Quand le beau devient possible : BEAU Magazine, le média qui ouvre des alternatives
Le pari audacieux de créer un média indépendant qui repose essentiellement sur ses lecteurs, et un minimum de pages de publicité. Un fil tiré avec un studio de création, le LABEAU, des guides, une version anglophone… et des sujets pour ouvrir des alternatives et inspirer. C'est BEAU ! Rencontre avec Charlotte Roudaut, directrice de la publication et rédactrice en chef et Elena Giannakou-Fèvre, coordinatrice éditoriale.
Charlotte Roudaut, directrice de la publication et rédactrice en chef et Elena Giannakou-Fèvre, coordinatrice éditoriale BEAU Magazine.
INfluencia : Vous avez créé BEAU Magazine en 2022 et ce mois-ci vous lancez une version anglophone ? Un nouveau challenge ? Pouvez-vous revenir sur la genèse du projet, vos intentions éditoriales de départ et vos ambitions avec cette nouvelle version anglaise ?
Charlotte Roudaut : Nous avons créé le magazine qu’on espérait en kiosque. Un média conscient et optimiste, capable de défricher et de raconter l’époque sous le prisme de ses possibles souhaitables. D’où son nom, BEAU. Car ce qui est beau à l’extérieur, l’est aussi à l’intérieur. C’est par exemple un bel objet, respectueux de la planète et de ceux qui le fabriquent, qu’on a envie de garder, de réparer, de transmettre. C’est le socle d’une société durable et désirable ! Nos valeurs s’étendent à toute notre chaîne de fabrication : impression en France, à la page, avec des encres végétales, sur un papier issu des forêts européennes durablement gérées. Notre cloud est français, notre banque est engagée dans les énergies renouvelables… Nous publions quatre numéros par an, un par saison. Nous tirons à 22 000 exemplaires et sommes diffusés dans tous les kiosques et chez les marchands de journaux, car nous venons d’être reconnus « presse d’information politique et générale ». Mais également dans les librairies, les concept stores et les musées, partout où le beau peut se trouver. Moins de trois ans après notre lancement, nous venons de lancer notre version internationale. C’est une incroyable avancée ! BEAU Magazine en anglais est distribué dans toutes les grandes villes du monde. Ça donne du baume au cœur.
IN. : Un pari audacieux et ambitieux quand on connaît les difficultés de la presse aujourd’hui… Quel est aujourd’hui votre modèle économique ? Les annonceurs vous suivent-ils dans cette aventure ?
Elena Giannakou-Fèvre : Effectivement la presse connaît une période difficile, mais nous sommes parvenus, avec un positionnement singulier et sincère, à fédérer un lectorat engagé et grandissant. BEAU Magazine est un média indépendant, pas de superpuissances derrière ! Notre modèle économique repose essentiellement sur nos lectrices et nos lecteurs, et sur un minimum de pages de publicité — sur le print, le digital et les réseaux sociaux. En complément du média, nous avons un studio de création, le LABEAU, qui permet de décliner nos expertises journalistiques, artistiques et visuelles pour les entreprises et les grandes maisons qui cherchent à prendre la parole sur la durabilité désirable. Notre action s’étend du conseil à l’événementiel, la création éditoriale ou la création de contenus (vidéos, podcasts, papier…). Nous sommes aussi très fiers de notre activité de maison d’édition, notre premier opus « Réparer » est un guide qui recense les meilleurs artisans de la réparation en mode et accessoires partout en France. Nous croyons beaucoup à ce genre de format utile qui reconnait et soutient celles et ceux qui rendent notre société durable. Nous avons pensé un écosystème complet.
IN. : Comment sélectionnez-vous les personnalités qui s’expriment dans vos pages ? Vous interdisez des sujets ?
C.R : Aucun interdit, juste l’exigence du sens dans chaque initiative que l’on raconte ou dans la parole donnée à nos invités : artistes, écrivains, hommes politiques, céramistes, créateurs de mode, philosophes… Dans nos 196 pages, nous cherchons à ouvrir des alternatives, prescrire, faire bouger les exemplarités. Inspirer.
IN. : En quoi consiste votre approche de « l’information court-circuit » ?
E. G-F : On a décliné le circuit court, déjà bien intégré dans l’alimentation, dans l’information, en tissant une toile. Notre rédaction se compose essentiellement de correspondants installés en province et dans différentes villes étrangères. Cela réduit notre empreinte carbone et permet de recevoir une information de première main et d’analyser les conséquences sur le terrain.
IN. : Quels sont les sujets qui ont été les plus marquants, inspirants, innovants… ?
E. G-F : Tous ! Comme ça, nous pourrions citer le portrait de ce semeur de coraux, l’histoire inédite et étonnante de ces deux sœurs qui réinventent à New York la laverie automatique en un espace de networking et d’engagement écologique. Un reportage dans une école en Gironde qui annihile le genre. Mais aussi l’audace de ces féministes à skate en Bolivie. La poésie de ce café où l’on vient s’écrire une lettre à soi au japon… Et des dossiers comme : Le bois est-il le nouveau bien commun ? La nature devrait-elle être représentée dans les conseils d’administration ?
IN. : Quelles sont vos ambitions pour demain ?
C.R : Développer l’édition de nos guides, car la prescription d’adresses occupe une place importante dans notre promesse éditoriale. Ça concrétise notre changement de société. Développer également des hors-séries, et des formats pour donner encore plus la parole à cette société civile créative et audacieuse.
IN. : Le dernier BEAU Magazine vient de sortir… un teaser sur les sujets à ne pas manquer…
C.R : On a voulu renouer avec le rêve Américain avec cet incroyable portrait de Robert Redford, l’Américain idéal, sous la plume de la romancière Anne Pauly. Provoquer une rencontre au sommet du pouvoir entre la présidente de l’Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet et le président du Goncourt Philippe Claudel pour parler racines, démocratie et solitude. Dénicher les soins cosmétiques intelligents, qui s’adaptent à la peau et à l’humeur. Analyser les liens étranges qui unissent l’homme à son animal. Voir la forêt autrement en spartant en ballade avec une cueilleuse survivaliste capable de cuisiner des fougères et de repérer un champignon à des kilomètres à la ronde. Faire le tour du monde à bord d’un train à vapeur… Quoi de mieux ?