1 décembre 2015

Temps de lecture : 4 min

Marque : reconstruire ou réaffirmer sa personnalité

Le digital a bouleversé la notion du temps. Si une marque peut être repérée de manière beaucoup plus rapide que par le passé et devenir mainstream, elle devra aussi très vite se réinventer…

Le digital a bouleversé la notion du temps. Si une marque peut être repérée de manière beaucoup plus rapide que par le passé et devenir mainstream, elle devra aussi très vite se réinventer…

En adaptant ou en sublimant leurs fondamentaux, de nombreuses marques ont réussi leur mutation. Tout en conservant la démonstration à domicile qui a fait son succès et sa proximité avec les consommatrices depuis 1946, Tupperware s’est adapté à l’évolution des modes de vie en créant dès les années 80 des produits plus technologiques qui supportent la chaleur du micro-onde et du four traditionnel et répondent aux préoccupations sur l’usage du plastique dans l’alimentaire. En s’appuyant sur des savoir-faire développés depuis 1959, Yves Rocher a pu anticiper les demandes des femmes pour une cosmétique plus naturelle et soucieuse du développement durable. L’entreprise de produits cosmétiques à base de plantes s’est progressivement muée en « spécialiste de la cosmétique végétale ».

Dans un monde où le consommateur évolue en permanence, comment les marques ne seraient pas contraintes d’en faire autant ? La culture d’innovation et du challenge est un élément clé : « C’est quand la concurrence et le marché nous poussent dans nos derniers retranchements que nous parvenons à maintenir le niveau de notre offre, indiquait Philippe Pauze, PDG de Picard, lors de la première édition du Food Morning, à Paris. Un leader doit avoir l’intelligence de faire des tests en vrai : produire, voir si cela marche et tirer parti de ses échecs. Si tout ce qu’on lançait marchait bien, cela voudrait dire que l’on n’a pas assez innové. »

Même les colosses sont faits d’argile…

Les signes avant-coureurs des évolutions à mener ne sont pas toujours faciles à détecter, surtout quand tout semble encore aller pour le mieux dans les informations qui remontent au conseil d’administration… « Ce n’est pas parce qu’une marque est attractive qu’elle n’est pas fragile. Même un leader est très fragile. Beaucoup de marques ont du mal à se rendre compte qu’elles doivent se réinventer car le changement engendre souvent des comportements de peur », affirme Caroline Amand, directrice de la stratégie de marque chez Peclers Paris. Il est souvent difficile de trouver en interne les capacités de se réinventer ou d’imaginer les scénarios de transition. « Ce qui manque souvent ces derniers temps, c’est un projet et quelqu’un qui le porte, constate pour sa part Vincent Grégoire, directeur du département Art de Vivre de Nelly Rodi. Beaucoup de marques nous disent qu’elles ne comprennent plus la concurrence, le marché…, sans avoir de point de vue clair sur ce qu’il faudrait faire. Elles ont parfois fait réaliser des études mais les éléments ne sont pas mis en perspective. »

Un projet partagé avec l’interne et l’externe

Le digital est généralement au cœur des enjeux et touche, par nature, tous les secteurs de l’entreprise. « Il est important de désiloter l’organisation, les talents et les générations. De faire travailler ensemble les digital natives en quête de reconnaissance dans l’entreprise, et les baby boomers qui la dirigent et ne comprennent pas toujours ce que font les digital native. Dans un projet de reconstruction, tout le monde doit avoir l’impression d’être dans la même aventure », poursuit Vincent Grégoire. L’impulsion peut aussi venir de partenariats bien compris. « Mettre en relation des grands-comptes avec des petites structures est fondamental sur le sujet de l’innovation : cela permet une ouverture sur des pratiques plus flexibles, plus agiles, plus transversales, plus réactives… », affirme Yann Glever, directeur de l’innovation chez Deloitte (1).

Pour regagner la faveur de consommateurs devenus tout puissants, les marques gagnent à adopter un discours plus proche des populations auxquelles elles s’adressent. C’est particulièrement vrai pour les marques mondialisées. Une stratégie « glocale » leur permet de mettre en cohérence un projet d’ensemble et une offre plus personnalisée, de se positionner davantage dans le partage et moins dans le rapport de force. Cette approche, portée dès la fin des années 90 par Denis Hennequin, PDG France puis Europe de McDonald’s, a permis à l’enseigne de remettre de la sincérité dans ses produits, dans la décoration des restaurants et dans sa communication. Le burger ayant gagné ses lettres de noblesse auprès des adeptes du fooding, l’enseigne a lancé plusieurs expérimentations autour de gammes de luxe visant à s’attirer les faveurs d’une clientèle de cadres et d’actifs aisés. Une opportunité de plus, s’il en fallait, pour décliner ses campagnes de publicité qui mettent les produits en majesté…

Adopter ou adapter les codes

Ces marques en réinvention doivent s’adapter aux nouveaux codes de leur marché, sans donner l’impression de singer – en moins bien – leurs jeunes challengers. S’il semble naturel qu’un site de mise en relation entre particuliers demande de noter la prestation d’un hôte ou d’un chauffeur, la pratique paraît plus suspecte lorsqu’elle émane d’une compagnie de taxi ou d’un hôtelier tout ce qu’il y a de plus traditionnels…

Pour préempter un nouvel univers en toute sincérité, il peut être utile de séparer les activités ou les canaux de communication. A côté de leur activité principale, bon nombre de distributeurs traditionnels ont monté des offres collaboratives : Castorama avec Troc’Heures pour trouver ou offrir une compétence, Casino avec Cvous.com, la plateforme communautaire sur laquelle les clients suggèrent des idées de nouveaux services ou produits… BNP Paribas utilise Facebook pour recruter les utilisateurs de son « espace de partage d’idées », qui testent ses nouveaux produits digitaux et proposent des idées d’innovations qui seront ensuite discutées, commentées et soumises à un vote.

« Beaucoup de marques commencent à comprendre que leurs clients ne sont plus des consommateurs mais des co-sommateurs, qui veulent être mis dans la boucle, partager la culture d’un projet et ne pas être manipulés », note Vincent Grégoire. Ces attentes sont particulièrement exacerbées chez les jeunes  : « Ils peuvent être dans la non-consommation mais arriver à avoir ce qu’ils veulent à travers le troc, le lol, le smile…, ou dans la sur-consommation lorsqu’ils trouvent à s’enflammer pour un projet sincère », note-t-il.

Emma Duchatot

Découvrez l’intégralité du rapport INfluencia / Dagobert sur  » Les Marques qui comptent « 

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