est orchestré ce déploiement européen avec la maison mère ?

C.M. : notre marché test, ce sont effectivement les États-Unis. Le produit est développé en tout premier lieu pour ce marché américain. Mais Amazon a toujours cette volonté d’amener ses services de manière globale, c’est pourquoi nous avons pu travailler avec les équipes centrales qui développent cette technologie pour mieux la déployer ensuite dans de nouvelles régions du monde. Après, il y a, bien entendu, tout un travail de fond, assuré par des équipes distribuées à travers le monde, pour s’assurer que les catalogues correspondent aux exigences locales. Des équipes marketing qui travaillent sur la localisation de l’expérience et s’assurent de la bonne conformité du hardware.

 

Cela fait peut-être deux ans que l’on est dans le cloud gaming, mais cela fait vingt ans que l’on est dans le cloud.

IN : l’un des principaux obstacles que rencontrent vos concurrents quand il se lancent dans le cloud gaming reste l’exigence de leur service en termes de bande passante. Comment pouvez-vous vous démarquer sur ce sujet épineux pour les joueurs ?

C.M. : je pense qu’Amazon peut compter sur certains actifs qui l’imposent comme un leader potentiel du cloud gaming. Tout à l’heure, nous évoquions la distribution de contenus digitaux, c’est quelque chose que nous faisons depuis 2017 avec Kindle, par exemple. Les autres expertises que nous avons développées ces dernières années sont celles du streaming et du cloud. Maintenir un service comme Prime Video nous a poussés à développer des technologies innovantes pour optimiser l’encodage de nos flux sans faire exploser nos coûts. L’innovation est continue sur ce segment là. Pour ce qui est de Luna, elle se base sur les technologies du cloud, Amazon Web Services. Nous bénéficions à le fois des services développées par AWS, de ceux que l’on a développés en propre mais également de la densité et de la richesse de nos data centers. Cela fait peut-être deux ans que l’on est dans le cloud gaming, mais cela fait vingt ans que l’on est dans le cloud. D’un point de vue UX et produit, c’est un réel avantage.

 

IN : en 2023, les gamers français sont-ils enfin prêts à abandonner leurs consoles adorées ?

C.M. : nous pensons qu’il y a un vrai marché à conquérir dans le casual. C’est sur cet axe là que notre expérience se veut très consumer centric, ce qui n’est pas forcément le cas de nos concurrents. Aujourd’hui, vous pouvez acheter une console dernier cri… mais cela vous coûtera 500 euros, ou alors vous confectionner une config de professionnel… mais qui va probablement vous coûter 2000 euros, et si vous mettez votre PC de gamer dans le cloud, cela vous demandera de débourser dans les 100 euros par mois. Je sais de quoi je parle (rire – jaune –).  C’est là que notre positionnement est intéressant. C’est aussi pour cela que nous proposons toute une sélection de party games.

Plus que de lancer une nouvelle offre, nous venons finalement enrichir un service qui fait partie de notre ADN.

IN : que répondez-vous aux mauvaises langues qui vous prédisent le même avenir funeste que Google Stadia, l’un des tout premiers exemples de service cloud gaming à avoir vue le jour ?

C.M. : tout simplement que notre approche est différente. Je pense qu’il y a une simplicité, une clarté concernant notre offre: vous êtes clients Prime, vous accédez aux jeux. Or nous comptons une base de plusieurs millions de consommateurs. Plus que de lancer une nouvelle offre, nous venons finalement enrichir un service qui fait partie de notre ADN. Quand on innove chez Amazon, c’est généralement qu’une graine a d’abord poussé ailleurs (rire) et c’est ce qui me passionne avec cette boite. Luna n’a pas été inventé ex nihilo, c’est avant tout un service ad hoc.

 

 

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