26 août 2018

Temps de lecture : 4 min

Quand les enseignes de distribution repensent leurs stratégies prix

Les consommateurs ne le voient pas forcément mais les entreprises adaptent sans cesse leurs stratégies de pricing afin de survivre dans un environnement concurrentiel de plus en plus agressif.

Les consommateurs ne le voient pas forcément mais les entreprises adaptent sans cesse leurs stratégies de pricing afin de survivre dans un environnement concurrentiel de plus en plus agressif.

De nombreux facteurs sont à l’origine de la définition d’une stratégie de pricing pour une entreprise. La dynamique de l’enseigne tout d’abord, qui fait état de la condition interne de la marque et de ses parts de marché. On retrouve également la dynamique de marché, externe, qui nécessite d’avoir une étude claire de ses concurrents et d’évaluer ses fournisseurs. L’offre est aussi primordiale, permettant d’évaluer la maturité de ses produits ou le taux de besoin de nourriture de ses clients par exemple.

Justement, les clients sont la dernière composante à intégrer, quels segments et quelles occasions de consommation. C’est en prenant tous ces paramètres en compte que les enseignes peuvent élaborer la stratégie la plus adaptée et la plus performante.

L’EveryDay Low Price

Mentionnée en introduction, l’Everyday Low Price, dite EDLP, est une stratégie consistant à promettre à ses consommateurs une offre de prix bas toute l’année. Cet objectif est rendu possible par des gammes courtes, peu de marques nationales et l’absence de temps forts promotionnels. Ce modèle a émergé aux États-Unis lors de la création de Walmart, aujourd’hui leader de la grande distribution qui avait même adopté « everyday low price » comme signature de marque.

En France, on peut prendre l’exemple de Décathlon pour incarner cette stratégie de pricing. Sa vision de marque : rendre le sport accessible à tous. Pour cela, le distributeur spécialisé a depuis longtemps intégré la R&D et la fabrication à sa logique d’enseigne, pour proposer un maximum de marques de distributeurs sur lesquelles elle peut maîtriser les coûts, les prix, le nombre de références… La marque communique également sur ce positionnement en proposant des campagnes didactiques, expliquant étapes par étapes aux consommateurs ce qui permet une telle baisse des prix.

Tous les assets de la marque sont mobilisés afin d’offrir une expérience qualitative, de proposer une gamme convenant aux consommateurs mais toujours au meilleur prix. Récemment d’ailleurs, la marque a poussé son positionnement EDLP jusqu’au bout en supprimant son programme de fidélité afin de ne pas avantager certains clients par rapport à d’autres.

« Plutôt qu’un chèque de réduction de temps en temps, vous bénéficiez à chaque visite de ces baisses de prix sur nos produits », indique le directeur marketing de Décathlon. En affirmant ce positionnement, en en présentant les preuves concrètes de manière transparente, militante, simple et claire, l’enseigne est devenue celle qui inspire le plus confiance aux Français (à 80%)*.

Du discount à l’EDLP

Dans une logique de prix encore plus bas nous retrouvons la stratégie discount que nous avions évoquée précédemment. Pour proposer les prix les plus cassés, toute l’organisation est structurée autour de cet objectif. Qualité de service amoindrie, minimum de références pour augmenter le pouvoir de négociation de l’enseigne envers ses fournisseurs… Les entreprises choisissent d’avoir un équipement en magasin minimal, une absence de marques nationales et peu d’opérations (pas de promo) mais certaines démarques très agressives pour pousser encore plus bas l’image prix.

Sur le marché de l’alimentaire, on peut illustrer le discount par Netto et récemment on pouvait encore penser à Lidl. Ce dernier a décidé d’effectuer une transition du discount à l’EDLP : historiquement présentée comme une chaîne de magasins de destockage, avec un service plus que minimal et une architecture de magasin précaire, ses surfaces ont aujourd’hui bien changé.

Ce sont toutes les facettes du magasin qui ont vécu cette transition avec une nouvelle plateforme de communication, une nouvelle gestion des stocks, un référencement plus large, un ralentissement des offres promotionnelles agressives et surtout une promesse de prix bas toute l’année. En opérant ce repositionnement, Lidl concurrence des acteurs historiques de la grande distribution tels que Intermarché, Carrefour ou encore E.Leclerc.

Son image prix est toujours basse, mais c’est son image de qualité qui gagne en valeur aux yeux des consommateurs. Alors, Lidl séduit une nouvelle cible de consommation tout en conservant ses premiers publics à la recherche du produit le moins cher. Cette transition toujours en cours nécessite de nombreux investissements, en communication notamment, afin d’acquérir une image cohérente et crédible.

De l’EDLP à l’Hi-Low

Ces transitions ne s’effectuent pas que dans ce sens, d’autres acteurs décident de quitter l’EDLP pour s’adapter à un environnement concurrentiel en mouvement. C’est le cas de Darty qui s’est repositionné il y a quelques années pour passer d’une stratégie EDLP à une stratégie Hi-Low. L’enseigne affirmait sa stratégie EDLP par sa garantie de prix : si les consommateurs trouvaient moins cher ailleurs, elle leur remboursait deux fois la différence. Cette preuve de prix bas avait pour objectif de fidéliser les consommateurs puisqu’ils n’étaient pas sollicités par des promotions agressives les mettant dans un sentiment d’urgence d’achat. Mais, avec le déploiement des pure-player offrant des prix toujours plus compétitifs, elle a décidé d’adopter un positionnement différent : l’Hi Low.

C’est une stratégie qui consiste à proposer des prix « en dents de scie », plus élevés que la concurrence en-dehors des temps forts promotionnels, un commerce rythmé par beaucoup de promotions, dans une logique de guerre des prix pour conquérir des parts de marché éphémères.

La tendance est à l’hybridation des modèles

Ce que l’on remarque en étudiant plus précisément ces stratégies de pricing, c’est que les organisations ne se cantonnent pas à exploiter un archétype dans son intégralité. On assiste à une hybridation des mouvements, où chaque acteur crée son propre modèle en mixant les composantes des stratégies classiques. C’est le cas, par exemple, d’Intermarché qui adopte un positionnement de Producteur Commerçant, travaillant une image de mieux-manger et valorisant ses engagements sociétaux.

Parallèlement l’enseigne continue à déployer des offres promotionnelles extrêmement agressives à l’image de la promotion fortement médiatisée sur le produit Nutella. Alors, les entreprises doivent doser habilement leurs hybridations, afin d’avoir une stratégie cohérente, en phase avec leur marché et les attentes de leurs consommateurs sans tomber dans un modèle paradoxal qui pourrait se contredire.

What If… ?

Et si, un organisme indépendant créait un label EDLP « prix bas inchangé depuis trois ans » sur certains produits ?

Et si, une enseigne déployait un concept de magasin ne proposant qu’une seule référence produit par besoin consommateur ?

Et si, une enseigne ne faisait des remises promotionnelles que sur des produits sains, responsables et écologiques ?

Et si, une enseigne indexait ses prix en temps réel sur la fréquentation du magasin pour inciter ses clients à venir pendant les heures creuses ?

*Source : Étude Les Échos. 2016

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