20 avril 2022

Temps de lecture : 4 min

Arte fait de la soirée de l’élection présidentielle une fiction live, Jour de gloire !

A l’occasion de la présidentielle, Arte multiplie les propositions innovantes sur les différentes plateformes où elle s’exprime. Marianne Lévy-Leblond, responsable des productions web et des projets transmédias, explique la manière dont la chaîne a cherché à s’adresser à tous les publics autour de ce moment collectif.

INfluencia : la fiction Jour de Gloire, tournée et diffusée en direct sur arte.tv le soir du second tour de la présidentielle, et le documentaire Premières voix collent au plus près de l’élection. Que disent-ils de la manière dont Arte s’est positionnée sur cet événement ?

Marianne Lévy-Leblond : en tant que média européen, Arte n’a pas vocation à faire ce que d’autres médias nationaux font très bien, ni à documenter le jeu politique intérieur français. À la direction du développement numérique, nous nous sommes intéressés aux enjeux autour de ce moment qui saisit l’ensemble de la société, en complément du travail des équipes de l’information. Nous étions particulièrement attentifs à nous adresser aux publics spécifiques que nous pouvions toucher sur les plateformes numériques – arte.tv ou les comptes de la chaîne sur les plateformes sociales – et aux manières particulières de raconter ce moment de la présidentielle, ce qui fait société… En s’adressant de manière variée à des publics différents sur des plateformes différentes, on réussit à toucher un plus grand nombre de gens. Avec des aspects assez différents l’un de l’autre, Premières voix et Jour de Gloire répondent à ces enjeux.

IN : Jour de Gloire est une vraie fiction dont la narration intégrera le résultat de l’élection à 20 heures. Qu’a-t-elle quand même de politique ?

 M.L.L. : le projet est vraiment enthousiasmant car les auteurs de Jour de Gloire, Jeanne Frenkel et Cosme Castro, ont créé un microcosme qui fait fortement écho à des questions débattues sur un terrain politique et qui nous agitent tous en ce moment. Cette histoire autour de deux frères prête une attention très forte au moment présent et est ancrée dans ce qui va se passer le 24 avril entre 19 et 20 heures. Le moment où le résultat sera annoncé à la télé est aussi celui où le frère Felix, qui revient d’Australie et n’aura finalement pas pu voter, revisitera son histoire familiale ponctuée par les élections présidentielles précédentes. Quel que soit le ou la gagnant(e), il va éteindre la télé et sera absorbé par le moment de retrouvailles avec son frère, qui est pour lui le plus important. Les personnages vont évidemment réagir au résultat mais le scénario continuera de se dérouler tel qu’il a été écrit. Il ne prévoit pas de fin différente selon qui gagne la présidentielle.

Les personnages de Jour de Gloire vont évidemment réagir au résultat de la présidentielle mais le scénario de la fiction continuera de se dérouler tel qu’il a été écrit

IN : peut-on parler d’une forme de contre-programmation sur le numérique par rapport à ce dont toutes les autres chaînes vont parler ?

M.L.L. : ça le serait si on était dans un esprit de concurrence… Pas mal de gens ne seront pas devant leur télé à regarder les soirées électorales. Cette expérience en temps réel leur propose de savoir quand même ce qui se passe le 24 avril à 20 heures. Pour les autres, Jour de Gloire sera en replay dès le lendemain et nous avons l’ambition que ce soit une belle fiction en replay.

IN : la tension propre à la présidentielle en faisait-elle un moment particulièrement propice à ce type d’expérience ?

M.L.L. : c’était en tous les cas l’occasion de capter un moment qui saisit la société française tout entière. Et il n’y en a pas tant que cela… 2P2L, un des producteurs, avait déjà produit Les Yeux dans les Bleus (sur l’Équipe de France qui a gagné la Coupe du monde de foot 1998, ndlr), qui était un autre moment très collectif. Jour de Gloire n’était pas un choix de confort, notamment en raison du direct, mais un projet très lié à l’histoire que les auteurs et réalisateurs voulaient raconter. Cette chorégraphie bien préparée et soutenue par des producteurs aguerris est une manière intéressante de documenter un moment qui traverse toute la société, que chacun vit de façon très politique et très intime.

Répétition de Jour de Gloire, mercredi 20 avril 2022, dans le village du Lot-et-Garonne où se situe la fiction (c) Thierry Breton.
IN : que voulait montrer Premières voix ?

M.L.L : ce documentaire s’intéresse à la formation de l’opinion en donnant la parole à quinze jeunes électeurs, entre 18 et 25 ans. Il a été mis en production très vite pour être réalisé au plus près de l’élection. Le dispositif en parole face caméra et la mise en scène attrapent l’attention sur le numérique et correspondent bien à l’âge des gens qui fréquentent arte.tv, YouTube et nos chaînes sociales. Dans le panel volontairement large sur le spectre de perspectives politiques et de la manière de s’investir, des jeunes qui témoignent, il y a clairement quelque chose à entendre sur la relation nouvelle et spécifique qu’ils ont avec cet aspect de la politique et de la représentation. Pour eux, le dispositif institutionnel de l’élection n’est pas une évidence absolue. On ne peut pas parler de désengagement mais leur engagement prend une autre forme.

Pour les jeunes, l’élection n’est pas une évidence absolue. On ne peut pas parler de désengagement de la politique mais leur engagement prend une autre forme

IN : ils se montrent très critiques envers les incursions des politiques sur les réseaux sociaux, notamment sur la vidéo d’Emmanuel Macron avec McFly et Carlito…

M.L.L. : McFly et Carlito prennent pour beaucoup d’autres et les jeunes pointent plutôt l’instrumentalisation des youtubers ou des influenceurs par les politiques. Mais il est très intéressant de voir à quel point ils sont aiguisés sur l’analyse des médias et qu’ils n’ont aucune naïveté sur le sujet.

IN : sur Snapchat, FAQ touche des publics encore plus jeunes. Quelle a été l’approche de la présidentielle ?

M.L.L. : FAQ s’adresse en effet à une tranche d’âge nettement plus jeune que celle qui est sur YouTube et arte.tv. Nous allons sur cette plateforme avec l’envie d’apporter des contenus différents de ce proposent d’autres éditeurs. Dans les formats très restreints qui correspondent aux usages de la plateforme, nous parlons de sujets importants – « C’est vraiment utile de voter ? », « Comment la guerre en Ukraine change tout », « rejetons-nous tous les personnes handicapées », « Féminicides : comment arrêter ces meurtres »… – de manière créative, sans condescendance à l’égard du public, ni simplifications abusives.

En résumé

Jour de Gloire de Jeanne Frenkel et Cosme Castro. Ces deux adeptes du « méta-cinéma » – ou cinéma en direct – ont écrit une fiction de 65 minutes qui sera tournée en direct dimanche 24 avril dans un village du Lot-et-Garonne, et diffusée sur arte.tv, YouTube, Facebook et dans une trentaine de cinémas en région. Après des années d’éloignement, deux frères se retrouvent dans leur village natal le soir du deuxième tour de l’élection présidentielle. L’un est resté s’occuper de sa mère atteinte de la maladie d’Alzheimer, tandis que l’autre était parti vivre sa vie en Australie. Ils y retrouvent une amie d’enfance, avec laquelle ils ont grandi, et le poète du village.

 

Premières voix de Justine Morvan et Kévin Noguès. Le documentaire en deux parties, en ligne sur arte.tv depuis le 5 avril, part à la rencontre d’une génération déçue par la politique traditionnelle mais bien décidée à faire bouger les lignes du jeu démocratique. Les quinze témoins vivent en ville ou à la campagne, sont étudiants et/ou actifs, militants ou simples observateurs.

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