7 septembre 2023

Temps de lecture : 8 min

Etats Généraux de l’information : ne pas se contenter d’amour et d’eau fraîche !

Au sommaire du dossier NPA cette semaine ; Polémique après la décision de Nielsen d’incorporer les données d’Amazon dans sa mesure de l’audience ; La protection des mineurs et la pornographie en ligne : quelles solutions juridiques et quelles impasses techniques ? ou encore, le sport et l’information nouveaux piliers des chaînes FAST en Europe ? Retrouvez comme chaque semaine l’essentiel de l’INsight NPA en accès gratuit et bénéficiez d’une offre d’abonnement à NPA attractive.

L’édito de Philippe Bailly,

« En même temps qu’elle célébrait ce 6 septembre la « qualité de l’information » produite par France Télévisions, France Médias Monde, Radio France, ARTE et l’INA la ministre de la Culture s’est avouée incapable de confirmer que les ressources de l’audiovisuel public resteraient en 2024 à leur niveau de 2023. Résumant l’angle mort qui guette les Etats Généraux de l’information, dont elle a par ailleurs confirmé le lancement avant la fin du mois de septembre : débattre de la gouvernance des rédactions, examiner les enjeux liés aux innovations technologiques, s’inquiéter des risques d’ingérence par des puissances étrangères… mais ne jamais parler d’argent, autrement dire de moyens.

Or l’information a un coût : près de 500 M€ par exemple, pour les seuls TF1, France Télévisions (hors info régionale) et M6, ou la moitié des coûts de grilles des principales radios généralistes RTL, Europe 1, France Inter ou RMC. Et l’info se situe aux antipodes de la notion de scalabilité que les investisseurs chérissent concernant les entreprises de technologie : à l’inverse d’un logiciel ou d’une plateforme dont les coûts de développements ne sont payés qu’une fois, chaque article, chaque photo, chaque reportage se répercute directement dans les coûts de fonctionnement.

Mesurer les revenus directs qu’elle permet de générer est aléatoire ; la rentabilité reste en tout cas des plus limitées, et la mutation numérique n’aide évidemment pas à l’améliorer. Elle renchérit les coûts techniques avec la nécessité de développer et maintenir les sites et applications. Elle intensifie la concurrence avec, rien que pour les médias historiques, la disparition des « couloirs » (kiosques, téléviseur, transistor) qui voyaient hier télévisions, radios et journaux vivre des vies parallèles. Elle s’est déjà traduite, surtout, par de gigantesques transferts des dépenses de publicité, et le mouvement ne semble pas prêt de s’arrêter : le WARC, l’un des instituts de référence sur le marché publicitaire, prévoit que ces dernières dépasseront 1000 Mds$ en 2024, et que cinq groupes, AliBaba, Amazon, Bytedance (TikTok), Google, Meta (Facebook, Instagram, Threads, WhatsApp), s’en partageront plus de la moitié. A charge pour l’ensemble des chaînes de télévision, radios, journaux, magazines, sites internet… du monde entier de se partager le reste.

Espérer que des mécanismes de redistribution viendront demain rééquilibrer les flux n’est pas loin de l’utopie.

Les décisions récentes de X (appauvrir la présentation des liens vers des publications de média) ou de Meta (supprimer l’onglet Facebook News et, plus généralement, réduire la part des contenus d’actualité présentés sur la plateforme) ne vont pas dans le sens d’un renforcement volontaire de la collaboration et du partage de valeur ; la transposition de la Directive européenne sur les droits voisins n’a pas suffi à installer un mouvement de collecte significatif ; et les projets de taxe sur le chiffre d’affaires des plateformes laissent sceptiques quand on se rappelle le cheminement tortueux de l’impôt mondial sur les multinationales…

Mieux assurer la viabilité économique des médias d’information (l’un des 20 critères pris en compte à juste titre par l’Observatoire européen du pluralisme), suppose d’abord que l’Etat fasse son devoir d’actionnaire en assurant aux entreprises de l’audiovisuel les ressources nécessaires pour maintenir une information de qualité ; cela suppose ensuite que législateur, administration et régulateur s’accordent pour « peigner » les règles qui pénalisent la compétitivité des médias dans la défense de leurs revenus publicitaires : 3e coupure dans les films de plus de deux heures, acquise dans son principe depuis 2019 mais jamais mise en œuvre, possibilité d’indiquer une adresse dans les spots de publicité segmentée, gage de survie des télévisions locales, simplification des mentions obligatoires qui dénaturent la publicité radio… En soi, cela suffirait sans doute à constituer l’un des chapitres de la réforme appelée de ses vœux par Nathalie Sonnac ; comme annonceur, on peut attendre enfin que l’Etat soit particulièrement vigilants au choix des médias qu’il utilise pour sa propre communication, et prennent en compte la qualité de leur contenu éditorial (en se référant éventuellement à des labels, tels que celui du Journalism Trust Initiative de RSF).

Pour les marques elles-mêmes, suivre le même chemin assurerait à leurs campagnes la qualité de valeur contextuelle à laquelle la plupart se dit attachée avec, au final, la démarche civique qui rejoindrait ainsi l’efficacité commerciale.

L’ambition n’est évidemment pas avec ces quelques lignes de prétendre répondre à l’ensemble des enjeux. Mais d’en appeler beaucoup plus modestement à ceux qui animeront les Etats Généraux pour qu’ils n’en oublient pas la dimension économique. Une information de qualité ne se produit pas simplement avec de l’amour et de l’eau fraiche ! »

 

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Cédric Monnier (OKAST) : « L’arrivée dans les box va accélérer la montée de l’AVoD et des FAST »

Ancien de Dassault Aviation, de Canal+, ou encore de NDS / Cisco, Cédric Monnier a fondé OKAST en 2015. Basée à Suresnes et en Chine, la société fournit une plateforme d’aide à la conception et à l’exploitation de services de streaming vidéo et chaines FAST, payants et gratuits. Elle contribue à optimiser leur distribution, et participe à leur monétisation. En France, elle compte parmi ses clients Endemol, Mediawan, SECOM, Qwest TV, Secrets d’Histoire, l’INA, ou encore Vialma. Et elle est déjà présente dans une demi-douzaine de pays européens, avec les partenaires du consortium européen FAST4U. Début septembre, OKAST a annoncé sa sélection par TV Monaco pour son offre OTT et un partenariat stratégique avec Rakuten TV pour le FAST. (Consultation libre)

SVoD : la lutte de Netflix contre le partage des codes porte déjà de – sensibles – effets

D’après les résultats du Baromètre OTT NPA Conseil / Harris Interactive1, la pénétration de la SVoD a marqué le pas, comme en Grande-Bretagne, en revenant à 52,9 % à la fin du deuxième trimestre 2023, soit plus de deux points de moins qu’à la fin du premier trimestre. Mais deux tendances opposées se cachent sous ce chiffre global, qui agrège les abonnés – effectivement – payants et ceux qui recourent au partage de codes.  Les premiers sont quasiment stables sur trois mois, et en hausse sensible sur un an ; les seconds sont en baisse très significative. Chez Netflix principalement, qui a lancé le 23 mai sa campagne visant à lutter contre le partage de codes. Mais aussi chez les autres streamers, dont certains – Disney a minima – ont annoncé un tournant similaire. (Consulter)

 

Le sport et l’information nouveaux piliers des chaînes FAST en Europe ?

Aux Etats-Unis, les chaînes d’information et les chaînes sportives représentent une part importante de l’offre de chaînes FAST sur les différentes plateformes de streaming gratuites financées par la publicité. Certaines se sont même spécialisées sur ces thématiques, comme Amazon News App au sein de l’écosystème Fire TV, LocalNow ou VUit. Du côté des éditeurs, l’ensemble des grands réseaux U.S a adopté le modèle FAST pour distribuer leurs chaînes d’information locales, ce mode de distribution permettant de toucher un public au-delà de l’audience locale des marchés sur lesquels elles sont disponibles en linéaire. Du côté du sport, si on compte un grand nombre de chaînes FAST dédiées à des sports confidentiels ou très pointus, l’arrivée des grandes ligues sportives sur le marché a permis de dynamiser l’offre. La situation est encore loin d’être comparable en Europe, mais plusieurs annonces importantes cet été montrent que l’information et le sport occupent une place croissante dans l’offre de chaînes FAST. (consulter)

 

Media Nations 2023 : l’Ofcom constate une forte progression des usages de la BVoD au Royaume-Uni

L’Ofcom, régulateur britannique du secteur des télécommunications a publié au début du mois d’août son sixième rapport annuel Media Nations 2023 qui examine les principales tendances du secteur des médias audiovisuels et des usages des Britanniques. Le rapport constate que la proportion de téléspectateurs qui regarde chaque semaine la télévision traditionnelle a très nettement reculé, passant de 83 % en 2021 à 79 % en 2022. Et le temps passé à regarder la télévision linéaire est en baisse de 12 % avec une moyenne quotidienne de 2 heures 38 minutes par téléspectateur en 2022 (-21 minutes en un an). Pour autant, si les services de streaming élargissent dans le même temps leur public avec un nombre croissant d’utilisateurs de 65 ans et plus, leur adoption globale par les ménages britanniques semble plafonner. (consulter)

Avec ProSiebenSat1, Media For Europe (MFE) veut détrôner RTL Group comme premier groupe audiovisuel européen

Le Journal Officiel de l’Union Européenne a publié ce jeudi 31 août la « notification préalable d’une concentration » que lui a adressée, le 24 août dernier, le groupe Media For Europe (MFE, contrôlé par la famille Berlusconi) en vue de prendre le contrôle du 2e groupe audiovisuel privé allemand, ProSiebenSat1.

Sur la base de leurs résultats pour 2022, l’ensemble représenterait 7 Mds€ de chiffre d’affaires – et un résultat opérationnel supérieur à 1,3 Md€ – au coude à coude avec le leader européen RTL Group. Le fait que MFE et ProSiebenSat1 aient peu de recoupement dans leurs territoires d’implantation respectifs (Espagne et Italie pour le premier, zone DACH pour le second) pourrait faciliter son autorisation par la Commission Européenne. Cette dernière envisage d’ailleurs de recourir à la procédure simplifiée d’examen de l’opération. (consulter)

 

Polémique après la décision de Nielsen d’incorporer les données d’Amazon dans sa mesure de l’audience

Nielsen a annoncé le 16 août qu’il était sur le point d’incorporer les données First Party d’Amazon dans la mesure de l’audience du « Thursday Night Football » de la NFL pour la saison 2023-2024, diffusée sur Prime Video. C’est la première fois que Nielsen accepte d’utiliser les données propriétaires d’un tiers dans ses analyses indépendantes. Bien que la nouvelle méthodologie ne soit pas limitée à Amazon mais également ouverte à tous les autres streamers, la décision suscite la polémique, les autres diffuseurs de la NFL dénonçant une trop grande précipitation. (consulter)

 

La protection des mineurs et la pornographie en ligne : quelles solutions juridiques et quelles impasses techniques ?

Les gouvernements des pays occidentaux (USA, Australie, Royaume Uni, Allemagne) essayent, depuis quelques années, de développer des outils juridiques et techniques permettant de maîtriser l’accès des mineurs au visionnement de contenus pornographiques en ligne. Le législateur français n’est pas en reste, avec l’adoption de la loi n°2022-300 du 2 mars 2022 visant à renforcer le contrôle parental sur les moyens d’accès à internet (sur le matériel notamment). Le renforcement de la législation se poursuivra après la rentrée parlementaire 2023-2024, avec l’examen à l’Assemblée nationale prévue le 9 octobre prochain, du projet de loi visant à sécuriser et réguler l’espace numérique, adopté en première lecture au Sénat en juillet dernier. Le débat sera également l’occasion de se pencher sur les nouveaux pouvoirs donnés à l’ARCOM relatifs à la protection des mineurs, plus particulièrement à l’endroit des « services de communication au public en ligne » (articles 1 à article 3 du PJL). (consulter)

 

DMA : obligations renforcées de concurrence à partir du 6 mars 2024

Six entreprises, les cinq ex-Gafam (Alphabat, Amazon, Apple, Meta et Microsoft) et le chinois ByteDance, propriétaire de TikTok, ont été désignées le 6 septembre par la Commission Européenne comme des contrôleurs d’accès. Samsung n’a finalement pas été désigné comme tel alors que cet opérateur en avait évoqué la possibilité début juillet auprès de la Commission. Les contrôleurs d’accès seront soumis aux outils de régulation destinés à créer une concurrence loyale entre les acteurs du numérique, notamment au profit des PME et des start-up européennes, que détaillaient le 24 août l’Insight NPA. (consulter)

 

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