14 mai 2020

Temps de lecture : 3 min

La « dépublicitarisation » est en bon chemin, trois web-séries pour mieux comprendre

De nombreuses marques se lancent dans la production de web-séries pour se détacher des formes les plus reconnaissables de la publicité. Un brand content autour de nouvelles formes de narration « dépublicitarisées » qui camouflent l’intention marchande.

De nombreuses marques se lancent dans la production de web-séries pour se détacher des formes les plus reconnaissables de la publicité. Un brand content autour de nouvelles formes de narration « dépublicitarisées » qui camouflent l’intention marchande.

En 2019, 532 séries ont été diffusées aux États-Unis. Ce record chaque année dépassé démontre la puissance mediologique du format « sériel ». C’est donc sans surprise que les marques se sont engouffrées ces dernières années dans la production de web-séries. Des épisodes courts diffusés sur internet qui dissimulent l’intention commerciale pour privilégier un storytelling narratif divertissant. « Ce sont là des métamorphoses de la communication marchande. Plus les marques empruntent aux médias et à la culture, moins elles avouent leurs intentions marchandes, et plus elles étendent l’espace de la communication marchande » explique la chercheuse au Gripic, Caroline Marti dans Fin de la Publicité ?. L’enseignante définit ce processus comme celui d’une dépublicitarisation, c’est-à-dire d’une stratégie des marques pour se distinguer de la publicité traditionnelle par des ressorts divertissants et fictionnels. En voici trois représentatives de cette tendance.

La série interactive de Tinder

En octobre 2019 aux États-Unis, l’application de rencontre Tinder a lancé « Swipe Night » sa série interactive en six épisodes. Dès les premières minutes, vous êtes immergés dans une soirée au cours de laquelle on apprend que c’est la fin du monde. Par le système de balayage à droite et à gauche, vous devez prendre des décisions cornéliennes qui révèlent votre éthique lors d’une situation d’urgence qui vire au chaos. Si l’arc narratif de la série repose sur un poncif d’effondrement bien connu, l’interactivité du format offre une immersion intéressante qui rappelle le stupéfiant épisode interactif de Black Mirror Bandersnatch. Peu de productions s’engagent dans la série interactive au regard de son coût et du travail que nécessite l’écriture de différents scénarios.

Au-delà de l’interactivité, c’est surtout le lien étroit qui s’opère entre la web série et l’app qui fait la valeur ajoutée de « Swipe Night ». La somme des choix de chaque spectateur est transférée à un algorithme qui associe des profils d’utilisateurs ayant pris des décisions similaires. Cette façon d’orchestrer différemment la rencontre amoureuse par une portée d’entrée fictionnelle et divertissante a permis d’accroitre l’engagement des utilisateurs de la plateforme. La société a ainsi déclaré que la web-série avait entrainé une augmentation de 25% des likes et une augmentation de 30% des matchs lors des jours de diffusion. En touchant le public par un contenu non commercial dont la finalité est pourtant marchande, Tinder a su tirer profit d’une stratégie transmedia bénéfique pour son image et ses revenus publicitaires.

La série à insights de La Banque Postale

Un autre exemple cette fois-ci français de dépublicitarisation revient à La Banque Postale dont la web-série « Comme le disent les gens » met en scène dans chaque épisode une une saynète issue de la vie quotidienne. Des insights forts qui ciblent à chaque fois une clientèle précise : les économes, les étudiants, les gens en couple… « Il est important de se rapprocher de ses cibles en les considérant comme un ensemble d’individus à qui raconter une histoire, qu’elle soit divertissante ou éducative » explique Thomas Jamet dans son livre consacré aux défis du brand content. Le registre en outre familier des dialogues favorise l’identification aux personnages.

Avec déjà une cinquantaine d’épisodes diffusés, la web-série cartonne. Son succès réside dans sa sobriété : ni le nom de la marque ni ses services ne sont mentionnés à un quelconque moment dans le fil narratif. Ce n’est qu’à la toute fin de l’épisode qu’apparaissent le logo et une invitation à découvrir les offres de l’entreprise. Cette émancipation des codes traditionnels de la publicité par une marque positionnée en arrière-plan permet d’insister sur la dimension humoristique de l’histoire et d’écarter la méfiance du spectateur.

La série modèle d’Oasis

S’il y a bien une web-série qui a servi de référence en matière de brand content et de dépublicitarisation des contenus, c’est « L’effet Papayon » de Oasis avec l’agence Marcel lancé en 2014. Chaque épisode possède son unité spatio-temporelle propre ce qui permet de « sérialiser » et diversifier le format. L’anthropomorphisation des fruits favorise par ailleurs l’identification aux personnages et le caractère humoristique de la série. Les arcs narratifs comme la romance fruitée entre une fraise et une framboise ont participé au caractère décalé de l’histoire. Sur le plan technique, l’utilisation de la technologie 3D et de prises de vues réalistes consolide l’histoire, faisant de « L’effet Papayon » une web-série modèle dans le milieu du brand content.

En adoptant les codes du genre sériel par un contenu en apparence désintéressé sur le plan marchand, une marque est capable de tisser une histoire authentique et douce qui ne présente pas les inconvénients parfois agressifs de la publicité traditionnelle.

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