19 novembre 2025

Temps de lecture : 5 min

Les campagnes TikTok qui ont tout gagné… celles qui ont dérapé en 2025, et ce qu’on doit en retenir

En 2025, TikTok n’est plus seulement un réseau social, c’est à la fois un révélateur culturel et un mastodonte publicitaire. Quelles campagnes ont tout gagné et lesquelles ont dérapé en 2025 ?

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  • TikTok revendique près de 1,6 milliard d’utilisateurs en reach publicitaire, avec un temps moyen d’environ 35 heures par mois passé sur l’app dans le monde, jusqu’à 44 heures aux États‑Unis.

    Ici se fabriquent récits, icônes, ratés, délivrances. Autrement dit, la plateforme est devenue un passage obligé pour qui veut peser sur l’imaginaire des Gen Z et des jeunes millennials, mais aussi sur leurs décisions d’achat.

    Ce n’est donc plus seulement une question de visibilité, mais de pertinence : pour les marques, la vraie décision n’est plus « faut‑il y être ? », mais « comment y être sans faire n’importe quoi ? ».

    Sur cette scène permanente où tout peut devenir trend, les marques n’ont plus le contrôle absolu de leur image, et c’est précisément là que tout se joue. Panorama des campagnes qui ont gagné… et de celles qui ont implosé.

    1) Les campagnes qui ont tout compris

    Jet2Holiday – L’ironie comme moteur de désir

    Jet2, une compagnie aérienne britannique à bas prix qui propose des forfaits vacances via sa filiale Jet2holidays. Les publicités montrent des visages radieux, des paysages de rêve ensoleillés, où tout le monde se prend par la main.

    Partie du jingle de ces publicités, devenu mème (#NothingBeatsAJet2Holiday), la campagne est détournée par les utilisateurs qui l’associent à leurs pires galères de vacances. Là où beaucoup auraient cherché à corriger la trajectoire, Jet2Holiday assume le détournement et l’intègre dans son discours. 

    La marque lance même un challenge avec Jess Glynne (3,2 M d’abonnés sur TikTok). Résultat : plus de 920 M de vues cumulées, une hausse de +18 % de mentions positives et une notoriété qui dépasse largement son marché initial. La marque transforme le badinage communautaire en complicité assumée avec une image plus sympathique, parce que partagée.

    Leçon : la viralité récompense les marques qui acceptent de perdre le contrôle et d’en faire une force.

    Toblerone – Le prank devenu rituel collectif

    Une mère de famille rentre de voyage, sa petite fille accourt vers elle… avant d’éclater en une crise de larmes magistrale. Pourquoi ? Pas de Toblerone dans les valises. Sauf que tout est faux, la scène est orchestrée par la marque pour créer le buzz. Et ça marche !

    465 millions de vues plus tard, le chocolat n’est plus un produit : il devient le symbole affectif du moment où l’on part. Avec un message en filigrane : pas de départ réussi sans Toblerone.

    Leçon: quand une campagne devient un moment partagé, elle quitte la publicité pour entrer dans la culture.

    @cinestrixcreative

    That “spoiled kid at the airport” moment has been viewed millions of times, but here’s the twist – it was not real. Toblerone staged the whole thing to spark viral attention. Do you see this as genius advertising or deceptive tactics? 🤔♬ original sound – cinestrixcreative

    Netflix – La co-création portée par un community management ultra-culturel

    Netflix ne se contente pas de diffuser des extraits. La plateforme pratique un community management d’une réactivité remarquable : références culturelles précises, humour complice, réponses personnalisées, détournements assumés.

    L’équipe social observe les trends en continu et sait y intervenir au bon moment. Chaque commentaire, chaque clin d’œil, chaque micro-interaction peut devenir un mème.

    La marque se montre présente non pas en surplomb, mais dans la conversation, en invitant la communauté à réinterpréter ses contenus. Les créateurs deviennent co-auteurs, les fans prolongent les récits, la plateforme suit le mouvement plutôt que de l’imposer.

    Leçon : la conversation prime sur la diffusion. Une marque n’existe sur TikTok que si la communauté accepte de jouer avec elle.

    @matiktactu Non mais le comunity manager de @NetflixFR cest une pepite!!! Il est trop fort! Non mais plus serieusement!! C’est quand vous voulez hein #bridgerton♬ Funny – Gold-Tiger

    2) Quand la mécanique se grippe

    Bill’s Burger – La fausse proximité

    En 2025, Bill’s Burger est au centre d’un bad buzz suite à une critique virale de la TikTokeuse Gloria Mya (280 000 abonnés), qui reproche le prix élevé et le manque de saveur de leur smash burger. Sa vidéo, vue plus de 3,1 millions de fois, déclenche rapidement des milliers de réactions.

    La marque choisit d’y répondre directement en accusant la créatrice d’être « insultante ». Cette prise de parole défensive est immédiatement perçue comme une attaque personnelle, mobilisant la communauté de Gloria Mya et amplifiant le bad buzz. Sur TikTok, une critique culinaire n’est jamais un procès: c’est une conversation. La marque a donc été sanctionnée pour son manque d’ouverture.

    Consciente de l’impasse, Bill’s Burger change ensuite de posture. Elle adopte l’autodérision, joue sur le second degré, et réintègre sa proposition dans la grammaire communautaire. Ce repositionnement permet d’apaiser les tensions et de réengager le public.

    Leçon : Sur Tiktok (et les réseaux en général), on ne réagit pas à la critique par la défensive et encore moins l’attaque. On accueille les remarques avec ouverture, humour et si possible autodérision.

    @gloriaamya Les gars je teste Bills Burger .. franchement c’est tellement alarmant de fixer des prix comme ça pour ce type de produit, et puis de faire tout une propagande autour 😪 #reviewfood#foodtok#foodcritic#tiktokfoodie#burger♬ son original – Mya Alméda

    Body Minute – L’insistance contre-productive

    Body Minute incarne la chute dans la communication de crise. Après qu’une TikTokeuse humoristique, Laurène Levy, a parodié une séance d’épilation au sein de leurs salons, la marque choisit le recours judiciaire. Procédures en chaîne, huissiers…

    Plus grave, elle a recours à des deepfakes générés par IA pour discréditer l’influenceuse, multipliant faux comptes et vidéos virales dénigrant la créatrice.

    Cette stratégie, non seulement puérile mais aussi dangereuse éthiquement, a déclenché un boycott massif sur la plateforme. La marque reste sourde aux codes et à la communauté TikTok s’enfonçant dans la spirale du bad buzz.

    Leçon : La vulnérabilité assumée vaut toujours mieux que la défense agressive.

    @tf1info L’institut de beauté Bodyminute est en guerre contre l’influenceuse Laurène Lévy. L’affaire prend des proportions lunaires. La marque n’a pas du tout bien pris une vidéo humoristique tournée par l’influenceuse. Le PDG répond à Top Info. #reportagefr #bodyminute #laurene♬ son original – TF1 INFO

    France Travail – L’humour sans conscience

    France Travail a publié sur TikTok un clip pour faire la promotion du métier d’IBODE (Infirmier de Bloc Opératoire). Voulant jouer la carte de l’humour, le clip glisse vers le salace et les stéréotypes.

    « Je suis, IBODE, bien évidemment je manipule des gros instruments et des scies »…

    Tentant de surfer sur la trend absurde “Bien sûr que”, France Travail rate sa cible et la campagne dénoncés massivement par la communauté TikTok.

    L’absence de prise en compte des sensibilités et un manque de relecture, dans un secteur aussi exposé, ont achevé de transformer l’opération en polémique nationale.

    Leçon : La viralité n’excuse jamais l’aveuglement éthique.

    3) Ce que 2025 nous apprend

    En 2025, il faut cesser d’aborder TikTok comme un simple canal de diffusion. Ce n’est pas un média, c’est une culture. Une culture mouvante, collective, fondée sur l’ironie, la réinterprétation permanente et l’expression émotionnelle brute. Rien n’y reste stable, et c’est précisément ce qui la rend puissante.

    Dans cet environnement, les marques qui réussissent sont celles qui acceptent de ne plus avoir le monopole du récit. Elles pratiquent le lâcher-prise, s’exposent sans se surjouer et laissent la communauté réagir, détourner, s’approprier. Elles ne cherchent pas à contrôler le sens, elles cocréent. Elles comprennent que l’adhésion ne se décrète pas, elle se mérite par cohérence, écoute et humilité.

    À l’inverse, celles qui échouent s’arc-boutent sur leurs réflexes d’ère publicitaire. Elles répondent trop vite, trop fort, ou trop « friendly ». Elles tentent d’imposer une proximité artificielle, ou continuent de penser en termes de « campagnes » fermées, alors que TikTok impose des écosystèmes conversationnels vivants, imprévisibles et souvent incontrôlables.

    Or, ce que montrent les campagnes de cette année, c’est que les compétences nécessaires sur TikTok: écoute, humilité, lâcher-prise, réactivité, humour, cocréation… sont en réalité celles que toutes les stratégies de communication devront maîtriser demain. Les frontières entre publicité, culture, communauté et création sont en train de se dissoudre. Les marques n’y survivent que si elles savent improviser. Et surtout, accepter que l’autorité n’est plus au centre. La conversation l’est.

    En somme, TikTok n’est pas seulement une culture : c’est la répétition générale du futur de la communication.

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