1 février 2012

Temps de lecture : 4 min

Les classes moyennes bientôt dans la rue?

Désespérance pour eux, leur pays et le reste du monde, rejet des politiques, violence... Seule l'entreprise peut et doit changer les choses. Pendant 13 jours FreeThinking a observé sur son blog participatif 1000 contributions de 130 Français issus des classes moyennes. Constats en exclusivité pour INfluencia

Comment nos compatriotes ressentent-ils les événements qui marquent ce début d’année chargé tant sur un plan national qu’international (continuation de la crise de la dette, démarrage de la campagne présidentielle, durcissement du Printemps arabe, etc.). Quel impact la perte du AAA français aura-t-il sur leur pays et sur leur propre situation? Comment réagissent-ils aux propositions et idées du Gouvernement et de l’opposition pour sortir de la Crise? Comment envisagent-ils la suite de cette année charnière? A qui pourraient-ils accorder leur confiance? Qu’attendent-ils des grandes entreprises françaises, en ces temps troublés?

Autant d’interrogations fondamentales que  les 130 Français issus des classes moyennes, membres de la  plateforme collaborative FreeThinking  se sont posées du 4 au 17 janvier. Au total durant ces 13 jours de conversation,  plus de 1000 contributions  ont ainsi été postées, qui sont analysées  pour INfluencia par Véronique Langlois et Xavier Charpentier, DG de FreeThinking 2.0*.
    Janvier 2012: une très grande anxiété

Les Français sont inquiets, très inquiets même. L’atmosphère sur la plateforme participative FreeThinking, qui était déjà lourde depuis 2007, s’aggrave encore, devenant par moment franchement noire, certains ne voyant aucun motif d’espoir. Et cette désespérance se retrouve à trois niveaux : le monde, la France et leur vie quotidienne. Ainsi pour eux, la construction européenne et l’avenir de notre continent sont très mal engagés. Sur les questions plus géopolitiques ou de civilisation, comme celle du printemps arabe : là aussi, pas d’enthousiasme, plutôt de l’inquiétude.

Avec ce sentiment nouveau qui s’exprime dans beaucoup de commentaires: la peur diffuse d’une guerre, au Proche-Orient ou ailleurs. Quant aux  questions les plus éloignées de leur vie quotidienne : la lutte contre le changement climatique et le risque nucléaire, elles sont jugées impossibles à piloter à court terme!Pour leur vie quotidienne et celle de leur pays, même pessimisme: pour l’immense majorité, aucun espoir d’une sortie de crise «à horizon humain». L’éducation, l’emploi, les délocalisations, les inégalités, le pouvoir d’achat, la fiscalité: tout va de mal en pis…

     Les politiques au banc des accusés.

2ème constat: jamais le divorce avec les politiques n’est apparu aussi fort 100 jours avant le premier tour des élections présidentielles. Certains griefs ou certaines frustrations déjà présents sur le blog lors de l’élection de 2007 réapparaissent de façon spectaculaire à la lumière de l’actualité, pratiquement dans les mêmes mots. Avec une nuance de taille : dans un nombre impressionnant de posts, ce sont les mêmes arguments, le même réquisitoire qu’en 2007, l’exaspération en plus. Le déclin perçu provoque des réactions de véritable fureur sur le blog – à tel point que nombre de commentaires sont pratiquement impubliables en l’état, la violence devenant non seulement insultante pour les politiques de tous bords mais aussi ordurière dans son expression.

     Une campagne pour rien?
3ème enseignement majeur : le sentiment très présent sur ce blog que les élections présidentielles ne changeront rien à la situation actuelle sauf à envisager un changement radical de cap. Rien à attendre de bon de la droite comme de la gauche. Preuve en est avec le démarrage de la campagne, «sans idées». Et les contributeurs sont très nombreux à se demander s’il n’est pas temps de se tourner vers ceux «qui n’ont pas encore trempé dans les erreurs du passé». Les noms de Jean-Luc Mélenchon, François Bayrou et Marine Le Pen -choix possible et totalement assumé par une partie non négligeable des personnes interrogées sur ce blog- sont souvent cités.
     La perte du AAA: un non-évènement
La dégradation de la note française leur apparaissait comme prévisible et annoncée. Tant elle vient marquer au fer rouge celle  de la situation de notre pays, acter la dépossession de la France, aujourd’hui soumise à des logiques extra nationales et financières. Et sanctionner l’échec des politiques se succédant depuis 30 ans.
Toutefois tous ont le sentiment que les choses vont se dégrader davantage pour eux et pour la France : moindre respect versus le reste du monde, mais aussi annonce de difficultés de vie grandissantes : l’accès déjà difficile et demain impossible aux crédits, le durcissement de la fiscalité à leur désavantage. De nouveau les classes moyennes vont être les premières à payer la perte du triple A.

     La rue ou le repli?

4ème conclusion, tout aussi angoissante: les options envisagées par ces Français des classes moyennes à titre individuel, pour faire face à la Crise, peser sur les choix futurs et  répondre aux défis qui sont devant le pays sont radicales et inquiétantes : le repli sur soi, économique, social et politique (vote blanc) ou le recours à la rue. Jamais sur ce blog les appels à manifester, à descendre dans la rue pour en découdre directement  avec le pouvoir et s’opposer (à un modèle de société pour certains, à un inéluctable déclin pour d’autres…) n’avaient été aussi nombreux, aussi violents. Et surtout autant partagés : comme s’il y avait dans la conversation une contagion du ras-le-bol. Certains promettant explicitement un « troisième tour social » après les élections.

     Les grandes entreprises françaises: un pouvoir à mobiliser.
Il existe cependant encore une instance, dans l’esprit des contributeurs de la plateforme, qui n’est pas totalement impuissante: c’est l’entreprise, reconnue comme au centre du système ; une centralité qui s’exprime dans une véritable «Penalty of leadership». Parce qu’elle a le pouvoir de changer les choses, elle doit montrer que son pouvoir est utile, c’est à dire l’utiliser. Et nos concitoyens lui demandent de faire des propositions concrètes et d’agir économiquement, socialement et politiquement -au sens de la vie de la Cité-

Au fond, concluent Véronique Langlois et Xavier Charpentier, nos compatriotes attendent des entreprises qu’elles essaient «de reconstruire des passerelles entre l’économie, la société et la politique, qui aujourd’hui fonctionnent comme des  »mondes à part ». De tenter de recréer un futur commun et une destinée commune pour la France». Pas si simple que ça…

Isabelle Musnik

*FreeThinking est le laboratoire de conseil et de recherche créé en mars 2007 par Véronique Langlois et Xavier Charpentier, co-fondateurs et co-actionnaires aux côtés de Publicis Groupe. Depuis plus d’ un an, FreeThinking s’est lancée dans une plongée en eaux profondes au sein des classes moyennes françaises face à la Crise et aux enjeux de 2012, et réalise des études collaboratives

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