23 février 2016

Temps de lecture : 5 min

Les Z, ces esthètes décomplexés

Comment évolue la génération Z au quotidien et quelles sont ses grandes aspirations ? Radioscopie du phénomène avec une série d’articles sur la mode, le numérique et les relations au travail.

Comment évolue la génération Z au quotidien et quelles sont ses grandes aspirations ? Radioscopie du phénomène avec une série d’articles sur la mode, le numérique et les relations au travail.

Avec les Z, c’est tout ou rien. D’un côté, ils rejettent les codes prédéfinis pour sortir des cases en affirmant un style basique, neutre et discret. De l’autre, ils vont dans l’excès, l’exubérance et l’autodérision afin de prendre de la distance et sortir de l’atmosphère morose dans laquelle ils sont nés.

 Le style, expression identitaire par excellence

Une culture de l’esthétique

Pour tous les ados, la mode -et le style en général- tient une place importante dans leur quotidien. En effet, les vêtements et accessoires sont des signes identitaires très forts à cette étape de la vie; ils représentent un moyen à la fois accessible et ostensible pour s’exprimer et construire son image. Ils y consacrent une bonne partie de leurs dépenses : l’Institut Français de la Mode a évalué à 720 € le budget annuel des jeunes Français pour leurs vêtements. Si ces considérations sont surtout une question d’âge, la particularité de cette génération réside dans son obsession croissante pour le beau via la culture blog et « fooding » qui fait défiler des milliers de photos léchées qu’ils regardent à longueur de journée.

Une multiplicité de looks

Fini le total look, place au jeu sur les marques et les époques. Reflet de la société numérique, les jeunes mixent, zappent, décloisonnent. En bref, ils cassent les codes et s’inventent eux-mêmes leur propre sens du style. Ils ne cherchent plus à plaire aux autres mais à raconter qui ils sont et à quoi ils appartiennent. L’agence britannique de conseil en tendances marketing, The Futures Company, rapporte en 2015 que 47% des jeunes interrogés (âgés de 12 à 17 ans) disent « attacher une grande importance au fait que leurs vêtements soient à la mode », contre 65% pour la génération précédente lors d’une enquête de 1999.

Ces fashionistas modernes sont capables de combiner du vintage chiné aux puces avec des pièces en série limitée de jeunes créateurs ou avec des basiques Primark; l’important étant pour eux de sortir des cases et de se définir dans une multipicité de styles de vie. Cela se traduit également par l’émergence du vêtement connecté, qui combine réel et digital en un même objet. Le photoprinting et l’impression 3D, par exemple, permettent de multiplier les possibles en termes de créativité : les nouvelles technologies et l’Internet des objets modifient la réalité pour parvenir à des résultats singuliers.

 Simplicité, neutralité et discrétion

Besoin de rien ou presque

Ne voulant surtout pas être stigmatisés par des étiquettes, les Z s’émancipent des codes vestimentaires de leurs prédecesseurs. D’où la déferlante du style « normcore » (combinaison de « normal » et « hardcore »), qui rejette radicalement toute notion de style pour une apparence plus normale que la normale. Bien moins matérialistes que ceux de la génération Y, les Z composent leur vestiaire de vêtements confortables et pratiques qui leur confèrent un look basique sans prétention. Evita Nuh, jeune indonésienne de 16 ans et auteure du blog de mode, The Crème de la Crop, explique qu’on est à la mode lorsqu’on donne en réalité l’impression d’être complètement indifférent à celle-ci. Selon elle, « il s’agit du même look que celui arboré pour se rendre au lavomatic du coin : sweatshirts informes, casquettes de baseball, jogging et baskets version 90s ».

Evita Nuh, auteure du blog de mode The Crème de la Crop (Credit : Maharani Nuh)

Ni fille, ni garçon

La génération Z rejette de plus en plus la notion de genre. Pour elle, l‘orientation sexuelle n’est plus un sujet : ses membres se considèrent avant tout comme des individus et souhaitent vivre à leur manière. Le vestiaire unisexe est donc de mise, avec des créateurs de mode de plus en plus nombreux à lancer des collections qui laissent place à une représentation plus floue, plus fluide aussi, des identités, des codes et des rôles. Mannequins transgenres, vestiaires et packagings neutres, émergence de la pan sexualité… les uns empruntent les codes des autres et vice versa. Les frontières entre les hommes et les femmes s’effacent : on parle désormais d’identité, de personnalité.

Jaden Smith, 17 ans, fils de Will Smith, habillé d’une robe lors de la sortie du film The Hunger Games au printemps 2015

Une tendance à préférer le « no logo »

A choisir, les Z préfèrent rester discrets sur les marques qu’ils achètent et portent. Le contexte récessionaire a mis fin à l’abondance et l’ostentation des deux dernières décennies, et ce pour tous les consommateurs, sans différenciation d’âge. En effet, les plus jeunes tendent à adopter la même apparence dénuée d’artifice que celle que leurs parents arborent depuis les crises économiques. En témoigne, par exemple, le repositionnement de la marque américaine de prêt-à-porter, Abercrombie & Fitch, anciennement connue pour ses t-shirts et sweatshirts ultra brandés, qui a su saisir le coche en proposant désormais des vêtements unis, au logo discret voire absent.

Abercrombie, collection Hiver 2015-2016

De la légèreté avant tout

Détourner les codes

Cette génération se joue des institutions et des codes dominants, en prenant de la distance et en tournant tout à la rigolade. Elle s’exprime par le second degré et l’autodérision via les emojis, les mèmes, les gifs animés ou encore les photos détournées. Pour elle, ces détournements sont des actes créatifs qui leur donnent de la valeur et les font sortir de l’ordinaire. A titre de référence, Miley Cyrus et Cara Delevingne sont les célébrités qui représentent ce mouvement avec le plus de justesse. Du côté de la distribution, le site e-commerce américain, Shop Jeen, propose des jupes au style Pop Art, des sacs à main au logo Coca-Cola, des robes maxi tie-dye et des colliers aux couleurs arc-en-ciel.

Site e-commerce américain shopjeen.com

Miley Cyrus, avatar de la Gen Z (Credit : Matt Sayles/Invision, via Associated Press)

La révolution « twee »

La légèreté et l’extravagance des ados d’aujourd’hui se retrouvent aussi dans l’esthétique « twee », plutôt confinée au territoire nord américain. Décryptée et formulée par Mark Spitz dans son ouvrage Twee : « The Gentle Revolution in Music, Books, Television, Fashion, and Film (It Books, 2014) », ce mouvement fait la part belle à la douceur, à la gentillesse et au positivisme. Cette nouvelle esthétique se traduit par les cupcakes et autres pâtisseries colorées, le culte des animaux mignons, les objets faits main, l’univers de Wes Anderson et les looks de l’actrice Zoeey Deschanel. Côté garde-robe, les styles sont très sexués : jupes taille haute, pois et motifs en tous genres, couleurs acidulées, ballerines vernies, costumes trois-pièces, noeud papillon…

L’actrice Zoeey Deschanel, des cupakes et une mosaïque d’emojis

 Et les marques dans tout ça ?

La génération Z aime faire le grand écart : d’un côté, ils consomment la « fast fashion », c’est-à-dire des enseignes qui maintiennent un rythme de renouvellement effréné des collections. Les enseignes comme Primark, Zara, H&M, Forever 21, New Look, Superdry… savent que les ados se lassent vite et qu’ils ont besoin de nouveauté permanente, d’où l’abondance de mini collections éphémères, de partenariats exclusifs, d’éditions limitées. De l’autre, ces mêmes ados vont chercher une identité forte chez un créateur indépendant avec lequel ils créent un lien émotionnel fort : la marque Rad, par exemple, propose des t-shirts à message humoristique ou décalé.

En outre, lorsqu’ils peuvent se permettre des extras financiers, ils se laissent séduire par les marques engagées dans des actions sociales, solidaires ou environnementales. En effet, ces tout jeunes consommateurs sont plus pragmatiques, plus éduqués, plus attentifs à leur consommation, plus critiques que ne l’étaient leurs aînés. Ils sont nés avec une conscience écologique et attendent des marques qu’elles les aident à consommer « mieux ».

Les griffes de mode, toutes confondues, doivent nécessairement investir le numérique pour rentrer en contact avec ces intuitifs du web. Au-delà de leur offre produit, elles doivent proposer un contenu accrocheur, et le faire sur tous les canaux à leur disposition : télévision, sites corporate, réseaux sociaux, applications mobiles… La vidéo en ligne est le média le plus plebiscité par les jeunes en 2016 -une opportunité que les marques peuvent facilement saisir en diffusant des courts-métrages promotionnels ou les défilés en live, entre autres.

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