7 mars 2016

Temps de lecture : 3 min

Comment construire une ville musicale ?

Transformer votre cité en une immense salle de concert à ciel ouvert où les artistes et les infrastructures musicales sont à la portée de tous. Intéressant, non ? Quel visage cela peut-il donner à une ville ? Une conférence inédite a rassemblé dirigeants politiques, entrepreneurs et artistes pour fournir des réponses.

Transformer votre cité en une immense salle de concert à ciel ouvert où les artistes et les infrastructures musicales sont à la portée de tous. Intéressant, non ? Quel visage cela peut-il donner à une ville ? Une conférence inédite a rassemblé dirigeants politiques, entrepreneurs et artistes pour fournir des réponses.

« Si la musique est la langue des émotions », dixit Emmanuel Kant, elle dépasse le cadre intimiste de l’écoute privée. Derrière ses apparats subjectifs et sectaires, la muse Euterpe arbore un visage publique, universel et rassembleur. Dans les espaces communs plébéiens, la musique impacte notre environnement citadin quotidien et, forcément, les villes courtisent le quatrième art qui, en perçant le ciel comme l’écrivait Baudelaire, est capable de les transformer. Comment faire de la cité une immense salle de concert à ciel ouvert démocratisée et génératrice de croissance économique ?

La Music Cities Convention de Washington cherche des réponses concrètes en impliquant l’industrie musicale dans les réflexions sur les stratégies et les politiques de développement des villes. En rassemblant des exécutifs municipaux, des entrepreneurs locaux, des analystes de données et des musiciens, cette conférence internationale inaugurale, organisée conjointement par le festival The Great Escape, et l’agence Sound Diplomacy, a confirmé une envie commune à tous ces acteurs : améliorer et augmenter le rôle de la musique dans l’environnement urbain.

Si les Vieilles Charrues ou le Hellfest en France, Tomorrowland ou Wechter en Belgique et Coachella ou Sasquatch aux Etats-Unis constituent l’évènement annuel d’une petite ville anonyme, les Ardentes de Liège, les Eurockéennes de Belfort, le Printemps de Bourges ou le South By Southwest d’Austin incarnent, quant à eux, leur cité d’accueil. Ces attractions populaires, économiques, artistiques et médiatiques constituent même un produit d’appel à choyer. Comme l’ont suggéré les débats nourris par la centaine de délégués de la cinquantaine de villes représentées au Music Cities Convention, il existe pour les forces politiques et entrepreneuriales plusieurs leviers de promotion et de développement d’une scène musicale lucrative.

« Big easy » ou l’incarnation citadine du jazz

Auto-promue « capitale mondiale de la musique live », Austin devenue, en 2015, la destination la plus prisée des hipsters étasuniens, « a réalisé avec cette appellation une très belle opération marketing », estime Nikki Rowling, la tête de gondole du Austin Music Census. Pour la capitale du Texas, la musique représente un de ses dix premiers contributeurs économiques. Tout comme à Nashville, la Mecque de la country de Johnny Cash et Garth Brooks, et la ville de l’état du Tennessee, la musique constitue un pactole de plus de 7 milliards d’euros. Ou encore à Norrköping, en Suède, où le festival Bravalla rapporte chaque année plus de 10 millions d’euros. Autre parangon du quatrième art brandé et imprégné dans la construction identitaire de la cité : la Nouvelle-Orléans et son jazz estampillé « Big easy », tant chéri par Boris Vian.

Fan des millennials, segment démographique dépensier en consommation musicale, Austin a su d’abord se doter d’infrastructures pour accroitre l’offre de sa scène live, et donc créer de l’emploi. Posséder des espaces abordables de production et de consommation de musique constitue une nécessité pour une ville souhaitant consolider ce socle économique. Mais l’initiative la plus importante pour pérenniser le statut de cité mélomane passe par l’intégration de la musique dans des programmes éducatifs.

Présents dans la capitale fédérale de l’Oncle Sam (donc Washington alors qu’elle n’est pas présente dans le titre…) pour la Music Cities Convention, Youth on Record et Turnaround Arts, en apportent la preuve concrète. L’un est un programme d’apprentissage développé par des musiciens dans certaines écoles publiques de l’état du Colorado, l’autre un programme artistique éducatif cornaqué par la Maison-Blanche via le Council on the Arts & Humanities. Selon son directeur adjoint John Abodeely, la promotion et l’enseignement de l’art permettent d’améliorer les performances scolaires, notamment en mathématique et surtout auprès des élèves issus de classes sociales défavorisées.

L’éducation passe aussi, pour les villes, par faciliter la jonction entre la musique et les nouvelles technologies. Néanmoins, comme l’ont rappelé de nombreux délégués lors de la conférence d’octobre dernier, le soutien logique d’une mairie au renforcement de son écosystème digital diminue souvent les subsides accordés aux arts. Heureusement, l’ exemple d’Austin démontre a contrario qu’il est possible pour les deux marchés de croître en symbiose. Quant à Paris, on ne peut remettre en cause son implication dans cet art majeur. La ville lumière se transforme une fois par an en ville musicale avec la Fête de la musique. Et la sortie de terre de la Philharmonie de Paris confirme la capitale comme une cité incontournable dans la culture musicale.

Photo de Une : © JD Mason

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