15 septembre 2025

Temps de lecture : 3 min

Créateurs de contenu : pression permanente, salaires misérables, précarité… le retour à la réalité est rude

Une enquête européenne de Kolsquare révèle les difficultés des influenceurs : faibles revenus, pression mentale, sexisme, et inquiétudes face à l’IA. La France, à la traîne.
INFLUENCE

Le métier fait encore souvent rêver. Influenceurs aux millions d’abonnés qui flambent au volant de leurs bolides à Dubaï, personnalités du web couvertes de cadeaux de grandes marques, invitations VIP aux plus beaux festivals de la planète… Des millions d’internautes rêvent de se lancer dans l’aventure de la création de contenus sur les réseaux sociaux.

Le mot « aventure » semble toutefois bien éloigné de la réalité lorsqu’on lit la dernière étude de Kolsquare sur la réalité vécue par les créateurs de contenu professionnels en Europe. Le terme « pari » semble plus judicieux.

Certains pourraient même parler de « mission impossible ». Salaires misérables, précarité totale, inégalités homme/femme criantes, pression psychologique permanente… Voilà un métier dont la réalité est, hélas, bien éloignée de la fiction rêvée par beaucoup. Et la France figure parmi les mauvais élèves.

Cette enquête du leader européen du marketing d’influence livre une analyse sans filtre de leur activité, leurs revenus, leurs valeurs, leurs difficultés et leurs espoirs. Elle s’appuie sur les témoignages de 783 créateurs dans six pays (France, Allemagne, Espagne, Italie, Royaume-Uni, pays nordiques) ayant au moins 5000 abonnés et intitulée “Voices of the Creator Economy 2025”.

56% des créateurs gagnent moins de 1000 euros par mois

Le chiffre est impressionnant : pour la moitié des créateurs français, la création de contenu représente moins du quart de leurs revenus. Seulement 26% d’entre eux expliquent que cette activité est leur job à temps plein, un chiffre légèrement inférieur à la moyenne européenne (28%) mais nettement plus bas que celui affiché dans les Pays nordiques (31%) et en Italie (35%).

Cette particularité s’explique. 56% des créateurs français gagnent moins de 1000 euros par mois sur les réseaux. Ils sont même 41% à toucher mensuellement moins de 500 euros. Seuls les Espagnols (53%) font pire. Les Britanniques (21%), les Italiens (20%) et les Allemands (19%) s’en tirent beaucoup mieux.

Nos voisins d’outre-Rhin sont ceux qui gagnent le plus. 41% affirment ainsi recevoir un revenu mensuel compris entre 1000 et 4999 euros par mois, soit 9 points de plus que la moyenne européenne et 13 points de plus que la France…

Inégalités de revenus criantes et attaques sexistes

Les créateurs dans notre pays sont également ceux qui ont le plus tendance à tout gérer eux-mêmes (77%) alors que les Allemands (57%) et les Italiens (56%) passent davantage par des agents et externalisent certaines de leurs tâches. Un « luxe » sans aucun doute lié à leurs revenus plus conséquents.

Le sexisme ne semble pas non plus avoir pris fin avec l’essor du web, au contraire. Bien que l’influence soit un secteur jeune et largement féminin, l’étude de Kolsquare confirme l’existence d’un écart salarial net entre les genres.

Les femmes sont bien plus nombreuses à se situer en bas de l’échelle des revenus : 38% gagnent moins de 500 euros par mois grâce à la création de contenu, contre 23% des hommes. À l’inverse, 32% des hommes, contre 20% des femmes, déclarent toucher plus de 3000 euros.

Le machisme est aussi présent dans les commentaires des internautes. Parmi les créateurs ayant expérimenté un comportement négatif en ligne, les femmes sont plus souvent la cible de commentaires sexistes et liés au genre (48%) et de critiques sur leur corps (52 %). Les hommes, quant à eux, sont plus fréquemment visés par des commentaires homophobes (18%).

Le trolling et les insultes personnelles, en revanche, sont une expérience commune tant pour les hommes (70%) que pour les femmes (69%). Si moins d’un tiers des influenceurs déclarent avoir été la cible de harcèlement en ligne, le fardeau émotionnel et professionnel de la performance constante qui pèse sur leurs épaules est constant.

Deux-tiers des créateurs sont stressés par leur travail

Dans une industrie fondée sur la visibilité, les problèmes systémiques, la pression mentale et les inégalités façonnent le quotidien de nombreux créateurs. Des délais serrés aux blocages créatifs, en passant par la nécessité de publier constamment ou de gérer l’équilibre travail/vie personnelle, les deux-tiers des créateurs européens déclarent être parfois, souvent ou toujours stressés par leur travail de création de contenu.

Les Français sont ceux qui souffrent le plus de ce mal-être. 27% affirment ressentir constamment ou souvent du stress lié à leurs activités sur les réseaux. Cette proportion est nettement supérieure à celle enregistrée au Royaume-Uni (21%), en Allemagne (20%), en Espagne (19%), en Italie (18%) ou en Scandinavie (11%).

L’IA, outil de productivité ou moyen de les remplacer ?

Lorsqu’on évoque leur avenir, les influenceurs ne cachent pas leur inquiétude liée aux changements d’algorithmes sur leur travail.

L’instabilité des revenus de monétaires est leur troisième principal sujet de préoccupation, juste derrière l’impact de l’intelligence artificielle sur leurs activités.

Plus de 80% des personnes interrogées l’ont déjà adopté. 30% l’utilisent même quotidiennement (23% en France) et 28% plusieurs fois par semaine (28% dans l’hexagone). Mais beaucoup se demandent si cette nouvelle technologie ne va pas permettre aux marques de diffuser leurs contenus sur les réseaux en se passant d’eux. L’avenir le dira.

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