12 mai 2023

Temps de lecture : 4 min

Intelligence arty et nouveaux paradigmes artificiels

Champignons magiques, psychotropes et IA génératives : plus MDMA que NFT, la possibilité d’un futur psychédélique est la nouvelle hype des nouveaux hippies et si les promesses bien réelles des intelligences et des paradis artificiels ont enflammé Austin* et le SXSW 2023, la vitesse d’évolution des IA génératives et leurs possibilités infinies à changer le monde, changent aussi le mood des créateurs et des créatifs, partagés entre l’exaltation vertigineuse et la crainte de perdre, non seulement leur savoir-faire distinctif, mais pire encore : leur différence.

Quelques clients: Renault Trucks, Fresh, La Poste, Bouygues Bâtiment, Institut Français, Interflora, Casden, BNP Paribas Personal Finance, PEFC, Cegid, Cdiscount, Manutan.

La réalité dépasse la science-fiction. Pour comprendre la déflagration existentielle de l’IA générative sur les champs de la création, il nous faut dépasser la terminologie d’efficacité et de productivité, souvent associée au Machine Learning et à l’intelligence artificielle, pour se concentrer sur ce qui est au cœur de la création : le sensible et le savoir-faire et ainsi comprendre que l’exercice créatif implique une forte dimension intime, une mécanique de talents acquis, des techniques entretenues et mesurables, de la culture, du temps et, au-delà des réalisations concrètes, le bénéfice d’une réalisation personnelle.

Un nouveau paradigme complexe pour une question simple : comment prendre possession de ce qui dépossède?

Ainsi, face à des intelligences artificielles qui se démocratisent, apprennent et s’adaptent à une vitesse surhumaine, la frustration ressentie par les communautés créatives à leur égard est mue non pas tant par un réflexe de survie qu’une urgence à se repositionner face à des algorithmes nourris du fruit même de leurs travaux**, de leurs cultures et de nos références collectives. Un nouveau paradigme complexe pour une question simple : comment prendre possession de ce qui dépossède? La fabrique des images, une révolution permanente. De Lascaux à Photoshop, les révolutions culturelles qui ont jalonné la longue histoire de la fabrique des images sont intimement liées à l’invention de nouveaux procédés, de nouvelles techniques et de nouvelles technologies. Ces cycles d’évolutions continues ne connaissent que deux constantes invariables : la redistribution des rôles et l’apparition de nouvelles pratiques exploratoires. En ce sens, par leur faculté à changer profondément les usages, à les multiplier et à ouvrir le champs des possibles, l’avènement des IA génératives visuelles est à rapprocher de celui de la photographie*** pour mieux comprendre en quoi la démocratisation et la propagation d’un nouvel outil modifie profondément les usages et la culture. Car, si l’impact de la photographie est multiple, complexe et varié, il éclaire les possibilités offertes par un bouleversement majeur et soudain et préfigure les enjeux d’aujourd’hui.

le premier impact significatif de la révolution photographique est celui d’avoir mis fin, au cours du XIXe siècle, au monopole de la peinture classique sur la représentation de la réalité.

Avec l’invention de nouveaux outils plus à même de capturer précisément le monde, l’éphémère et l’imprévu, le premier impact significatif de la révolution photographique est celui d’avoir mis fin, au cours du XIXe siècle, au monopole de la peinture classique sur la représentation de la réalité. Et si de nombreuses voix s’élevèrent contre le mimétisme de la reproduction photographique, la jugeant inférieure à l’art pictural et à sa visée ultime : la recomposition de la réalité au filtre de la subjectivité et de la technique de ses maîtres, d’autres y virent une réelle opportunité d’émancipation.

Pour autant, la photographie n’a pas tué la pratique picturale.

Plus simple, plus rapide et plus économique, rendant les pinceaux obsolètes dans l’exercice de la représentation du réel, de nombreux peintres ont pleinement embrassé cette nouvelle pratique lucrative pour continuer à faire différemment ce qu’ils savaient faire : rendre compte du monde qui les entoure. De nouveaux métiers émergent. Pour autant, la photographie n’a pas tué la pratique picturale. En se révélant un outil complémentaire à la palette de certains peintres, comme Monet ou Degas, elle a facilité, grâce aux clichés, leur étude de la lumière, du mouvement ou de l’instant fugace. Une technique, donc, qui ne se substitue pas à une autre mais qui la complète et la transcende. Quand, au début du siècle dernier, de nouveaux créateurs comme Moholy-Nagy ou Man Ray font de la photographie, un outil d’expression à part entière, ils ouvrent la voie à de nouvelles expérimentations formelles et avant-gardistes quand, dans le même temps, elle permet à Malevich, Kandinsky ou Mondrian en tête, dédouanés de la représentation réaliste du monde, de réinventer la peinture en proposant des formes d’expression picturales plus abstraites et non figuratives.

Les possibilités exponentielles des IA génératives remettent, plus que jamais la question du regard, du talent et de l’engagement au centre des enjeux

Balbutiante ou triomphante, cette innovation en perpétuelle mutation a encouragé les artistes à explorer d’autres territoires d’expression ou à approfondir le leur sans les déposséder de leur créativité,mais en la décuplant. Aucun outil n’a jamais démocratisé le talent. Ces scénarios historiques préfigurent les actuels et démontrent les effets démultiplicateurs des innovations technologiques et notre capacité d’adaptation à la nouveauté. Les possibilités exponentielles des IA génératives remettent, plus que jamais la question du regard, du talent et de l’engagement au centre des enjeux et si elles questionnent légitimement les moyens de production, d’exécution et de labeurs sans plus-value, elles ne peuvent se substituer au supplément d’âme créatif, à notre capacité à générer des idées nouvelles et à poser notre regard sur le monde et les modes. Il n’est, ici, pas temps question des technologies que de notre faculté à opérer les bons choix dans leur utilisation et dans le rôle qu’on leur assigne. En ce sens, l’intelligence artificielle ne saurait s’opposer à notre intelligence créative et collective à promouvoir tous les talents et toutes les formes d’expression, à l’heure où il n’a jamais été aussi nécessaire de regarder le réel et notre humanité en face.

* Entre autres sources TheDrum.com ‘’AI, psychedelics and web3 shine bright at SXSW 2023’’

** Outre les complexes questions de droits d’auteur que soulèvent leur utilisation, si les IA génératives sont, pour l’heure, largement sollicitées pour imiter ou détourner des styles identifiables et propriétaires, il est à noter que la pratique du «à lamanière de» était largement tacite notamment dans le monde la publicité bien avant leur avénement.

*** La révolution photographique a pris du temps, une bonne partie du XIXe siècle, permettant ainsi une meilleure acceptation et une meilleure acculturation. Les IA génératives ont, quant à elles, pris tout le monde de court et leur vitesse de propagation et d’apprentissage peut être un frein à notre adaptation et à son acceptation.

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