4 mars 2024

Temps de lecture : 4 min

Les mots à connaitre en 2024 : Agri-résilience

Alors que le Salon de l’Agriculture 2024 – de la toujours première nation agricole européenne – s’est ouvert sur fond de polémiques, il a semblé opportun à Florence Hermelin (Unlock Potential), qui se penche chaque mois pour INfluencia sur les mots de 2024, de s’intéresser aux enjeux et perspectives de l’alimentation de demain.

L’histoire de l’agriculture n’a jamais connu une telle révolution dans son champ de compétences

Selon l’ONU, d’ici 2050, il y aura 2 milliards de bouches supplémentaires à nourrir dans le monde, non équiréparties et très majoritairement urbaines, alors même que les surfaces cultivables n’augmenteront que de 4%, dans un contexte où l’agriculture impactera probablement encore négativement l’environnement (forte émission de gaz à effet de serre, érosion et pollution des sols, déforestation, utilisation massive des réserves d’eau, atteinte à la biodiversité, …).

Mais, comme elle demeure surtout un des leviers puissants d’éradication de l’extrême pauvreté dans le monde et la meilleure des médecines, l’agriculture est appelée 
à se réinventer, certes sous la contrainte, tant en termes d’informations, de pratiques que de propositions alternatives pour une vision holistique et responsable de son impact. Avec la technologie comme alliée.

Un secteur, des activités exposés à des crises chaque fois plus redoutées

Les crises actuelles ont ravivé le besoin d’atteindre au plus près l’autosuffisance agricole et industrielle pour les pays. La France, dont la balance commerciale agricole est toujours nettement positive, importe déjà plus du tiers de ses produits alimentaires, notamment pour des articles dont la demande ne cesse de croître (un poulet sur deux est importé aujourd’hui comme la plupart de notre ratatouille (sic).

d’ici 2040, la viande de synthèse représentera 35% de la viande consommée dans le monde

Avec des terres arables déjà fort exploitées, certaines hypothèses se concrétisent comme l’intégration dans les nouveaux habitats urbains de potagers partagés en rooftop ou de fermes verticales, l’utilisation plus systématique des parkings, progressivement délaissés dans les villes, pour des cultures spécifiques comme les champignons, les algues ou les insectes ou encore les imprimantes 3D en capacité de créer des protéines de synthèse

Il y a tout un potentiel à imaginer au sein de l’agriculture de type cellulaire

Cette agriculture cellulaire, utilisant les procédés de la biochimie synthétique in vivo, propose une alternative aux protéines animales en présentant les mêmes caractéristiques nutritives et gustatives. Si les premières productions sont encore peu accessibles financièrement, AT Kearney prédit que d’ici 2040, la viande de synthèse représentera 35% de la viande consommée dans le monde. Ce qui paraît être une réponse adaptée à l’augmentation de 40% de la demande en protéines, du fait de la croissance démographique. Ailleurs, ce Lab to Fork prend la forme de souches pour créer des cultures résistantes dans les déserts et les océans, derniers espaces agricoles possibles à conquérir sur la planète.

À côté, le Farm to Fork, circuit court mis en exergue lors de la crise sanitaire, apparait de plus en plus comme une double réponse aux questions de pouvoir d’achat et d’environnement. Mais s’il marque un intérêt pour une nature de plus en plus invisibilisée
 dans nos villes, le lien devient plus indirect avec des magasins qui s’installent en ville pour guider le citadin perdu dans ses choix. Cette ré-intermédiation pourrait toutefois renforcer une forme de greenflation, perçue ou réelle, une des causes de la déconsommation de produits bio et inciter le consommateur à identifier à terme son propre circuit de producteurs.

L’alimentation sur-mesure, un marché qui pour l’agriculture est déjà estimé à 440 milliards de dollars

Certains de nos produits traditionnels aux protéines animales vont progressivement être réservés à une consommation plus occasionnelle, quasi nostalgique ou plus restreinte, comme le lait de vache pour le beurre et le fromage, le reste de la consommation courante se faisant sur une base végétale ou fermentée.

Vers un agriculture de précision

À l’instar d’Hippocrate, les individus commencent aussi à intégrer qu’une alimentation saine est garante de notre bonne santé, donc de notre longévité. L’agriculture dite de précision pourrait être à la source d’ingrédients ou d’aliments plus fonctionnels et personnalisés, pour répondre très concrètement à l’unicité de nos besoins, même préventivement, au-delà des régimes alimentaires qui, s’ils se complexifient (sans gluten, sans sucre, sans gras, végan, végétalien, flexitarien, interdits religieux…), sont loin de refléter toute la diversité des possibles. En effet, il semblerait que notre connaissance de la composition biochimique des aliments, et donc de leur impact sur la santé humaine, soit encore très limitée, comme celle du microbiote intestinal que nous partageons seulement à hauteur maximum de 25%. Un champ immense à explorer pour une alimentation sur-mesure avec un marché déjà estimé à 440 milliards de dollars, ce qui n’est rien si on l’intègre aux perspectives bien plus larges de celui du bien-être (meilleure immunité, meilleur sommeil, meilleure humeur, …) pour améliorer la santé physique et mentale.

La technologie au service de la transition agricole

Au-delà de ces recherches spécifiques, la technologie (robotique, drones, IA, data…) est une véritable alliée de la transformation agricole. Sur les aspects informationnels d’abord avec la nécessité de transparence et traçabilité des ingrédients, comme des produits, permises par la blockchain. Dans le perfectionnement des agriculteurs également dans leurs analyses, pilotages et monitoring de leurs terres pour anticiper les besoins, prévenir les aléas, prescrire les bons usages, dosages et précisions d’irrigation, gérer les flux et upcycler les déchets.

L’avenir est donc à une agriculture d’information, de précision et d’automatisation

Une aide précieuse pour développer une agriculture régénérative soucieuse du vivant et une meilleure maitrise de la supply chain agricole pour une plus grande productivité au bénéfice des exploitants. L’avenir est donc à une agriculture d’information, de précision et d’automatisation, revoyant les techniques d’apprentissage et d’application en profondeur.

De l’agriculture à l’agri-résilience, un pas de géant qu’il faut franchir

Pour beaucoup, les problèmes liés à l’alimentation de demain sont donc moins liés à des sujets de production que de répartition et de cultures adaptées aux aléas climatiques comme aux chocs technologiques, géopolitiques et démographiques futurs. C’est pourquoi, dans un monde où toute la chaîne de valeur est en train de changer et l’âge moyen de l’exploitant de vieillir, il serait peut-être temps de penser, transmission, formation et intelligence collective pour aboutir à une véritable agri-résilience !

 

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