21 mars 2018

Temps de lecture : 4 min

Les nouveaux vieux sont les anciens jeunes

Les cibles de communication s’appuient sur des groupes représentatifs d’une partie de la population : les millennials, les silvers, les « z »… Mais, à mesure que la société évolue, ces segmentations se reconfigurent.

Les cibles de communication s’appuient sur des groupes représentatifs d’une partie de la population : les millennials, les silvers, les « z »… Mais, à mesure que la société évolue, ces segmentations se reconfigurent.

Dans une récente étude menée pour la marque Amplifon, les agences Grenade & Sparks et Co-Meet proposent une nouvelle segmentation de population : les jeuniors. Ils ont entre 60 et 75 ans, sont issus de Mai 68, ne se reconnaissent plus dans les codes attribués aux seniors et revendiquent une forme de jeunesse. Leurs modes de vie sont en rupture avec ceux de la génération de leurs parents : ils illustrent un nouvel âge, qui découle naturellement de la jeunesse libérée et décomplexée qu’ils ont eu. Justement, c’est parce qu’ils sont décrits comme ayant « inventé la jeunesse » que cette nouvelle acception des « seniors » questionne la représentation de la jeunesse actuelle et de son mode de vie. En rupture avec les attributs des  » jeuniors « , la jeunesse française semble s’être seniorisée par ses choix de consommation, ses engagements et revendications. On peut même postuler qu’on assiste à un renversement générationnel : les jeunes seraient les nouveaux seniors, et les seniors les nouveaux jeunes ?

Trigger 1 : les vieux jeunes

Une étude de TNS Sofres, souligne le fait que les jeunes font moins la fête que leurs aînés. Les causes ? Les réseaux sociaux, en premier lieu, qui agissent comme un ersatz de vie sociale et remplissent la fonction de socialisation. Ainsi, les relations humaines réelles sont reléguées au second plan et perdent de leur importance. De plus, la mise à disposition infinie de contenus et de produits de divertissement à travers des plateformes telles que Netflix ou Amazon amplifie les comportements casaniers et n’incite pas à sortir, à s’ouvrir aux autres, à découvrir et expérimenter. Outre ces deux aspects très liés aux nouvelles technologies et aux offres qui en découlent, si les jeunes ont un mode de vie plus adulte que la génération supérieure, c’est aussi parce qu’ils sont beaucoup plus conscients de l’impact qu’une consommation déraisonnée aurait sur leurs corps et sur la planète. Ainsi, ils sont de plus en plus nombreux à arborer fièrement les #MoisSansAlcool ou #MoisSansTabac pour, à la fois, épargner leurs corps de toxines néfastes et revendiquer un mode de vie sain. En effet, faire du sport, manger bio, être vegan, ne consommer aucune drogue… deviennent des marqueurs à arborer, des étendards d’une vie saine, dans un corps sain. Si la génération supérieure se retrouvait dans une jeunesse « Sex, Drug & Rock’n’Roll », la jeunesse actuelle se sentirait plus proche de « Planet, Yoga & Quinoa ». Alors, peut-on dire que la jeunesse se « séniorise  » ? Ou est-ce simplement un nouveau mode de vie, en phase avec l’époque et ses problématiques ?

Trigger 2 : les jeunes vieux

Sébastien Dubois, directeur associé de chez Co-Meet, décrit les jeuniors comme une « génération en rupture, introvertie sur elle-même mais extravertie sur le monde, ayant une parfaite connaissance du marché et vivant cette période de 60 à 75 ans comme un épanouissement personnel ». Ainsi, les seniors ne se sentent plus « vieux ». Et surtout, ils ne veulent pas être décrits ou représentés comme tels. À l’image d’une Catherine Deneuve, d’une Brigitte Macron ou d’une Oprah Winfrey, ils souhaitent vivre pleinement leur âge, découvrir cette nouvelle phase de vie, en gardant à l’esprit leurs expériences passées mais aussi en continuant leur quête de découvertes et d’aventures. Et puisqu’ils ne veulent pas se sentir exclus du monde dans lequel ils vivent, ils sont aguerris au digital et aux réseaux sociaux dans une recherche forte de lien. Les seniors tels qu’ils sont décrits par l’étude ont tiré le meilleur des deux générations : ils ont l’expérience de leur âge mais l’envie de la jeunesse. Alors, terminés les poncifs dépeignant une cible isolée, malade, inactive… Les nouveaux seniors seraient plus fous que les jeunes !

Trigger 3 : un marketing de l’âge

Ce renversement générationnel, les marques en ont pris conscience et ont évidemment décidé de capitaliser dessus. De nombreuses campagnes diffusent des discours adressés à une cible précise, et prennent le contre-pied des attributs usuellement associés à cette audience. C’est le cas notamment de Coca-Cola, qui nous présente un octogénaire, découvrant pour la première fois le goût du Coca-Cola Zéro. Face à cette saveur inédite, il prend conscience qu’il n’a pas expérimenté tout ce que la vie avait à lui offrir, et décide donc d’aller se faire tatouer, de faire un plongeon périlleux, de devenir motard…

À l’inverse, sur les réseaux sociaux, plusieurs marques et influenceurs diffusent des contenus à destination des jeunes mais dont les thèmes s’apparentent plutôt aux seniors. Par exemple, la marque Wool and the Gang démocratise le tricot à destination des moins de 70 ans, et cumule environ 190 000 followers sur Instagram. Ou encore, la bloggeuse Et pourquoi pas Coline, témoigne de son voyage à Amsterdam par un article intitulé « Amsterdam : des musées, des tulipes et des chats ». Un programme qui ne reflète pas vraiment son âge !

Tendance : de l’âge démographique à l’âge psychologique

En réalité, la publicité ne peut pas représenter de manière exhaustive et précise ce qui constitue une génération : elle ne peut que nous envoyer des représentations de ses traits saillants. C’est en cela que nous pouvons noter un renversement de paradigme dans l’image de la jeunesse et l’image des seniors. Si auparavant l’âge était le marqueur démographique principal, il semblerait que l’on s’attache aujourd’hui à représenter un âge psychologique, un âge culturel. Qu’importe que nous ayons 27, 46 ou 73 ans, nos goûts, nos aspérités, notre relation aux autres, nos affinités aux médias… sont constitutifs de qui nous sommes et sont autant d’indices permettant au marketing et à la communication de savoir comment nous toucher, et nous convaincre. Puisque certains jeunes se comportent comme les anciens vieux et que les nouveaux vieux sont les anciens jeunes, la donnée démographique a-t-elle encore du sens ? Alors, une marque doit-elle s’adresser à une cible en fonction de son âge ou en fonction de ses centres d’intérêts, et de ses comportements ?

What if :

Et si, une enseigne de sport jouait avec la dynamique des générations dans son plan d’actions commerciales ?

Et si, une marque habituellement destinée aux seniors, imaginait une promotion inédite en magasin : les réductions sont distribuées en fonction des réponses des consommateurs à un quizz pop culture ?

Et si, on créait le premier magasin 100% dédié à la slow culture ? Trois règles simples : interdiction de parler fort, interdiction de marcher vite, interdiction d’acheter plus de 5 produits.

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