21 octobre 2019

Temps de lecture : 4 min

Pour les banques, l’argent compte plus que la morale

Dans son dernier classement sur les entreprises les plus éthiques, Moralscore s’attaque au monde de la finance. Les résultats sont désastreux…

Dans son dernier classement sur les entreprises les plus éthiques, Moralscore s’attaque au monde de la finance. Les résultats sont désastreux…

L’argent ne fait peut-être pas le bonheur mais il ne vous rend pas non plus très éthique. Moralscore propose aux internautes de classer les entreprises selon des critères environnementaux, sociaux et fiscaux. Après avoir épinglé les marques d’habillement, les enseignes d’ameublement, les constructeurs automobiles, les compagnies aériennes, les livreurs de repas, les équipementiers sportifs et les fabricants de smartphones, ce site a analysé dans le détail le secteur… bancaire. Et le moins que l’on puisse dire est que les géants de la finance ont plus de liquide dans leurs coffres que de valeurs morales dans leur stratégie de management.

La taille ne fait rien à l’affaire

« Ce secteur est globalement un des plus mauvais parmi tous ceux que nous avons étudié à ce jour, explique Rafi Haladjian, le fondateur de Moralscore . La note moyenne des banques est nettement plus basse que celle des autres sociétés. Celle de BNP Paribas est même la pire que nous ayons jamais donné ». Les grands réseaux sont ceux qui ont été le plus malmenés par la plateforme fondée en 2017 et mise en ligne au début de cette année. Dans le quintet de queue se trouvent le Crédit Mutuel, Banque Populaire, LCL, Société Générale et BNP Paribas. La Caisse d’Epargne (7ème), CIC (8ème) et le Crédit Agricole (9ème) font à peine mieux. Le podium est occupé par le Crédit Coopératif, La Banque Postale et N26. Revolut et Boursorama les suivent de près. Les banques en ligne semblent ainsi bien plus « morales » que les acteurs historiques de ce secteur. Mais le monde de la finance n’est pas tout blanc ou tout noir.

Critères subjectifs

«Les établissements « les plus éthiques sont ceux dans lesquels la qualité de service est la plus faible, reconnaît Rafi Haladjian, un serial-entrepreneur qui a créé plusieurs entreprises dont le fabricant d’objets connectés Sen.se et FranceNet qui fut un des tous premiers fournisseurs d’accès à internet dans l’hexagone. «Nous espérions en lançant notre étude que certaines banques sortiraient du lot mais nous nous sommes aperçus qu’il n’existait pas de banques à la fois éthiques, de bonne qualité et proposant des prix raisonnables ». Comment alors dans ce cas classer des élèves qui sont tous mauvais ? C’est ici que réside la particularité de Moralscore qui fonde ses études sur des critères à la fois objectifs mais aussi totalement subjectifs pour ne pas dire arbitraires.

Entre le marteau et l’enclume

Comment en effet choisir entre le marteau et l’enclume ? Ce site comparatif est bien conscient des limites de son exercice. « Faut-il favoriser les entreprises qui agissent pour l’environnement mais qui offrent des conditions de travail déplorables», se demande t-il. Faut-il choisir celles qui sont extrêmement innovantes, créent de nombreux emplois, mais en générant une précarité inédite pour des rémunérations de misère ? Faut-il préférer la petite startup française pleinement vertueuse, si elle propose des produits de piètre qualité par rapport à ceux des multinationales ? Protéger sérieusement la vie privée de ses clients donne-t-il le droit à ne pas payer d’impôts ? Payer vos impôts en France vous autorise-t-il à polluer à l’autre bout de la planète ? Offrir des produits bio à prix compétitif c’est bien, mais avec quelles conséquences pour le paysan ?. Toutes ces questions pourraient faire un joli sujet pour le Bac Philo… « Aucune entreprise n’est tout à fait bienfaisante ou malfaisante, explique la plateforme. Pour pouvoir choisir celles qui sont les plus vertueuses, il est nécessaire de décider quels sont les critères de jugement les plus importants ».

Ce sont les utilisateurs qui en parlent le mieux

Moralscore ne veut pas jouer le rôle de censeur en donnant un avis universel défini par ses propres experts. Il préfère suivre les conseils de ses utilisateurs qui définissent leur propre échelle de valeurs en répondant à une dizaine de questions sur le site. Comment une entreprise doit partager ses revenus ? Comment doit-elle considérer son impact social et environnemental ? Où doit-elle payer ses impôts et quelle législation doit-elle respecter ? En définissant leur « profil moral » (sic), les internautes établissent un classement qui donne plus d’importance à un critère plutôt qu’un autre. Les grandes banques sont ainsi particulièrement épinglées car « elles affichent un bilan désastreux en matière de protection de l’environnement », regrette Rafi Haladjian qui pointe aussi du doigt leur implication dans des cas d’évasion fiscale. Les licenciements massifs annoncés dans plusieurs groupes, l’automatisation de nombreuses tâches, la piètre qualité des services et leurs tarifs élevés ne plaident pas non plus en leur faveur.

Nouveau classement tous les dix jours

Moralscore, qui compte six salariés à ce jour, compte publier un nouveau classement tous les dix jours. Aujourd’hui, une centaine d’entreprises ont été analysées mais leur nombre devrait franchir le cap des 500 avant la fin de l’année. « Cela nous permettra d’augmenter notre audience, juge Rafi Haladjian. Nous avons à ce jour 200.000 utilisateurs mais nous devons dépasser le million d’internautes pour pouvoir créer un modèle économique viable. Je finance encore ce projet sur mes deniers mais lorsque notre taille critique sera suffisante, nous pourrons notamment proposer des modèles premium payants et fournir des outils de RSE pour les entreprises ». Certaines banques pourraient en avoir bien besoin…

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