IA générative : un tournant stratégique pour les agences marketing, mais à quel prix ?
Malgré son potentiel transformateur, l’IA générative reste sous-utilisée par les marques. Les agences en assument seules les coûts, sans retour sur investissement clair, selon une étude Forrester.
L’adopter, oui… mais comment ? Absorber ses coûts, certes… mais pour quels retours sur investissement ? Une récente enquête du cabinet d’études Forrester met en lumière à quel point l’industrie du marketing et de la publicité se trouve à un véritable tournant avec l’arrivée et le développement accéléré de l’intelligence artificielle, en particulier l’IA générative.
Parmi ces premiers adopteurs, nombreux sont ceux qui mesurent déjà l’ampleur des défis à venir. Et fait surprenant : les dirigeants les plus familiers des technologies sont souvent aussi les plus sceptiques quant à leur mise en œuvre. En Amérique du Nord, plus de la moitié (53%) anticipent des difficultés, contre 36% en Europe et 35% en Asie-Pacifique. Et à ce jour, à peine plus d’un quart (27%) des marketeurs B2C affirment avoir des projets d’IA générative effectivement en phase de production.
Ce faible taux d’adoption s’explique en grande partie par la complexité des conditions de déploiement. Seules les entreprises ayant une approche holistique, intégrant qualité des données, gouvernance, respect de la vie privée et enjeux éthiques, semblent en mesure d’accélérer leur transition vers la genAI. Les cas d’usage les plus répandus ? L’analyse et l’amélioration de la qualité des données. Deux domaines critiques, mais qui ne représentent encore qu’une fraction du potentiel de la genAI. Si la maîtrise des outils martech est jugée comme la compétence la plus stratégique, peu de cadres ont encore compris que l’IA générative peut aussi faciliter leur usage, notamment via des agents conversationnels internes qui simplifient les interfaces et les processus. Au-delà de la technique, l’intelligence artificielle est en train de redéfinir en profondeur la façon dont les agences marketing créent de la valeur : en augmentant la productivité, en accélérant les insights, en soutenant l’idéation créative, en boostant la vitesse de production, et en optimisant l’activation média et search.
Des résultats impressionnants
Certaines entreprises l’ont bien compris. C’est le cas de Club Med, qui, grâce à une organisation agile et à un comité éthique transversal, a su lancer plusieurs projets en IA générative. « Quelques mois seulement après le lancement, nos chatbots alimentés par l’IA sur WhatsApp représentent environ un tiers de nos interactions clients dans le monde, et jusqu’à 50 % dans certains marchés », se réjouit son directeur marketing, digital et technologie, Quentin Briard. Du côté des agences, des groupes comme Monks, Omnicom, Publicis Groupe ou WPP intègrent également l’IA dans leurs offres et collaborent avec des partenaires technologiques majeurs comme Adobe, Amazon, Google ou NVIDIA. Pourtant, ces agences ne sont pas rémunérées à la hauteur de la valeur créée. Pire : elles en supportent seules le coût.
Qui payent les frais?
Aux États-Unis, 75 % des agences marketing financent elles-mêmes le développement et l’intégration de l’IA générative, sans le répercuter sur leurs clients. C’est ce que révèle une étude de Forrester menée en collaboration avec l’association américaine des agences de publicité, plus connu sous le nom de « 4A’s » https://www.aaaa.org/. Une large majorité du secteur accepte donc d’absorber une charge financière considérable, avec un impact potentiel non négligeable sur leur rentabilité à moyen terme.
« L’IA transforme la manière dont les agences marketing créent de la valeur, mais elles ne sont pas rémunérées à la hauteur de cette création de valeur », regrette Thomas Husson, vice-président et principal analyste chez Forrester.
Ce même Thomas Husson nous alertait déjà en novembre 2022 sur la réorganisation progressive des équipes marketing, affirmant que « les patrons créatifs allaient être peu à peu remplacés par des responsables du marketing produit »https://www.influencia.net/les-patrons-creatifs-vont-etre-peu-a-peu-remplaces-par-des-responsables-du-marketing-produit-thomas-husson-forrester/ La question reste donc entière : comment l’IA générative peut-elle devenir un levier de transformation durable, sans fragiliser l’écosystème qui l’intègre en premier ? A vos stylos, vous avez une heure…