24 septembre 2025

Temps de lecture : 4 min

Comment Google utilise l’intelligence artificielle pour détecter et suivre les incendies de forêt en temps réel

Grâce à l’intelligence artificielle et aux images satellites, Google cartographie les incendies en temps réel dans 15 pays d’Europe et d’Afrique. Un outil précieux pour protéger les populations face à l’augmentation des feux de forêt liés au changement climatique.
ENVIRONNEMENT

L’été 2025 a, une nouvelle fois, été ravageur sur le front des incendies. Aux Etats-Unis et au Canada, 6,3 millions d’hectares ont été détruits par les flammes à la fin juillet. Le Dragon Bravo Fire a réduit en cendres l’historique Grand Canyon Lodge.

En Californie centrale, le Madre Fire a dévasté 33.000 hectares, faisant de lui l’un des plus grands incendies de la saison dans l’État. Plus près de nous, près de 1400 incendies se sont déclarés en Europe du Sud à la fin juillet ; avec près de 300.000 hectares brûlés, un chiffre 80% supérieur à celui enregistré lors des 19 dernières années.

La Grèce a connu son été le plus catastrophique en deux décennies avec plus de 50 départs de feu autour d’Athènes, Evia, Crète, Kythera en… 24 heures. Plus de 50.000 personnes ont dû quitter leur domicile autour d’Izmir en Turquie.

L’Espagne et le Portugal n’ont pas non plus été épargnés avec notamment un immense feu à Arouca, près de Porto, qui a mobilisé plus de 200 véhicules.

La France a aussi été touchée notamment près de Marseille et Montpellier. Ces scènes, désormais familières, illustrent une réalité inquiétante : en 50 ans, la surface sujette aux incendies en Europe a doublé.

Un suivi des incendies grâce à l’IA et les images satellites

Dans ce contexte, la technologie se met au service de la protection civile. Google, par exemple, déploie aujourd’hui une solution de suivi des incendies basée sur l’IA et les images satellites, déjà testée aux États-Unis, au Canada ou encore en Australie. Le dispositif a été récemment étendu à 15 pays supplémentaires, dont la France, l’Italie, la Grèce, la Croatie, le Portugal, l’Espagne, le Kenya ou encore la Turquie.

Le principe qui peut sembler simple sur le papier a été très compliqué à mettre en œuvre : Combiner des images satellites, des données gouvernementales et des algorithmes d’apprentissage profond pour détecter les incendies, suivre leur évolution et informer les populations exposées.

Les bordures des incendies sont ainsi cartographiées toutes les dix à quinze minutes, avec une précision rarement atteinte.

Grâce à cette technologie, il est désormais possible de visualiser quasiment en temps réel les zones affectées directement via Google Search ou Google Maps.

Des notifications sont également envoyées aux utilisateurs proches d’un feu de forêt, dans leur langue et selon leurs paramètres de localisation, ce qui peut s’avérer crucial en pleine saison touristique.

Ce système est pensé pour être universel : un vacancier italien en Croatie ou un randonneur français au Portugal reçoit les alertes dans sa langue maternelle, même à des milliers de kilomètres de chez lui.

En surimpression sur les itinéraires de Google Maps, les zones touchées permettent aussi d’éviter des routes à risque.

L’intelligence artificielle, pour distinguer les feux des nuages

Le modèle de suivi des incendies de Google repose sur des satellites géostationnaires, tels que GOES-16, GOES-18, Himawari-9 ou GK2A, capables de fournir des images continentales toutes les 10 minutes.

Mais c’est l’usage des fréquences infrarouges, notamment autour de 3,85 µm, qui permet de détecter les zones brûlées même à travers la fumée, un défi majeur pour tout système de surveillance.

Pour distinguer feu, fumée, nuages et autres phénomènes, Google a entraîné des réseaux neuronaux convolutifs (CNN) à partir de données issues des satellites à haute résolution MODIS et VIIRS. À cela s’ajoutent des modèles pour repérer les nuages et éviter les faux positifs, un enjeu technique majeur.

Le système bénéficie également d’un effet de super-résolution, en combinant les images de plusieurs satellites. Ainsi, malgré la résolution limitée de certains capteurs, les algorithmes parviennent à affiner les contours et à détecter des foyers d’incendie plus petits ou plus fugaces. Les angles du soleil et des satellites sont aussi pris en compte, permettant d’ajuster l’analyse aux conditions d’observation.

Déjà 1,4 million de personnes averties cet été

Pour évaluer la qualité de ses prédictions, Google compare les zones détectées en temps réel à ce qu’on appelle les « scars », ou cicatrices de feu, c’est-à-dire les contours des zones brûlées identifiés par les autorités une fois le feu éteint. L’objectif est double : améliorer la précision des alertes et renforcer la fiabilité du système.

Les résultats sont probants : jusqu’à 1,4 million de personnes ont accédé aux informations d’incendies via Google en une semaine cet été, avec plus de 40 feux cartographiés entre le Portugal, la Grèce, Chypre et le Kenya.

Lors de l’évaluation de ses modèles sur les feux de forêt américains, Google a démontré que son IA dépassait les systèmes traditionnels, notamment ceux basés uniquement sur les données de la NOAA.

Un signal fort de la puissance de l’apprentissage automatique, capable d’assimiler la complexité des phénomènes naturels là où les algorithmes classiques atteignent leurs limites.

« Une brique essentielle pour protéger les communautés, dans un monde qui brûle »

Au-delà de la performance technologique, ce système s’inscrit dans une démarche plus large : aider les populations à s’adapter aux effets du dérèglement climatique, de plus en plus visibles et violents. Incendies, inondations, canicules : Google entend mettre l’IA au service de la résilience.

« Ce n’est pas seulement une prouesse d’ingénierie. C’est une brique essentielle pour protéger les communautés, dans un monde qui brûle », expliquait récemment un responsable du projet.

L’initiative s’inscrit dans une série d’outils développés par Google pour anticiper et gérer les catastrophes naturelles : alertes sismiques, prévisions d’inondations, ou encore cartographies de chaleur urbaine.

Dans le futur, la firme californienne prévoit d’étendre ce service à davantage de pays, d’améliorer la précision de ses modèles et de fournir des outils aux services de secours pour mieux planifier les interventions.

De nouveaux projets comme FireSat, encore en phase de développement, visent même à offrir une détection ultra-précoce des départs de feu grâce à une constellation de satellites dédiés.

Alors que les incendies gagnent en fréquence et en intensité, la course contre la montre est engagée. Grâce à l’alliance de l’IA, de l’imagerie satellite et des données publiques, Google propose un allié technologique précieux dans la gestion de ces crises brûlantes.

La technologie, sans remplacer les pompiers ou les moyens humains, devient un soutien déterminant pour sauver des vies et peut-être un jour, des forêts entières.

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