11 janvier 2012

Temps de lecture : 3 min

L’ère des Business Punks

La technologie et l’entreprise sont les nouveaux terrains de jeu des punks. Manifeste pour une nouvelle façon d’approcher le business. Par Thomas Jamet...

Xavier Niel a fait fort. Bouleversant les codes du secteur mobile en lançant ses tarifs mobile à un prix jamais vu, en choquant les consommateurs en les traitant de pigeons, en taclant la concurrence avec une attitude d’une désinvolture rare tout en étant extrêmement préparée, le patron de Free a marqué de son empreinte une nouvelle ère : celle des business punks.

Il s’inscrit dans une tradition qui ne date pas d’hier mais qui a de plus en plus d’adeptes : les patrons punk. C’est comme si l’entrepreneur avait voulu suivre à la lettre les 15 commandements du manifeste du Punk Marketing, livre de Richard Laermer et Mark Simmons, paru en 2007 parmi lesquels figurent des conseils définitifs comme : «Faites vous des ennemis», «Prenez des risques ou mourez», «Exposez-vous», «N’écoutez pas vos consommateurs» ou encore «Ne laissez personne décider à votre place»…

Une attitude très punk appliquée au business, comme le mouvement exprimant une révolte contre les valeurs établies dans les années 70. Un mouvement sous-tendu par une farouche volonté d’indépendance. Très marqué par le mouvement dada, le nihilisme et les philosophie libertaires, ce mouvement accouche de groupes majeurs comme les Sex Pistols, inspirés par la créatrice Vivienne Westwood, et par le très influent manager Malcolm McLaren, très tourné vers le business, créant son monstre comme un produit marketing.

Paradoxalement, le punk en tant que mouvement musical avait en effet un côté très peu spontané. Les punks ne servent maintenant plus beaucoup d’épouvantails à bourgeois, et le terme « business punk » est né dans les années 80, pour parler de ces punks qui se font payer pour se faire photographier avec des touristes, comme le montre cette vidéo.

Un glissement qui montre bien que la culture a abandonné depuis longtemps le terrain de l’innovation radicale et l’ambition de faire bouger la société. Un récent article de Vanity Fair (“You say you want a devolution?”) montre que la culture est devenue un recyclage permanent (de Madonna à Lady Gaga), empli de nostalgie permanente et de perte d’appétit des créateurs, comme le montre également le livre Retromania.

Depuis quelques années, c’est l’entreprise qui est devenue le terrain de jeu de nouveaux punks : les chefs d’entreprise. Là où des génies comme Steve Jobs ou Bill Gates incarnaient la brillance, Richard Branson, le premier a incarné ce type de provocation, par sa liberté, sa grandiloquence très 80’s, sa propension à lancer des défis, à créer de nouveaux marchés et à sortir des sentiers battus.

De nouveaux entrepreneurs incarnent cette tendance dans tous les secteurs : les télécommunications ont Xavier Niel (vrai trublion venant du monde sulfureux du sexe et du minitel rose), le digital a Mark “I’m the CEO, bitch” Zuckerberg (ou encore plus punk Sean Parker), le monde du vin a le détonnant Gary Vaynerchuk avec sa Wine Library et la pub a Fred & Farid, connus pour leur franc-parler voire leur arrogance, leur philosophie d’agence très wild et pour leurs coups d’éclats comme leur #fingerwar.

Leur fameux compte Twitter a d’ailleurs récemment mentionné qu’on les avait traité de BUNKS (pour “Business Punks”). Signe des temps, un magazine allemand s’appele d’ailleurs Business Punk, dédié aux entrepreneurs modernes. On verra de plus en plus ce type de comportements et l’entrepreneur est une des figures dominantes des années à venir. Pour 3 raisons :

–       L’entrepreneur répond à la crise de leadership ambiante. Dans un monde où les Etats ne décident plus, où les institutions paraissent dépassées, il apparaît comme un centre de décision et de choix.
–       L’entrepreneur est un défenseur. On voit bien que les entreprises sans patron et les crises sociales comme celle que connaît SeaFrance souffrent d’un manque d’incarnation et les syndicats relaient le rôle de bouclier de l’entrepreneur-père.
–       L’entrepreneur crée de la richesse là où d’autres la gèrent. Il inspire forcément et la réussite individuelle a toujours fasciné (remember Bernard Tapie).

Une tendance à surveiller. Espérons qu’il y ait de plus en plus de business punks pour rafraîchir le monde des affaires !

Merci à @alexdlmr , @nesemertan et @newwavehooker

Thomas Jamet – NEWCAST – Directeur Général / Head of Entertainment & brand(ed) content, Vivaki (Publicis Groupe)
www.twitter.com/tomnever

Thomas Jamet est l’auteur de « Ren@issance Mythologique, l’imaginaire et les mythes à l’ère digitale » (François Bourin Editeur, en librairie le 15 septembre). Préface de Michel Maffesoli.

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