6 novembre 2018

Temps de lecture : 3 min

Les marques seraient-elles devenues pudibondes ?

Une étude de Kantar Media montre à quel point les annonceurs ont toujours utilisé le sexe dans leur publicité afin de séduire les consommateurs. Mais les marques deviennent aujourd’hui mal à l’aise face à la banalisation du sexe sur la Toile. Tel est pris qui croyait prendre…

Une étude de Kantar Media montre à quel point les annonceurs ont toujours utilisé le sexe dans leur publicité afin de séduire les consommateurs. Mais les marques deviennent aujourd’hui mal à l’aise face à la banalisation du sexe sur la Toile. Tel est pris qui croyait prendre…

L’adage est bien connu : le sexe fait vendre. Pour attirer l’attention des consommateurs, les marques ont longtemps usé voire même abusé de cette « technique » pour le moins basique qui consiste à montrer un corps dénudé en-dessous d’un slogan tantôt humoristique, tantôt un rien déplacé. Une jolie cambrure, une peau de pêche, une cuisse dénudée, un décolleté profond, une chemise trempée qui ne laisse plus aucune place à l’imagination voire même, pour les « jusqu’aux-boutistes », un modèle totalement nu… Tout est bon pour vendre. Et cela ne date pas d’hier.

« Sexe, pub et nouvelles technologies », une étude de Kantar Media explique dans le détail comment les publicitaires utilisent le sexe pour mettre en avant les marques. Longtemps précurseurs, les annonceurs semblent aujourd’hui dépassés par un phénomène qu’ils ont pourtant initié.

Le « sex-marketing » ne date pas d’hier

Le « sex-marketing » a été lancé par l’industrie du tabac au XIXème siècle. En 1871, la marque américaine Pearl Tabacco a mis en scène une jeune fille dénudée -qui n’est pas sans rappeler La Naissance de Vénus de Boticelli- sur l’emballage de ses paquets de cigarettes. Quelques années plus tard, son concurrent, W. Duke & Sons, a intégré dans ses paquets des cartes à collectionner représentant des femmes dévêtues. L’érotisme a, par la suite, été fréquemment utilisé dans les affiches publicitaires. Les deux guerres mondiales et le retour à des valeurs plus morales ont jeté un voile sur les chairs trop dénudées durant la première moitié du XXème siècle. Mais la révolution sexuelle, qui fit rage entre la fin des années 50 et le tout début des années 80, marquera une nouvelle rupture avec l’apparition du bikini en 1953 et la mode des mini-jupes extra-courtes.

« À partir de la fin des années 1980, un cap est franchi par les annonceurs et les publicitaires dans les représentations du sexe dans leurs communications », soulignent les auteurs de l’étude « La mode repousse les limites de la nudité en présentant ses mannequins et ses égéries dans des postures toujours plus suggestives et libidineuses ». Dans le spot de Calvin Klein Jeans, Brooke Shields, âgée de seize ans, demande, dans une position lascive, « Do you want to know what comes between me and my Calvins ? Nothing ». Les marques de mode et de cosmétiques montrent alors souvent des femmes denudées dans des positions provoquantes. Certaines entreprises jouent la carte de l’humour plus ou moins graveleux comme Veet qui compare, en 2014, dans son spot publicitaire « Morning don’t risk dudeness » les femmes non épilées à des hommes barbus. Le film de Guinness sur la notion de « partage » est aussi devenu un classique.

Le sexe parle à notre cerveau reptilien

Le sex-marketing est très efficace car il s’adresse à notre cerveau reptilien qui se focalise sur la satisfaction des besoins primaires comme la recherche de sécurité, la garantie de la survie et… la sauvegarde de l’espèce qui se traduit par le besoin de se reproduire via la sexualité. Les chercheurs en neurosciences ont ainsi prouvé que les publicités à connotation sexuelle attiraient plus l’attention que les annonces pudiques.

Le numérique a toutefois modifié notre rapport au corps et au sexe. Le web a rendu le marché du sexe « plus global, plus transparent, plus concurrentiel et plus commercial », juge Catherine Hakim, dans son livre intitulé « Sexuality and the Sex Industry in the 21th Century » paru en 2015. Le porno accessible à tous sur la Toile et les multiples sites de rencontres ont changé notre rapport au sexe. Des applications se servent aujourd’hui de la géolocalisation pour faciliter les rencontres.

Amnesty International et Tinder

66,6% des utilisateurs de Tinder ont moins de 34 ans et 73,6% sont des hommes généralement citadins et aisés. Cette manne potentielle pour les annonceurs est pourtant encore très peu exploitée par les agences. « Beaucoup de marques n’osent toujours pas faire de la publicité sur ces sites et les publicitaires n’ont pas le courage à les inciter à sauter le pas », constate Christophe Manceau, directeur des études et de la prospective chez Kantar Media.

Aujourd’hui, seuls Knorr et Amnesty International Australie ont « osé » faire une campagne sur Tinder. Ces précurseurs ne devraient toutefois pas être suivis par de très nombreux annonceurs dans un avenir proche. « Les marques vont continuer à hésiter de faire de la publicité sur des applications comme Tinder ou Happn », prédit Christophe Manceau « La société et la culture vont souvent plus vite que les entreprises  ». A trop oublier l’adage sus mentionné, on finit par laisser passer de belles opportunités…

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