3 mai 2017

Temps de lecture : 3 min

« Uberisation » : un raccourci simpliste et dangereux

C’est le mot dont ne peuvent plus se passer les acteurs et les observateurs de l’économie, tous secteurs confondus : « uberisation ». Pour expliquer concrètement le phénomène, et se préparer, imaginons un plateau de jeu, ses pions, leurs forces, les stratégies offensives et d’anticipation.

C’est le mot dont ne peuvent plus se passer les acteurs et les observateurs de l’économie, tous secteurs confondus : « uberisation ». Pour expliquer concrètement le phénomène, et se préparer, imaginons un plateau de jeu, ses pions, leurs forces, les stratégies offensives et d’anticipation.

Au même titre que « digital » ou « transformation », « uberisation » est un concept valise, réducteur et imprécis. Il ne favorise pas le passage à l’action. La cannibalisation de toutes les activités de l’économie ne peut pas se limiter au mot « uberiser ». Certes, cette simplification est confortable pour les médias. Elle leur permet de pointer du doigt un bouc émissaire que les journalistes – et quelques patrons qui n’ont sans doute pas bien compris le sujet – qualifient de « nouveaux barbares ». On sait tous qu’il n’y a pas de bon storytelling sans un adversaire clairement identifié et, si possible, méchant. Mais ce n’est pas suffisant, ni satisfaisant pour comprendre ce phénomène, et surtout cela ne permet pas de se préparer.

Les règles du jeu

Proposons une nouvelle grille de lecture qui fonctionnerait pour tous les secteurs de l’économie. Elle aide à décrypter la situation, de mesurer l’exposition de son secteur et d’identifier les risques pour anticiper (quand il en est encore temps). L’analyse des secteurs cannibalisés (tourisme, finance, assurance, mobilité, musique, immobilier, distribution, santé, etc.) permet de décoder trois clés d’entrée. Et puisqu’une infographie vaut mieux qu’un long discours…

LE CŒUR DE MÉTIER (Core Business) : les nouveaux entrants se proposent de faire le même métier que vous, mais autrement. Ils se focalisent sur l’usage et sur l’expérience utilisateur en effaçant toutes les conventions. Ils attaquent en frontal le cœur de métier des entreprises avec de nouveaux modèles économiques. Ils entrent sur des marchés historiques en bénéficiant d’avantages compétitifs solides (nouveaux usages, avantages technologiques, agilité et vitesse d’exécution, expérience utilisateur fluide et innovante).
Ils s’appellent : Uber, Airbnb, Blablacar, Lymo, Nickel, iTunes, AmazonFresh, La Ruche qui dit oui…

L’INTERMÉDIATION : ces « nouveaux barbares » s’immiscent entre vous et vos clients pour leur proposer des services que vous ne leur rendez pas ou que vous ne savez plus leur rendre. Ils se positionnent comme le premier point de contact dans la chaîne de valeur, captent la transaction et accaparent la donnée client grâce à une qualité de service innovante et souvent multimarque.
Ils s’appellent : Booking, SeLoger.com, Linxo, Trainline (ex Captain Train), Deezer, FidMe…

LES NOUVEAUX USAGES (Over-The-Top services) : ces start-up se positionnent à la périphérie de votre core business et imaginent des services que les technologies autorisent maintenant et que vous n’avez pas vus venir. Et cependant, ils n’existeraient pas si vous n’existiez pas. Ce sont les nouveaux usages connectés créés au plus près des attentes nouvelles des publics insatiables. Ces acteurs ouvrent un nouveau segment de la chaîne de valeur de votre secteur et bénéficient d’une position de « premier entrant ».
Ils s’appellent : TripAdvisor, Drivy, Zenpark, InsPeer, Safe-Drive, Nextdoor, Delivery.com, Mobeye…

Les stratégies d’attaque (et ripostes)

Quels que soient les nouveaux act eurs, ils se focalisent sur les usages de vos publics avec agilité. Leur méthode ? Essayer, test er, se tromper, analyser, pivoter et recommencer. Comment réagir ? Avant tout en mesurant son exposition et ses risques et en adaptant sa réponse en fonct ion de la nature de ces attaques et des usages légitimes de ses publics. Souvent, l’attaque commence par l’intermédiation. La réponse appropriée est la vitesse et le mode st art-up. Elle permet de lever tous les freins, qu’ils soient réglementaires ou liés aux syst èmes d’information (SI), et d’occuper rapidement le terrain avec une réponse adaptée aux usages attendus.

La méthodologie déployée est celle du Lean UX (le travail sur l’expérience utilisateur, User Experience), avec une gouvernance très agile. On est dans le temps court ! Si l’attaque se fait direct ement sur le core business, la démarche consist e à diagnost iquer ses processus métiers pour identifi er les dysfonct ionnements au regard des usages de ses publics et de l’impact des propositions des nouveaux entrants. On est dans le temps long et dans le change management. Enfi n, si la disruption se fait sur les nouveaux services OTT (à la périphérie de votre core business), la réponse est l’open innovation. Un partenariat opérationnel avec des act eurs susceptibles de porter des solutions technologiquement innovantes, rapidement.

La désignation du gagnant

On voit ici que cette quest ion est avant tout du ressort des équipes dirigeantes. Ces comex ne peuvent plus se contenter d’une « intuition digitale » dans laquelle il est assez satisfaisant de se complaire, ni de réponses défensives, législatives ou réglementaires. Comme le disait le physicien danois Niels Bohr, « les idées nouvelles ne s’imposent jamais, ce sont leurs adversaires qui fi nissent par mourir ». Quand elle est juste, l’innovation est patiente. Il est urgent pour chaque comex de se const ruire une culture commune et de réveiller leur curiosité.

Article tiré de la revue sur la transformation

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