5 janvier 2011

Temps de lecture : 2 min

2011, apologie du lâcher prise

Les débuts d’année sont traditionnellement le moment des bonnes résolutions. Mais dans le monde digital dans lequel nous sommes entrés, peut-on vraiment parler encore d’un pouvoir sur nos destinées?

Les débuts d’année sont traditionnellement le moment des bonnes résolutions. Mais dans le monde digital dans lequel nous sommes entrés, peut-on vraiment parler encore d’un pouvoir sur nos destinées?

Avec les nouvelles technologies, nous sommes entrés de plain-pied dans une réalité assistée par ordinateur. Nos vies semblent guidées par nos outils smart et high-tech. A tel point qu’une mise à jour sur iPhone peut quasiment provoquer une pagaille monstre un jour de rentrée car la fonction réveil utilisée par des milliers de personnes connaît un bug. Notre état de dépendance par rapport aux machines semble inéluctable. Comme le décrivait un récent et brillant article de WIRED*, nous sommes maintenant engagés «dans une danse permanente avec les machines».

Mais une danse dans laquelle les machines ont déjà le contrôle. C’est nous qui vivons dans leur monde, pas le contraire: des algorithmes de Google aux systèmes financiers de Wall Street en passant par nos cartes à puces électroniques. L’intelligence artificielle est de plus en plus présente dans nos vies, au quotidien, et ce de manière profonde.

Le rêve de Descartes («se rendre maître et possesseur de la Nature») a donc, semble-t-il, fait son temps. Nous avons créé des outils qui nous assistent et sur lesquels nous nous reposons. Des mécanismes de plus en plus sophistiqués qui s’auto-suffisent et s’auto-améliorent. Leur vie propre est certes une chance car elle fait progresser nos possibilités… mais est-ce un danger? Faut-il se battre contre les machines ou les accepter?

Le philosophe Hans Jonas a souvent été accusé, suite à son ouvrage «Le Principe Responsabilité» (1979), de refuser toute technique ou progrès pouvant se poser en danger contre l’humanité, celle-ci devant être préservée à tout prix. Il est en tout cas vu comme un penseur du contrôle, de la maîtrise, des limites, proposant de poser ces conditions au progrès et à la technique. D’autres penseurs comme le directeur du MIT américain Rodney Brooks proposent d’arrêter de se battre contre les machines, et simplement essayer d’en tirer le meilleur.

L’ingénieur Jean-Pierre Dupuy prophétise quant à lui que la logique de non-maîtrise devrait a contrario inéluctablement être posée comme postulat de toute recherche scientifique. Pour Dupuy, l’ingénieur de demain serait plus un explorateur et un expérimentateur qu’un inventeur. Il ne serait pas «un apprenti sorcier par négligence ou par incompétence mais par finalité (…) et ses succès se mesureront plus à l’aune de créations qui le surprendront lui-même que de la conformité à un cahier des charges».

C’est cette citation, mise en perspective par le sociologue Jean-Michel Besnier dans son magnifique ouvrage – « Demain les posthumains – Le futur a-t-il encore besoin de nous? » qui pose le postulat qu’il est temps, en quelque sorte, et à tous les niveaux, d’accepter qu’on ne maîtrise plus nos destins et d’entrer dans une ère de lâcher-prise par rapport à la technique et aux technologies, et qu’ainsi tout sera possible.

Le principe d’immaîtrise a une vraie vertu, qui peut nous permettre de renouer quelque part avec une certaine transcendance via l’art du laisser-faire. La philosophie taoïste du Wu-Weï pose cela en exergue: la déprise vaut peut-être mieux que la maîtrise.

 Thomas Jamet

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